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Jean-François les-bas-bleus par Charles Nodier

Fiche de Jean-François les-bas-bleus

Titre : Jean-François les-bas-bleus et autres contes
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1832
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Sommaire de Jean-François les-bas-bleus

  • Jean-François les-bas-bleus
  • Baptiste Montauban
  • Paul ou la ressemblance
  • Lidivine
  • La combe de l’homme mort
  • Les fiancés, nouvelle vénitienne

Première page de Jean-François les-bas-bleus

« Le fantastique est un peu passé de mode, et il n’y a pas de mal. L’imagination abuse trop facilement des ressources faciles ; et puis ne fait pas du bon fantastique qui veut. La première condition essentielle pour écrire une bonne histoire fantastique, ce serait d’y croire fermement, et personne ne croit à ce qu’il invente. Il arrive aussi bientôt qu’une combinaison d’effets trop arrangés, un jeu trop recherché de la pensée, un trait maladroitement spirituel, viennent trahir le sceptique dans le récit du conteur, et l’illusion s’évanouit. C’est le joueur de gobelets qui a laissé rouler ses muscades, ou le machiniste qui a laissé voir ses ficelles. Tout disparaît à la fois, comme derrière le rideau prosaïque et désenchanteur des ombres chinoises. Vous avez vu ce que vous ayez vu. Le nécromancien, dépouillé de sa barbe et de son bonnet pointu, se recommande à vos visites, si vous êtes content, et il ne vous y reprendra guère pour peu que vous soyez de mon goût, car il n’y a rien de plus sot qu’une illusion finie. Envoyez-lui vos connaissances. Voilà tout ce que vous lui devez. »

Extrait de : C. Nodier. « Jean-François-les-bas-bleus et autres Contes. »

Jean Sbogar par Charles Nodier

Fiche de Jean Sbogar

Titre : Jean Sbogar
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1818
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Première page de Jean Sbogar

« Un peu plus loin que le port de Trieste, en s’avançant sur les grèves de la mer, du côté de la baie verdoyante de Pirano, on trouve un petit ermitage, depuis longtemps abandonné, qui était autrefois sous l’invocation de saint André, et qui en a conservé le nom. Le rivage, qui va toujours en se rétrécissant vers cet endroit, où il semble se terminer entre le pied de la montagne et les flots de l’Adriatique, semble gagner en beauté à mesure qu’il perd en étendue ; un bosquet presque impénétrable de figuiers et de vignes sauvages, dont les fraîches vapeurs du golfe entretiennent le feuillage dans un état perpétuel de verdure et de jeunesse, entoure de toutes parts cette maison de recueillement et de mystère. Quand le crépuscule vient de s’éteindre, et que la face de la mer, légèrement ridée par le souffle serein de la nuit, commence à balancer l’image tremblante des étoiles, il est impossible d’exprimer tout ce qu’il y a d’enchantement dans le silence et le repos de cette solitude. »

Extrait de : C. Nodier. « Jean Sbogar. »

Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé par Charles Nodier

Fiche de Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé

Titre : Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1836
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Sommaire de Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé

  • Hurlubleu
  • Léviathan le long
  • Zerothoctro-Schah proto-mystagogue de Bactriane
  • Voyage pitoresque et industriel de Kaout’t’chouk dans le Paraguay-roux et la Palingénésie australe

Première page de Hurlubleu

« Grand Manifafa d’Hurlubière ou la Perfectibilité

– Que le diable vous emporte ! s’écria le Manifafa.
– Le grand loustic de votre sacré collège des mataquins en est-il ? dit Berniquet.
– Non, Berniquet, reprit Hurlubleu. Je parlais à cette canaille de rois et d’empereurs qui m’assassinent tous les soirs de leurs salamalecs, et qui usent à force de la caresser de vils baisers la semelle de mes augustes pantoufles. Je t’aime, Berniquet ; je t’aime, grand loustic du sacré collège des mataquins, parce que tu n’as pas le sens commun, et que tu ne manques point d’esprit sans qu’il y paraisse. Il faut même que j’aie fait une haute estime de ton mérite pour t’avoir conféré à la première vue une des plus éminentes dignités de mon empire, car je me souviens que tu tombas chez moi comme une bombe. »

Extrait de : C. Nodier. « Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé. »

Le reflux par Robert-Louis Stevenson

Fiche de Le reflux

Titre : Le reflux
Auteur : Robert-Louis Stevenson
Date de parution : 1894
Traduction : T. Varlet
Edition : Bibliothèque numérique romande

Première page de Le reflux

« Disséminés par tout le monde insulaire du Pacifique, des hommes appartenant aux diverses races européennes et à presque tous les rangs de la société, y portent leur activité et y propagent leurs maladies.
Quelques-uns réussissent, d’autres végètent. Ceux-là sont montés sur des trônes et ont possédé des îles et des flottes. Ceux-ci en sont réduits, pour vivre, à se marier : une dame au teint chocolat, épaisse et joviale luronne, entretient leur paresse ; et, vêtus en indigènes, mais gardant toujours quelque trait hétéroclite d’allure et de maintien, parfois même un dernier souvenir (voire un simple monocle) de l’officier et du gentleman, ils se carrent sous des vérandas en feuilles de palmier et font les délices d’un auditoire indigène avec des souvenirs de café-concert. Et il y en a aussi d’autres, moins souples, moins habiles, moins heureux, peut-être moins vils, qui persistent, jusque dans ces îles de cocagne, à manquer de pain. »

Extrait de : R.-L. Stevenson. « Le Reflux. »

Le naufrageur par Robert-Louis Stevenson

Fiche de Le naufrageur

Titre : Le naufrageur
Auteur : Robert-Louis Stevenson
Date de parution : 1906
Traduction : L. Zeys
Edition : Bibliothèque numérique romande

Première page de Le naufrageur

« C’était par un après-midi d’hiver, à Taiohaé, capitale française et port des îles Marquises ; il était environ trois heures. Le vent soufflait par rafales, et le ressac battait furieusement la grève. Le bâtiment de guerre, chargé de planter le drapeau de la France et d’établir son influence dans ces îles, était amarré au-dessous de Prison-Hill et tanguait fortement. Les nuages étaient si bas, qu’ils semblaient soutenus par les cimes environnantes. Durant toute la matinée, la pluie n’avait cessé de tomber, une de ces pluies des tropiques, véritables trombes d’eau par leur violence, et les flancs de la montagne portaient encore les traces du torrent qui les avait ravinés.
À l’exception du commandant, qui dirigeait momentanément les travaux des forçats occupés à un nouvel aménagement du jardin de la Résidence, toute la population semblait plongée dans une somnolence profonde.  »

Extrait de : R.-L. Stevenson. « Le Naufrageur.  »

Le cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde par Robert-Louis Stevenson

Fiche de Le cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde

Titre : Le cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde
Auteur : Robert-Louis Stevenson
Date de parution : 1886
Traduction : T. Varlet
Edition : Bibliothèque numérique romande

Sommaire de Le cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde

  • Le cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde
  • Un logement pour la nuit

Première page de Le cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde

« M. Utterson le notaire était un homme d’une mine renfrognée, qui ne s’éclairait jamais d’un sourire ; il était d’une conversation froide, chiche et embarrassée ; peu porté au sentiment ; et pourtant cet homme grand, maigre, décrépit et triste, plaisait à sa façon. Dans les réunions amicales, et quand le vin était à son goût, quelque chose d’éminemment bienveillant jaillissait de son regard ; quelque chose qui à la vérité ne se faisait jamais jour en paroles, mais qui s’exprimait non seulement, par ce muet symbole de la physionomie d’après-dîner, mais plus fréquemment et avec plus de force par les actes de sa vie. Austère envers lui-même, il buvait du gin quand il était seul pour réfréner son goût des bons crus ; et bien qu’il aimât le théâtre, il n’y avait pas mis les pieds depuis vingt ans. Mais il avait pour les autres une indulgence à toute épreuve ; et il s’émerveillait parfois, presque avec envie, de l’intensité de désir réclamée par leurs dérèglements ; et en dernier ressort, inclinait à les secourir plutôt qu’à les blâmer. « Je penche vers l’hérésie des caïnites, lui arrivait-il de dire pédamment. Je laisse mes frères aller au diable à leur propre façon. »

Extrait de : R.-L. Stevenson. « Le Cas étrange du Dr Jekyll et de M. Hyde . »

Le soleil enseveli par Noëlle Roger

Fiche de Le soleil enseveli

Titre : Le soleil enseveli
Auteur : Noëlle Roger
Date de parution : 1928
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Première page de Le soleil enseveli

« — Il faut que vous notiez ces choses, Saint-Gildas, dit tout à coup Étienne Kerluce.

Ces mots se frayèrent lentement un passage à travers la stupeur qui engourdissait mon esprit, l’atteignirent enfin. C’était la première parole que prononçait Kerluce depuis que le cri de la vigie nous avait jetés à bâbord, courbés sur la rambarde, les yeux rivés à la longue découpure bleue plaquée contre le ciel : un îlot, c’était un pauvre îlot que nous cherchions, une étroite tête rocheuse émergée au sein du désert océanique, entrevu lors d’une croisière, une année auparavant. Et voici qu’à cette même place une terre immense apparaissait…

De minute en minute elle s’affirmait, basse, allongée, portant à son extrémité orientale le haut triangle aigu d’une montagne effilée dans l’azur. »

Extrait de : N. Roger. « Le Soleil enseveli. »

Le nouveau Lazare par Noëlle Roger

Fiche de Le nouveau Lazare

Titre : Le nouveau Lazare
Auteur : Noëlle Roger
Date de parution : 1935
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Première page de Le nouveau Lazare

« Le professeur Folaillon, de l’Institut de France, achevait enfin sa communication sur les organes respiratoires de l’algue des rochers. Autour de la longue table académique, ses collègues qui dodelinaient leur tête blanche ou grise se réveillèrent pour écouter les remerciements d’usage.

La lumière parcimonieuse d’un maussade après-midi de mars grisaillait ces fronts augustes, et le biologiste Théodore Lumagne songea qu’ils se ressemblaient à la fois par les stigmates de l’âge et par cette noblesse que la vie de l’esprit confère à ses adeptes.

Le secrétaire perpétuel reprit la parole :

— Messieurs, il me reste une communication quelque peu étrange, que son auteur, mort il y a près de deux siècles, m’a chargé de vous présenter. »

Extrait de : N. Roger. « Le nouveau Lazare. »

Le nouveau déluge par Noëlle Roger

Fiche de Le nouveau déluge

Titre : Le nouveau déluge
Auteur : Noëlle Roger
Date de parution : 1922
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Première page de Le nouveau déluge

« M. François de Miramar se leva. Sa silhouette prématurément voûtée domina la table où les cristaux étincelaient parmi les roses du Bengale. Dans la lumière oblique tombant des hautes fenêtres, ses cheveux miroitèrent autour de son front comme une couronne d’argent.

Les rires et les voix s’éteignirent soudain. Mme Andelot, penchée sur la petite fille et le petit garçon qui venaient d’entrer pour le dessert, leur imposa doucement silence en leur distribuant des bonbons.

M. de Miramar ne se décidait point à parler. Il regardait tour à tour les convives attentifs : sa femme qui lui souriait, ses deux filles, son fils Hubert, son frère le docteur Charles-Henri de Miramar, son hôte étranger, le jeune docteur Jean Lavorel, et Max Dainville, le fiancé d’Eva. »

Extrait de : N. Roger. « Le nouveau Déluge. »

Le livre qui fait mourir par Noëlle Roger

Fiche de Le livre qui fait mourir

Titre : Le livre qui fait mourir
Auteur : Noëlle Roger
Date de parution : 1927
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Première page de Le livre qui fait mourir

«  Pardonnez, chère maman, mais vous ne me verrez pas à Paris le 1er avril. Je ne m’embarquerai pas sur la France-Orient qui part demain. Tout est prêt. Les formalités sont remplies. J’ai reçu du ministère l’autorisation bien en règle, un congé de trois mois pour raison de santé. (Rassurez-vous, ma santé ne va pas trop mal, un peu de fièvre chaque soir, et voilà tout.) Et cependant… »

La plume me tombe des mains. Comment dire à ma mère : Et cependant, je ne pars pas… je ne puis me résoudre à partir. Trouver des raisons plausibles à une décision formulée en moi sans raisons… expliquer ces volontés obscures qui nous dirigent à notre insu… Je n’ai plus envie de partir, voilà tout. Puis-je dire à ma mère qui m’attend : ce pays me retient ? ce pays dont on n’épuisera jamais tout le mystère… un mystère qu’on pressent à chaque pas, et dont la seule approche travaille le plus ignorant voyageur comme un puissant sortilège. »

Extrait de : N. Roger. « Le Livre qui fait mourir. »