Catégorie : Livres

 

Les cancres se déchaînent par Raymond Milési

Fiche de Les cancres se déchaînent

Titre : Les cancres se déchaînent
Auteur : Raymond Milési
Date de parution : 2015
Editeur : l’Archipel

Première page de Les cancres se déchaînent

« Dans la vie, j’aimerais ne rien faire du tout, ou alors professeur.

Cette affirmation piochée dans un commentaire de texte pourrait laisser supposer que le métier d’enseignant est tenu pour une sinécure par bien des élèves (peut-être parce qu’à leurs yeux on y passe son temps à faire travailler les autres ?). Pas sûr. Il faut tout de même, remarquent-ils, « étudier » plusieurs années avant d’y arriver. Et la réflexion ci-dessous, relevée en interro d’histoire, indique une certaine défiance envers les études :

 Les scribes apprenaient longtemps, comme un professeur. Comme ça, personne ne pouvait les comprendre.

En réalité, ce qui passionne un gros pourcentage de ces jeunes martyrs chez leur maître, ce n’est pas sa compétence, pas sa carrière, même pas sa retraite, c’est plutôt… son « retrait ».

Ici et maintenant !

En son temps, le général nordiste Sheridan aurait déclaré : « Le seul bon Indien est un Indien mort. » Propos à la teneur discutable, mais que les collégiens ont naturellement adapté à leur condition pour estimer comme un seul (jeune) homme que « le seul bon professeur est un professeur absent » ! »

Extrait de : R. Milési. « Les cancres se déchaînent. »

Extra-muros par Raymond Milési

Fiche de Extra-muros

Titre : Extra-muros
Auteur : Raymond Milési
Date de parution : 1990
Editeur : Editions de l’Aurore

Sommaire de Extra-muros

  • La nuit du chat
  • Cinquante-cinquante
  • Le séjour de Radamanthe
  • Toc toc ouvrez-moi la porte
  • Au « bon vieux temps »
  • L’enfant, l’orange et la machine
  • Le fils est de retour
  • D = 5 (N – 18)
  • Le carnassier unijambiste
  • Extra-muros

Première page de La nuit du chat

« Sur le siège passager, ta serviette cahote. On entend s’entrechoquer les croquettes à l’arrière, dans leur boîte en carton. Les cahiers et les livres de classe, eux, poliment se taisent. Tu pilotes ton R4 avec la distraction d’un notable entre deux âges, emprisonnant un court instant dans les brumes de ton cerveau des tas de trucs et de machins qui s’évadent comme autant de bulles de savon pour crever à la surface de ton inconscient. C’est l’heure stupide entre toutes de rentrer chez soi pour corriger « au sabre » deux trois devoirs d’élèves plus ou moins bêtes, plus ou moins adultes en fait, serviles ou méprisants ou les deux à la fois – à combien de reprises, Dieu du ciel !, as-tu eu envie de te joindre à eux afin de conspuer ce jeune vieux aux trois quarts encravaté que tu deviens peu à peu –, de rafler un morceau de gruyère dans le frigo en attendant le dîner, te pencher sans grand espoir sur le programme-télé, les mots-croisés, la soirée de merde à envisager l’apothéose du lendemain. »

Extrait de : R. Milési. « Extra-muros. »

Chien bleu couronné par Raymond Milési

Fiche de Chien bleu couronné

Titre : Chien bleu couronné
Auteur : Raymond Milési
Date de parution : 1991
Editeur : Fleuve noir

Première page de Chien bleu couronné

« On s’était limité à deux équipes, par souci d’économie. Elles se relayaient toutes les six heures, depuis deux semaines du moins. C’était véritablement un travail harassant, même si l’intérêt en était pour l’essentiel partagé, et on avait déjà dû changer d’infirmière à plusieurs reprises. Le gros Verstraede se répéta qu’il avait suivi quatre ans d’études supplémentaires pour en arriver là ! A titre de consolation peut-être, il se dit que le manque de sommeil, tout compte fait, ne le gênait guère. 
Ayant parcouru d’un œil professionnel le rapport de son prédécesseur – rien à signaler : l’accélération se poursuivait sans incident –, il s’approcha à pas traînants du lit-cage où semblait dormir Estelle dans ses curieux vêtements du passé et prit le temps de vérifier une à une les minuscules électrodes ventouses qui hérissaient son crâne rasé. Il remit en place la perruque de cheveux bruns. Les narines de la jeune femme demeuraient pincées, ses lèvres immobiles et raidies, comme modelées autour d’une entaille dans un masque sans expression. Tout près, il percevait le discret sifflement de sa respiration régulière. Ici-bas, chacun souffrait d’un catarrhe chronique ; on s’y était fait ; on se faisait à tout à la longue. »

Extrait de : R. Milési. « Chien bleu couronné. »

Les pirates du temps par Raymond Milési

Fiche de Les pirates du temps

Titre : Les pirates du temps (Tome 3 sur 3 – Delcano)
Auteur : Raymond Milési
Date de parution : 2012
Editeur : Editions Armada

Première page de Les pirates du temps

«  PARDON MON BRAVE, pourriez-vous éviter de me marcher sur le pied droit ?

C’est l’un de mes préférés. »

Au cœur de la fournaise, le distrait tourne la tête et me consulte à la volée, les yeux baissés, étant de ces citoyens hors norme qui s’aligneraient sans mal pour la photo dans une équipe de basket. L’expression inchangée, il décolle sa sandale de ma bottine et continue de fendre la foule massée à l’orée du site. Tandis qu’une brise étonnamment fraîche me caresse pour s’estomper aussi vite, deux particuliers profitent de la brèche pour emboîter le pas de mon piéticide : un jeune type à l’œil dédaigneux et une épaisse matrone qui doit se hâter sans cesse afin de recoller au peloton.

À mon tour, je m’installe dans leur sillage, mon regard s’attardant sur la nuque de l’écraseur. Deux ou trois pouces au-dessus de la masse – y compris de la mienne – ce dernier offre à la lumière une chevelure luisante, tortillée en longues tresses d’un noir de corbeau qui lui dégoulinent sur les joues. »

Extrait de : R. Milési. « Les pirates du temps. »

Futur sans étoiles par Raymond Milési

Fiche de Futur sans étoiles

Titre : Futur sans étoiles (Tome 2 sur 3 – Delcano)
Auteur : Raymond Milési
Date de parution : 1997
Editeur : Editions Armada

Première page de Futur sans étoiles

« ENCORE UN COIN pourri ! décréta Ari Hoen Jeklund. J’aimerais mieux mourir ailleurs que d’avoir à vivre ici. »

Il cligna des yeux puis balaya du regard le sol ocre, parcouru de lézardes, d’où la ténacité des colons avait fait surgir l’arrogante Gisène. Avec l’aide de leurs esclaves à fourrure, rémunérés à coups de trique. En toussant sous l’agression immédiate d’un air sec et torride, il se décida enfin à poser le pied sur Altea.

À l’horizon, le gros homme aux cheveux en brosse distinguait les arêtes des constructions élevées, mirage solitaire de pierre et de verre à l’assaut du ciel. À peine descendu du ventre métallique de son cargo personnel, il tressaillit d’impatience à la pensée du marché qu’il allait conclure, au large de la cité. Très au large. Ses lèvres huileuses ébauchèrent un sourire gourmand. »

Extrait de : R. Milési. « Futur sans étoiles. »

Salut Delcano ! par Raymond Milési

Fiche de Salut Delcano !

Titre : Salut Delcano ! (Tome 1 sur 3 – Delcano)
Auteur : Raymond Milési
Date de parution : 1996
Editeur : Editions Armada

Première page de Salut Delcano !

«  Beauté bleue ! m’exclamé-je : vous êtes exactement le genre de pièce montée que je rêvais d’admirer ici ! »

De toute sa hauteur, l’élégante me gratifie d’un examen express, réussit à me toiser à peu près comme si j’étais une tête de poisson dans le caniveau, puis reprend son déhanchement à bonne allure. Fasciné, je m’installe dans son sillage.

À Wangtzi, tout le monde ou presque a la peau jaune et le geste effacé. Une lointaine origine terrienne asiatique, allez savoir ! Ma géante, elle, a la peau vif azur et l’insolence des femmes de Song. C’est dire si elle ne risque guère de passer inaperçue ! Moi non plus d’ailleurs, avec mon visage pâle et mon mètre quatre-vingts…

Deux bonnes têtes au-dessus des promeneurs, elle entaille la foule chamarrée de ses luxueuses foulées, attentive à esquiver les sébiles des mendiants. Je me frotte les mains : à peine réglé le parking de Lady Jane, cette figurante au jeu de jambes hors du commun m’offre sur un plateau la preuve que j’ai eu le nez creux de démarrer mon enquête par Longuevie. À ma connaissance – vaste, merci – les natifs de Song, ceux du peuple du moins, quittent rarement leur caillou. Sauf s’ils font partie de la suite du Daktar ! »

Extrait de : R. Milési. « Salut, Delcano !. »

Les 7 saisons du Malin par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de Les 7 saisons du Malin

Titre : Les 7 saisons du Malin
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 2000
Editeur : Imaginarium fantastique

Première page de Les 7 saisons du Malin

« Le visage de Nelly devint soudain pâle comme un linge, et elle dut s’accrocher au bras de son mari pour ne pas s’effondrer.

– Il… Il faut que j’aille aux toilettes…

– Ça ne va pas ? Tu veux que je t’accompagne ?

– Non… Merci… C’est juste un petit malaise… Je reviens dans un instant…

Tous les invités du docteur Lefort prirent une mine désolée en voyant la malheureuse Nelly Huysmans s’éloigner en titubant. Chacun se crut obligé de tenir des propos compatissants, et le maître de maison glissa à l’oreille de Franck Huysmans :

– Dis-moi, ce genre de trouble se produit souvent ? Tu devrais convaincre ta femme de consulter… Je peux te donner l’adresse d’un confrère qui…

– Ce n’est rien, je t’assure… Elle est en pleine forme…

– Elle n’en a pas l’air ! Bon sang, Nelly bosse dans un centre hospitalier, ça ne lui serait pas bien difficile de prendre rendez-vous pour…

– Ne t’inquiète pas… Dans un petit moment, il n’y paraîtra plus… »

Extrait de : J.C Chaumette. « Les sept saisons du Malin. »

Les rats de Hamelin par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de Les rats de Hamelin

Titre : Les rats de Hamelin
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 2019
Editeur : Evidence Editions

Première page de Les rats de Hamelin

« Eli s’assit devant le plan de travail de son laboratoire, face au terrarium, et sortit un petit sac en plastique de la poche de sa grosse chemise de bûcheron. Il lissa en arrière son épaisse tignasse hirsute, pour éviter que ses cheveux ne viennent pendouiller dans la coke qu’il venait d’étaler sur la plaque de verre lorsqu’il se pencherait pour sniffer son rail.
Tandis qu’il se redressait brusquement, tel un boxeur cueilli par un uppercut au menton, le visage d’Eli se retrouva juste en face de la paroi transparente du terrarium. De l’autre côté, un cafard tentait l’escalade de la falaise de plexiglas. Eli lui sourit et marmonna :
— Je vais devoir assurer… Souhaite-moi bonne chance, mec !
Le cafard glissa avant de chuter en arrière. Eli haussa les épaules, se leva et sortit du labo.
La salle de conférence était pleine à craquer, principalement grâce aux étudiants du MIT, le Massachusetts Institute of Technology, venus en masse soutenir leur idole. »

Extrait de : J.C Chaumette. « Les rats de Hamelin. »

Le niwaâd par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de Le niwaâd

Titre : Le niwaâd
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1997
Editeur : Editions Lokomodo

Première page de Le niwaâd

« Tout était couleur de boue à Tamlouk, dans le quartier des mangeurs de cochons, près du fleuve Yamouna : la terre battue des ruelles et le torchis des murs, le lisier qui ruisselait dans les caniveaux et l’eau turbide qui dégouttait des toits, les fumées ocres vomies des cheminées, et l’air, l’air acide aux teintes safranées, l’air si poisseux, si gluant de suie et si empesté d’âcres poisons que des pluies de cadavres d’oiseaux migrateurs s’abattaient parfois sur la ville géante dont la plupart des habitants n’avaient jamais vu le bleu du ciel.

Jamaal Abdul Okiwa et son escorte progressaient à grand peine au travers de la foule compacte qui grouillait autour d’eux. Tous ces gens acclamaient leur idole, scandaient son nom avec ferveur, et tentaient de toucher les pans de sa tunique. Lutteur d’exception, invaincu depuis plus de dix ans et cent-trente-huit combats, le colosse était un héros pour chaque citoyen de Tamlouk. Les mangeurs de cochons le vénéraient sans réserve, bien qu’il appartînt à une ethnie qui avait affronté leur peuple dans des luttes sanglantes lorsqu’ils étaient venus du Nord-Est pour s’établir sur les rives de la Yamouna, plusieurs générations auparavant. »

Extrait de : J.C Chaumette. « Le niwaad. »

Le maître des ombres par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de Le maître des ombres

Titre : Le maître des ombres
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 2012
Editeur : Evidence Editions

Première page de Le maître des ombres

« Le blindé des États Sanctifiés et Unis d’Amérique s’arrêta à proximité des décombres, et un de ses opercules d’acier pivota pour libérer le mini-drone qui s’éleva silencieusement, effectua un vol stationnaire au-dessus du véhicule, puis entama un quadrillage de surveillance, ses rétines artificielles en quête d’une présence humaine.
S’il avait repéré un individu armé n’émettant pas le code d’identification adéquat, il aurait immédiatement largué sa charge à fragmentation capable de supprimer toute cible non protégée dans un rayon de cent cinquante mètres. Mais les ruines du secteur G14 de la zone 29, province KE de la région Moyen-Orient sous occupation provisoire, étaient désertes.
Une trappe s’ouvrit entre les chenilles du blindé, et deux robots sur roues en sortirent, chacun se dirigeant à une extrémité de ce qui avait été autrefois la grande ziggourat de Tchoga Zanbil. Les caméras et le canon de 5,56 mm des petits engins téléguidés pivotèrent en tous sens, prêts à identifier et neutraliser la moindre menace qui aurait échappé aux capteurs du drone. À l’intérieur du char, les images filmées par les éclaireurs mécaniques s’affichaient sur une série d’écrans, soigneusement scrutés par un contrôleur. »

Extrait de : J.C Chaumette. « Le maître des ombres. »