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Silence par Edgar Allan Poe

Fiche de Silence

Titre : Silence
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1837
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Silence

« Ecoute-moi, – dit le Démon, en plaçant sa main sur ma tête. – La contrée dont je parle est une contrée lugubre en Libye, sur les bords de la rivière Zaïre. Et là, il n’y a ni repos ni silence.

Les eaux de la rivière sont d’une couleur safranée et malsaine ; et elles ne coulent pas vers la mer, mais palpitent éternellement, sous l’oeil rouge du soleil, avec un mouvement tumultueux et convulsif. De chaque côté de cette rivière au lit vaseux s’étend, à une distance de plusieurs milles, un pâle désert de gigantesques nénuphars. Ils soupirent l’un vers l’autre dans cette solitude, et tendent vers le ciel leurs longs cous de spectres, et hochent de côté et d’autre leurs têtes sempiternelles. Et il sort d’eux un murmure confus qui ressemble à celui d’un torrent souterrain. Et ils soupirent l’un vers l’autre. »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Silence. »

Révélation magnétique par Edgar Allan Poe

Fiche de Révélation magnétique

Titre : Révélation magnétique
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1844
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Révélation magnétique

« Bien que les ténèbres du doute enveloppent encore toute la théorie positive du magnétisme, ses foudroyants effets sont maintenant presque universellement admis. Ceux qui doutent de ces effets sont de purs douteurs de profession, une impuissante et peu honorable caste. Ce serait absolument perdre son temps aujourd’hui que de s’amuser à prouver que l’homme, par un pur exercice de sa volonté, peut impressionner suffisamment son semblable pour le jeter dans une condition anormale, dont les phénomènes ressemblent littéralement à ceux de la mort, ou du moins leur ressemblent plus qu’aucun des phénomènes produits dans une condition normale connue ; que, tout le temps que dure cet état, la personne ainsi influencée n’emploie qu’avec effort, et conséquemment avec peu d’aptitude, les organes extérieurs des sens, et que néanmoins elle perçoit, avec une perspicacité singulièrement subtile et par un canal mystérieux, des objets situés au delà de la portée des organes physiques ; que de plus, ses facultés intellectuelles s’exaltent et se fortifient d’une manière prodigieuse »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Révélation magnétique. »

Quatre bêtes en une par Edgar Allan Poe

Fiche de Quatre bêtes en une

Titre : Quatre bêtes en une
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1836
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Quatre bêtes en une

« Antiochus Épiphanes est généralement considéré comme le Gog du prophète Ézéchiel. Cet honneur toutefois revient plus naturellement à Cambyse, le fils de Cyrus. Et d’ailleurs, le caractère du monarque syrien n’a vraiment aucun besoin d’enjolivures supplémentaires. Son avènement au trône, ou plutôt son usurpation de la souveraineté, cent soixante et onze ans avant la venue du Christ ; sa tentative pour piller le temple de Diane à Éphèse ; son implacable inimitié contre les Juifs ; la violation du saint des saints, et sa mort misérable à Taba, après un règne tumultueux de onze ans, sont des circonstances d’une nature saillante, et qui ont dû généralement attirer l’attention des historiens de son temps, plus que les impies, lâches, cruels, absurdes et fantasques exploits qu’il faut ajouter pour faire le total de sa vie privée et de sa réputation. »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Quatre bêtes en une. »

Puissance de la parole par Edgar Allan Poe

Fiche de Puissance de la parole

Titre : Puissance de la parole
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1845
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Puissance de la parole

« OINOS. – Pardonne, Agathos, à la faiblesse d’un esprit fraîchement revêtu d’immortalité.

AGATHOS. – Tu n’as rien dit, mon cher Oinos, dont tu aies à demander pardon. La connaissance n’est pas une chose d’intuition, pas même ici. Quant à la sagesse, demande avec confiance aux anges qu’elle te soit accordée !

OINOS. – Mais, pendant cette dernière existence, j’avais rêvé que j’arriverais d’un seul coup à la connaissance de toutes choses, et du même coup au bonheur absolu.

AGATHOS. – Ah ! ce n’est pas dans la science qu’est le bonheur, mais dans l’acquisition de la science ! Savoir pour toujours, c’est l’éternelle béatitude ; mais tout savoir, ce serait une damnation de démon.

OINOS. – Mais le Très-Haut ne connaît-il pas toutes choses ?

AGATHOS. – Et c’est la chose unique (puisqu’il est le Très-Heureux) qui doit lui rester inconnue à lui-même.

OINOS. – Mais, puisque chaque minute augmente notre connaissance, n’est-il pas inévitable que toutes choses nous soient connues à la fin ? »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Puissance de la parole. »

Philosophie de l’ameublement par Edgar Allan Poe

Fiche de Philosophie de l’ameublement

Titre : Philosophie de l’ameublement
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1840
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Philosophie de l’ameublement

« Dans la décoration intérieure, si ce n’est dans l’architecture extérieure de leurs résidences, les Anglais excellent. Les Italiens n’ont qu’un faible sentiment en dehors des marbres et des couleurs. En France, meliora probant, deteriora sequuntur ; les Français sont une race trop coureuse pour entretenir ces talents domestiques dont ils ont d’ailleurs la très délicate intelligence, ou du moins le sens élémentaire et juste. Les Chinois et la plupart des peuples orientaux ont une imagination chaude mais mal appropriée. Les Écossais sont de trop pauvres décorateurs. Les Hollandais ont peut-être l’idée vague qu’on ne fait pas un rideau avec de la gratte 1. En Espagne, ils sont tout rideaux – une nation qui raffole de pendaisons 2. Les Russes ne se meublent pas. Les Hottentots et les Kickapoos sont bien dans leur voie naturelle. Seuls, les Yankees vont à rebours du bons sens.

Comment cela se fait, il n’est pas difficile de le comprendre. Nous n’avons pas d’aristocratie de naissance, et conséquemment ayant – chose naturelle et inévitable – fabriqué à notre usage une aristocratie de dollars, l’étalage de la richesse a dû prendre ici la place et remplir l’office du luxe nobiliaire dans les pays monarchiques. »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Philosophie de l’ameublement. »

Petite discussion avec une momie par Edgar Allan Poe

Fiche de Petite discussion avec une momie

Titre : Petite discussion avec une momie
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1845
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Petite discussion avec une momie

« Le symposium de la soirée précédente avait un peu fatigué mes nerfs. J’avais une déplorable migraine et je tombais de sommeil. Au lieu de passer la soirée dehors, comme j’en avais le dessein, il me vint donc à l’esprit que je n’avais rien de plus sage à faire que de souper d’une bouchée, et de me mettre immédiatement au lit.

Un léger souper, naturellement. J’adore les rôties au fromage. En manger plus d’une livre à la fois, cela peut n’être pas toujours raisonnable. Toutefois, il ne peut pas y avoir d’objection matérielle au chiffre deux. Et, en réalité, entre deux et trois, il n’y a que la différence d’une simple unité. Je m’aventurai peut-être jusqu’à quatre. Ma femme tient pour cinq ; – mais évidemment elle a confondu deux choses bien distinctes. Le nombre abstrait cinq, je suis disposé à l’admettre ; mais, au point de vue concret, il se rapporte aux bouteilles de Brown Stout, sans l’assaisonnement duquel la rôtie au fromage est une chose à éviter. »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Petite discussion avec une momie. »

Ombre par Edgar Allan Poe

Fiche de Ombre

Titre : Ombre
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1835
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Ombre

« Vous qui me lisez, vous êtes encore parmi les vivants ; mais moi qui écris, je serai depuis longtemps parti pour la région des ombres. Car, en vérité, d’étranges choses arriveront, bien des choses secrètes seront révélées, et bien des siècles passeront avant que ces notes soient vues par les hommes. Et quand ils les auront vues, les uns ne croiront pas, les autres douteront, et bien peu d’entre eux trouveront matière à méditation dans les caractères que je grave sur ces tablettes avec un stylus de fer.

L’année avait été une année de terreur, pleine de sentiments plus intenses que la terreur, pour lesquels il n’y a pas de nom sur la terre. Car beaucoup de prodiges et de signes avaient eu lieu, et de tous côtés, sur la terre et sur la mer, les ailes noires de la Peste s’étaient largement déployées. Ceux-là néanmoins qui étaient savants dans les étoiles n’ignoraient pas que les cieux avaient un aspect de malheur »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Ombre. »

Morella par Edgar Allan Poe

Fiche de Morella

Titre : Morella
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1835
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Morella

« Ce que j’éprouvais relativement à mon amie Morella était une profonde mais très singulière affection. Ayant fait sa connaissance par hasard, il y a nombre d’années, mon âme, dès notre première rencontre, brûla de feux qu’elle n’avait jamais connus ; – mais ces feux n’étaient point ceux d’Éros et ce fut pour mon esprit un amer tourment que la conviction croissante que je ne pourrais jamais définir leur caractère insolite, ni régulariser leur intensité errante. Cependant, nous nous convînmes, et la destinée nous fit nous unir à l’autel. Jamais je ne parlai de passion, jamais je ne songeai à l’amour. Néanmoins, elle fuyait la société, et, s’attachant à moi seul, elle me rendit heureux. Être étonné, c’est un bonheur ; – et rêver, n’est-ce pas un bonheur aussi ?

L’érudition de Morella était profonde. Comme j’espère le montrer, ses talents n’étaient pas d’un ordre secondaire »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Morella. »

Metzengerstein par Edgar Allan Poe

Fiche de Metzengerstein

Titre : Metzengerstein
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1832
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook

Première page de Metzengerstein

« L’horreur et la fatalité se sont donné carrière dans tous les siècles. À quoi bon mettre une date à l’histoire que j’ai à raconter ? Qu’il me suffise de dire qu’à l’époque dont je parle existait dans le centre de la Hongrie une croyance secrète, mais bien établie, aux doctrines de la métempsycose. De ces doctrines elles-mêmes, de leur fausseté ou de leur probabilité, – je ne dirai rien. J’affirme, toutefois, qu’une bonne partie de notre crédulité vient, – comme dit La Bruyère, qui attribue tout notre malheur à cette cause unique – de ne pouvoir être seuls.

Mais il y avait quelques points dans la superstition hongroise qui tendaient fortement à l’absurde. Les Hongrois différaient très essentiellement de leurs autorités d’Orient. »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Metzengerstein. »

Mellonta Tauta par Edgar Allan Poe

Fiche de Mellonta Tauta

Titre : Mellonta Tauta
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1887
Traduction :
Editeur : Bibebook

Première page de Mellonta Tauta

« A bord du Ballon l’Alouette,

1 avril, 2848.

Il faut aujourd’hui, mon cher ami, que vous subissiez, pour vos péchés, le supplice d’un long bavardage. Je vous déclare nettement que je vais vous punir de toutes vos impertinences, en me faisant aussi ennuyeux, aussi décousu, aussi incohérent, aussi insupportable que possible.

Me voilà donc encaqué dans un sale ballon, avec une centaine ou deux de passagers appartenant à la canaille, tous engagés dans une partie de plaisir (quelle bouffonne idée certaines gens se font du plaisir !) et ayant devant moi la perspective de ne pas toucher la terre ferme avant un mois au moins. Personne à qui parler. Rien à faire. Or quand on n’a rien à faire, c’est le cas de correspondre avec ses amis. »

Extrait de : Edgar Allan Poe. « Mellonta Tauta. »