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Michelle et Barack par F. Colin

Fiche de Michelle et Barack

Titre : Michelle et Barack
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2021
Editeur : Albin Michel

Première page de Michelle et Barack

« Ils dansaient enlacés, à présent, flottant, lents et parfaits, au-dessus de la piste circulaire du Walter E. Washington Convention Center, et il chuchotait des secrets à son oreille tandis que, dans les yeux des spectateurs, mille larmes brillaient comme autant d’étoiles. C’était le soir du 20 janvier 2009, on célébrait l’investiture du nouveau président des États-Unis.
Debout sur une estrade au milieu du public, Beyoncé Knowles avait entamé les couplets inauguraux de At last, une chanson de blues écrite en 1941 sur laquelle Michelle et Barack Obama avaient ouvert le bal de leur mariage1. « I found a dream that I could speak to / A dream that I can call my own. » At last, « enfin » : cela sonnait comme un soupir, une exclamation, l’expression d’une joie incrédule. Mais enfin quoi ? Un chef d’État afro-américain démocratiquement élu à la tête de la première puissance mondiale – un bouleversement encore impensable quelques années auparavant ? Ou, mieux : l’avènement, après des siècles de combat et de souffrance, d’un monde juste et égalitaire ? Il était tôt, bien trop tôt pour affirmer que ce monde adviendrait avant longtemps ; au moins, désormais, était-il permis d’espérer. »

Extrait de : F. Colin. « Michelle et Barack. »

Magnetic island par F. Colin

Fiche de Magnetic island

Titre : Magnetic island
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2017
Editeur : Albin Michel

Première page de Magnetic island

« Je vais mieux.
Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le docteur Archer, qui me suit depuis quelques semaines. Il prétend que ça s’entend au timbre de ma voix. Que mon attitude a changé. Je me tiens plus droit, affirme-t-il, mon regard est plus franc.
Il y a eu une rechute. Je m’en suis sorti. L’un dans l’autre, c’est bien ce que Jill, ma thérapeute, avait prédit.
Dehors, sur la pelouse fraîchement tondue de la clinique, Tom, l’infirmier au crâne bosselé, a posé un genou à terre. Curieux de savoir ce qu’il va sortir de son seau en fer – méfiants, aussi –, les wallabies s’approchent. Des pommes rouges, brillantes comme des boules de billard. Il leur en tend une et attend que les mâles les plus courageux consentent à s’approcher. Ce qu’ils font, par bonds légers. Ils se regardent ; on dirait qu’ils se défient. « Eh bien, vas-y, toi, puisque tu es si malin !  »

Extrait de : F. Colin. « Magnetic Island.  »

Les enfants de la lune par F. Colin

Fiche de Les enfants de la lune

Titre : Les enfants de la lune
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2001
Editeur : Mango

Première page de Les enfants de la lune

« Tout commença un matin d’hiver 1942. J’avais treize ans cette année-là. Nous vivions seuls, mémé Yvonne et moi, dans un petit trois-pièces de l’île Saint-Louis, presque en face de la vieille église.

Le 23 décembre avait pris sa place sur l’éphéméride, et les jours s’en allaient comme des feuilles mortes. Les vacances commençaient, l’hiver s’était installé pour de bon. Je regardais au-dehors. La neige était tombée toute la nuit, et personne n’avait encore pris la peine de déblayer la rue Saint-Louis-en-l’Île. Rien de très étonnant à cela. Après tout, Paris était occupé depuis plus de deux ans et demi, et comme le répétait souvent mémé Yvonne, tout était devenu beaucoup plus compliqué depuis que les chars allemands étaient entrés dans Paris. Ça, j’étais bien placé pour le savoir : mémé était paralysée des deux jambes, clouée sur un fauteuil roulant, et pour tout ce qui concernait le monde extérieur, elle s’en remettait entièrement à moi. »

Extrait de : F. Colin. « Les enfants de la Lune. »

Le pays qui te ressemble par F. Colin

Fiche de Le pays qui te ressemble

Titre : Le pays qui te ressemble
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2015
Editeur : Albin Michel

Première page de Le pays qui te ressemble

« Chaque fois que, les mains crispées sur les accoudoirs, j’essayais de me caler dans le gargantuesque fauteuil en cuir de madame Lewandowski, de petites gouttes de sueur aigre venaient perler à mon front. Une chute interminable, voilà ce que je redoutais. J’avais l’impression que j’allais crever.
Ma psychologue était perplexe. « Si on tombe, avait-elle commenté le jour où je m’étais décidée à lui confier mes angoisses, c’est fatalement d’une certaine hauteur. Saurais-tu me dire d’où tu tombes, Lucy ? » Comme je n’en avais aucune idée, je m’étais contentée de produire un « Eh bien… » embarrassé ; à mon grand soulagement, nous ne nous étions pas appesanties.
Qu’est-ce que je fichais ici ? Dès la première séance, j’avais soupçonné que ces consultations ne me mèneraient nulle part. À la troisième, l’intuition s’était muée en certitude. Mais papa n’en démordait pas. « On arrêtera quand tu sauras quoi faire de ta tristesse », me répétait-il. À ce compte-là, il aurait pu tout aussi bien me conduire devant le mont Everest et me tendre une petite cuillère. « On arrêtera quand tu sauras quoi faire de cette montagne. » Parce que, bien sûr, c’était pour lui que je continuais. »

Extrait de : F. Colin. « Le pays qui te ressemble. »

Le mensonge du siècle par F. Colin

Fiche de Le mensonge du siècle

Titre : Le mensonge du siècle
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2004
Editeur : Mango

Première page de Le mensonge du siècle

« Salut ! Je m’appelle Jason Palomino, j’ai quatorze ans, et je suis le héros de ce livre. Mon éditeur m’a dit que j’étais censé me présenter dès la première page, alors voilà, c’est fait. Si vous voulez en savoir plus, une seule solution, vous farcir ces deux cent cinquante pages. Je sais, c’est dur. Et je vous entends déjà râler : Hé, Palomino ! Où est-ce que t’as été chercher que ton histoire pouvait nous intéresser ? La réponse est simple.

Ce n’est pas mon histoire.

C’est la vôtre.

Oui. Vous avez bien lu. Ce livre raconte un truc monumental qui s’est passé il y a peu de temps et qui concerne chacun de vous très personnellement. Le problème, c’est que vous avez complètement oublié. Bizarre, non ?

Rassurez-vous, vous allez vite comprendre.

Donc, je m’appelle Jason. Aujourd’hui, ce nom ne vous dit plus rien, et c’est tout à fait normal. »

Extrait de : F. Colin. « Le mensonge du siècle. »

La vie extraordinaire des gens ordinaires par F. Colin

Fiche de La vie extraordinaire des gens ordinaires

Titre : La vie extraordinaire des gens ordinaires
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2010
Editeur : Flammarion

Première page de La vie extraordinaire des gens ordinaires

« Depuis huit mois, passionnément, je me tenais à son chevet. Poète : ainsi l’avais-je baptisé, sentant, dès le premier regard, que rien, jamais, ne lui conviendrait mieux.

D’autres, peut-être, l’auraient affublé de qualificatifs plus clinquants, ou plus spectaculaires. Voyageur. Raconteur. Illuminé. La vérité, c’est qu’aucun mot ne lui aurait rendu plus honnête justice que celui-ci.

Aucun n’aurait su révéler mieux la trouble beauté de sa quête.


J’avais poussé un jour la porte de l’hôpital en me disant que le moment était venu de faire quelque chose pour mon prochain. J’étais entré en contact avec une association d’aide aux malades. J’avais signé des papiers, répondu à des questions, rempli un formulaire. Pour finir on m’avait conduit au salon. »

Extrait de : F. Colin. « La vie extraordinaire des gens ordinaires. »

La poupée de Kafka par F. Colin

Fiche de La poupée de Kafka

Titre : La poupée de Kafka
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2016
Editeur : Actes Sud

Première page de La poupée de Kafka

« Un soir de mai 2008, tandis qu’allongée à plat ventre sur la couchette du City Night Line en partance pour Berlin elle peinait à trouver le sommeil, Julie Spieler se figura soudain qu’elle avait découvert le chemin menant au cœur de son père.
Dehors, un orage épouvantable grondait et le train roulait avec une lenteur excessive, comme s’il hésitait à s’enfoncer plus avant dans les ténèbres. Écartant un pan du store, la jeune fille observa les éclairs qui, à perte de vue, illuminaient les forêts et les champs ; l’ébauche de son sourire tremblait sur la vitre perlée de pluie. Elle pressentait une rencontre, confusément, les contours d’un mystère. Oui, songeait-elle, il lui faudrait traverser une brume de mensonges aussi dense que cette nuit même et, probablement, elle se perdrait en chemin. »

Extrait de : F. Colin. « La poupée de Kafka. »

La mémoire du vautour par F. Colin

Fiche de La mémoire du vautour

Titre : La mémoire du vautour
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2007
Editeur : Au diable vauvert

Première page de La mémoire du vautour

« Cette nuit, j’ai rêvé que mon esprit explosait et que la déflagration libérait une énergie intense, un monde, un univers parfait. J’étais mort. J’étais mort, mais cela ne changeait rien. Une phrase d’Alan Watts tournoyait dans mon esprit : Et Dieu contempla la solidité de ses fondations, et Dieu se dit à lui-même : « Perds-toi. »

Je me suis réveillé en tremblant.

Il serait temps que je termine ce boulot. J’ai un manuel à boucler, et chaque jour apporte son lot d’informations déstabilisantes. Aujourd’hui par exemple, j’ai appris que les cendres du cadavre n’étaient pas de véritables cendres. Après la phase de chauffage et d’évaporation, le corps est réduit à ses éléments originaux – de petits fragments d’os destinés au broyage et, en dépit de ce qu’on pourrait penser, ce genre de processus ne coûte presque rien : combustion »

Extrait de : F. Colin. « La Mémoire du vautour. »

La fin du monde par F. Colin

Fiche de La fin du monde

Titre : La fin du monde
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2009
Editeur : Mango

Première page de La fin du monde

« Au moment où mon portable vibre en sonnant (un morceau de rock bluesy dont je n’ai jamais réussi à me rappeler le titre), je suis affalé sur la pelouse de Madrona Park à Seattle devant le lac Washington et la tête de Lauren est posée sur ma poitrine, ses cheveux en corolle sur mon T-shirt Sorry about what happens later, ce qui fait que j’hésite un moment à répondre – avant de voir le nom de mon père apparaître sur l’écran.

— Allô ?

Lauren s’est redressée. Avec un soupir, je m’assieds à mon tour. Devant nous, fragile dans les brumes, se détache la grandiose silhouette du mont Rainier qui, un de ces quatre, entrera sûrement en éruption et nous engloutira tous.

— Jim ? C’est papa.

— Hey ! Quoi de neuf en Palestine ?

— Je suis au Caire, en fait.

— Et ce n’est pas en Palestine ?

— Jim, as-tu des nouvelles de ta sœur ? »

Extrait de : F. Colin. « La fin du monde. »

Jenny par F. Colin

Fiche de Jenny

Titre : Jenny
Auteur : F. Colin
Date de parution : 2016
Editeur : Sonatine

Première page de Jenny

« Seul face aux vagues. Est-il possible d’être aussi seul ? Sombre, démonté, l’océan est comme le reflet de son âme.

5340 Studio Drive. Une maison de bardeaux bleus aux fenêtres closes. La nuit s’abat, rideau sur la scène, et on n’entend plus que cette colère du bout du monde.

Il est sorti sur la terrasse pour fumer, mais l’idée même d’allumer une cigarette est risible. Ses doigts se crispent sur le paquet, l’écrasent puis le lâchent ; le vent l’emporte en trois secousses.

Pour ce qu’il en sait, les deux maisons voisines sont inoccupées. C’est ce que lui a certifié la logeuse. Il espère que c’est vrai.

Des épingles chauffées à blanc percent la voûte du ciel, d’énormes nuages fulminent. Bientôt, il pleuvra du sang.

Il s’agrippe à la rambarde. Il ne dort plus, à présent, quelques minutes glanées ici et là, tel un marin qui ne serait pas sûr de revoir le rivage un jour.

Il se nourrit d’eau du robinet, reste éveillé grâce au Xanax. Effets secondaires ? Nervosité, épuisement, hallucinations, cauchemars. Cauchemars, oui. S’il reste de la place.

De mystérieux oiseaux blancs rasent les vagues avant de s’évanouir dans la nuit californienne. Il aimerait que les tremblements cessent. »

Extrait de : F. Colin. « Jenny. »