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Ta mort sera la mienne par F. Colin

Fiche de Ta mort sera la mienne

Titre : Ta mort sera la mienne
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2013
Editeur : Sonatine

Première page de Ta mort sera la mienne

« La visière de son casque est baissée et il n’y a plus en lui la moindre place pour le doute. Son casque : noir. Sa combinaison : noire. Son cœur ?

Il s’avance dans la travée, introduit une série de balles dans le magasin de son fusil à pompe puis, de nouveau, fait feu. Les corps tressautent et s’effondrent comme à un stand de fête foraine. Même joueur joue encore.

Jilian n’entend rien. La première détonation était trop proche. Un sifflement aigu lui a succédé – qui s’est dissous dans le silence. Elle a lu un article là-dessus, un jour. Blast auriculaire, perforation du tympan. Il paraît que certains soldats ne retrouvent jamais leur ouïe.

Jilian se sent trembler. Une béance rugit en elle avant de s’évanouir, remplacée par une sensation de chute.

Le tueur marque une pause. On dirait qu’il prend le temps de l’examiner, pesant le pour et le contre. Après quoi il se remet en marche. »

Extrait de : F. Colin. « Ta mort sera la mienne. »

Plus rien entre nous, Laurens par F. Colin

Fiche de Plus rien entre nous, Laurens

Titre : Plus rien entre nous, Laurens
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2013
Editeur : Sonatine

Première page de Plus rien entre nous, Laurens

« Tu me manques comme les armes manquent à la guerre, Laurens, mais nous sommes tenues de suivre le protocole et soyons honnêtes : c’est plus simple de cette façon.
Si la vie était juste, quelqu’un viendrait s’asseoir dans le sable à côté de toi pour t’annoncer que tu ne retrouverais jamais ta femme. « On » t’aiderait à te relever alors, « on » te remettrait sur le chemin de ton hôtel tandis que des fragments de photos déchirées voltigeraient dans ton sillage.
Mais la vie n’est pas juste, la vie n’est pas, selon tes critères, suave et tranquille, et, oui, elle a un sens – le problème, c’est que, comme tu n’es ni saint ni philosophe et encore moins artiste, tu ne le connaîtras jamais. »

Extrait de : F. Colin. « Plus rien entre nous, Laurens. »

Jenny par F. Colin

Fiche de Jenny

Titre : Jenny
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2016
Editeur : Sonatine

Première page de Jenny

« Seul face aux vagues. Est-il possible d’être aussi seul ? Sombre, démonté, l’océan est comme le reflet de son âme.

5340 Studio Drive. Une maison de bardeaux bleus aux fenêtres closes. La nuit s’abat, rideau sur la scène, et on n’entend plus que cette colère du bout du monde.

Il est sorti sur la terrasse pour fumer, mais l’idée même d’allumer une cigarette est risible. Ses doigts se crispent sur le paquet, l’écrasent puis le lâchent ; le vent l’emporte en trois secousses.

Pour ce qu’il en sait, les deux maisons voisines sont inoccupées. C’est ce que lui a certifié la logeuse. Il espère que c’est vrai.

Des épingles chauffées à blanc percent la voûte du ciel, d’énormes nuages fulminent. Bientôt, il pleuvra du sang.

Il s’agrippe à la rambarde. Il ne dort plus, à présent, quelques minutes glanées ici et là, tel un marin qui ne serait pas sûr de revoir le rivage un jour.

Il se nourrit d’eau du robinet, reste éveillé grâce au Xanax. Effets secondaires ? Nervosité, épuisement, hallucinations, cauchemars. Cauchemars, oui. S’il reste de la place.

De mystérieux oiseaux blancs rasent les vagues avant de s’évanouir dans la nuit californienne. Il aimerait que les tremblements cessent. »

Extrait de : F. Colin. « Jenny. »

Blue Jay Way par F. Colin

Fiche de Blue Jay Way

Titre : Blue Jay Way
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2012
Editeur : Sonatine

Première page de Blue Jay Way

« Tu as changé, me disais-je en avançant vers le nord. Ce qui s’est passé t’a détruit mais le pire, tu dois le reconnaître, aurait été que le destin t’oublie.

Poings serrés dans les poches de ma veste, j’ai pressé l’allure. Marche, recommandait le message. Marche droit vers le parc.
De temps à autre, je levais les yeux au ciel. La nuit qui se déployait sur New York n’avait plus rien en commun avec l’océan des temps anciens. C’était juste une fatalité désormais, juste une ode fanée aux lumières et aux sirènes, à la puissance fragile des monstres de verre qui s’obstinaient à diffracter son image, et ces ténèbres-là ne recelaient plus de magie : les meilleures histoires avaient été racontées il y a des siècles.
Mon reflet se découpait en stop motion sur les vitrines de la 5e Avenue. On aurait pu penser que je fuyais un danger, que je poursuivais une ombre, on aurait pu croire que je cherchais une réponse, mais quelle était la question ? »

Extrait de : F. Colin. « Blue Jay Way. »