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Les croix en feu par Pierre Pelot

Fiche de Les croix en feu

Titre : Les croix en feu
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1992
Editeur : L’atalante

Première page de Les croix en feu

« Un clou rouillé et tordu retenait encore la planche au tronc de l’arbre. Sur le morceau de bois rongé par les vers on pouvait lire, en grosses lettres peintes au pochoir :
 
Canetown
300 habitants

Le reste, en admettant qu’il y en eût un, était parti avec la seconde planche de la pancarte.
Scébanja descendit de cheval. Avec un coin de son foulard rouge, il essuya la sueur qui lui perlait au front, et poussa un long soupir. Un moment, il contempla l’inscription sur la planche, un demi-sourire sur ses lèvres épaisses, puis son regard erra sur les alentours. Il ne voyait pas encore la ville mais pouvait déjà la deviner derrière le gros boqueteau, au bout de la piste, bien assise comme toujours dans le creux des collines. »

Extrait de : P. Pelot. « Les croix en feu. »

Haute-école par Sylvie Denis

Fiche de Haute-école

Titre : Haute-école
Auteur : Sylvie Denis
Date de parution : 2004
Editeur : L’Atalante

Première page de Haute-école

« Hérus Tork avait toujours attendu la mort de Mérot l’Ancien.

Cela datait du jour même de son arrivée à la Haute-École. Le directeur était venu jeter un coup d’œil aux nouveaux, envoyés par leurs parents à peine célébré leur sixième anniversaire. Levé à l’aube, il s’était lavé à l’eau froide et avait avalé un petit-déjeuner loin d’être succulent, mais copieux. Puis il s’était mis en rang avec une douzaine de nouvelles recrues dans une des innombrables cours des multiples bâtiments qui jouxtaient le château. Ses futurs compagnons étaient des fils d’apothicaires et de maçons, de bouchers et de cultivateurs. Pas de filles. Les filles fréquentaient une autre école, celle de Sopok, sur les rives de la mer d’Avole, dans le Premier Quadrant.

Mérot était un homme de haute taille, aussi musclé et large d’épaules que certains Chasseurs. Ayant effectué plusieurs allers- retours devant les gamins, il s’arrêta devant Hérus Tork et demanda au Chasseur qui s’occupait d’eux depuis leur arrivée où il avait trouvé cet avorton. »

Extrait de : S. Denis. « Haute-Ecole. »

L’empire du sommeil par Sylvie Denis

Fiche de L’empire du sommeil

Titre : L’empire du sommeil (Tome 2 sur 2 – La saison des singes)
Auteur : Sylvie Denis
Date de parution : 2012
Editeur : L’Atalante

Première page de L’empire du sommeil

« Au commencement, rien n’était écrit.
Rien n’allait de soi.
Personne ne savait – car il n’y avait ni personnes ni savoir – qu’une espèce de singes accéderait à la conscience, encore moins qu’elle développerait suffisamment d’intelligence pour maîtriser son environnement.
Qui aurait pu prévoir que ces bestioles-là, entre toutes, survivraient aux maladies, au froid, à la sécheresse, à la faim, aux prédateurs ?
Parce que les animaux, dans notre univers, ça va ça vient. Ça apparaît et ça disparaît en masse. Ça se reproduit, ça mange tout ce que ça trouve jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien. Ça veut vivre et ça ne sait pas. Ça fait, logique, bêtise sur bêtise. Ça ne sait pas, mais ça veut comprendre, alors ça invente. Et ça invente encore et encore. Et ça croit à ce que ça a inventé.
Car au commencement il n’y avait rien.
Rien n’allait de soi. Rien n’était donné à personne. »

Extrait de : S. Denis. « L’Empire du sommeil – La saison des singes. »

La saison des singes par Sylvie Denis

Fiche de La saison des singes

Titre : La saison des singes (Tome 1 sur 2 – La saison des singes)
Auteur : Sylvie Denis
Date de parution : 2007
Editeur : L’Atalante

Première page de La saison des singes

« Dans cet espace-temps, il y a…
Des étoiles et des singes.
Des singes et des étoiles.
Par milliards.

Les étoiles soumises aux lois de la physique se sont rassemblées en galaxie spirale. Obéissant à celles de l’évolution, un unique phylum de singes a accédé à la conscience. Et après des milliers d’années de tâtonnements, d’erreurs et d’errances, la civilisation des singes conscients et connaissants, scientifiques et techniques, bâtisseurs et artistes a englouti leur planète, s’est étendue à leur système et l’a quitté.

Il y a quelques centaines d’années, ils ont enfin vu de leurs propres yeux que leur système solaire n’est qu’un parmi d’autres. Ils ont vraiment compris que la Galaxie n’est qu’une spirale commune appartenant à un petit groupe, lui-même insignifiant au sein de l’amas local, qui n’est franchement qu’une chiure d’acarien perdue dans le super-amas.

Les singes ont étudié et compris le fonctionnement du vivant. Ils ont rédigé la Charte des hommes libres et singuliers. Certains se sont modifiés, comme ils disent. Mieux : ils ont mis les modifications à ­disposition des signataires de la Charte. Qui les ont adoptées. Ou pas. »

Extrait de : S. Denis. « La Saison des singes – La saison des singes. »

La mort en guenilles par G. J. Arnaud

Fiche de La mort en guenilles

Titre : La mort en guenilles (Tome 6 sur 6 – Hyacinthe et Narcisse)
Auteur : G. J. Arnaud
Date de parution : 2000
Editeur : L’Atalante

Première page de La mort en guenilles

« On appelait ce déluge des giboulées de printemps mais c’était une pluie glacée qui tombait sur ce quartier de l’Est parisien où le petit Savoyard Vincent Pergotti cherchait l’impasse Saint-Sabin, un cul-de-sac pas aisé à trouver, lui avait-on dit dans l’estaminet où il avait demandé son chemin. Son sac pesait lourd à son épaule avec son hérisson, ses raclettes. On lui avait assuré que c’était une grande cheminée à l’ancienne qui l’attendait et non un de ces conduits modernes terminés sur le toit par des mitres en poterie ne permettant pas de sortir à l’air libre pour respirer un bon coup et se rincer les poumons. On lui avait promis cinq francs à condition que le travail soit effectué avec le plus grand soin, à la raclette principalement. Oui, mais à six heures du soir en mars il commençait de faire nuit et Vincent avait emporté des rats-de-cave pour s’éclairer. Il les avait volés à son maître ramoneur Jéricho le Merlous. »

Extrait de : G. J. Arnaud. « La mort en guenilles – Hyacinthe et Narcisse. »

Le voleur de tête par G. J. Arnaud

Fiche de Le voleur de tête

Titre : Le voleur de tête (Tome 5 sur 6 – Hyacinthe et Narcisse)
Auteur : G. J. Arnaud
Date de parution : 2000
Editeur : L’Atalante

Première page de Le voleur de tête

« PLACE DE GRÈVE, une dizaine de personnes attendaient sous la pluie, doutant que l’exécution eût lieu par un temps pareil. Le calme de l’endroit ajoutait à leur perplexité lorsqu’un grand fourgon tiré par deux percherons arriva. Quatre hommes robustes en bourgerons noirs, debout sur les marche-pieds, en sautèrent, ouvrirent les deux portes arrière. Ils en tirèrent de lourds madriers, des planches.

— Voilà les hussards de la Veuve, lança le marchand de vin chaud qui désespérait de faire des affaires ce matin-là de novembre, par un temps aussi humide qui découragerait plus d’un badaud. Par « hussards de la Veuve » il désignait à la fois les aides du bourreau et la sinistre machine qu’ils allaient dresser, la guillotine.

Un marchand de parapluies en papier huilé essayait de vendre sa marchandise accrochée par les dragonnes à ses bras, mais le petit groupe humain immobile sur la place lui arrachait des grimaces. »

Extrait de : G. J. Arnaud. « Le voleur de tête – Hyacinthe et Narcisse. »

Le Prince des ténèbres par G. J. Arnaud

Fiche de Le Prince des ténèbres

Titre : Le Prince des ténèbres (Tome 4 sur 6 – Hyacinthe et Narcisse)
Auteur : G. J. Arnaud
Date de parution : 1999
Editeur : L’Atalante

Première page de Le Prince des ténèbres

« Avec un flair extraordinaire d’enfant des rues, Séraphine, saute-ruisseau chez les frères Roquebère, avoués rue Vivienne, fut convaincue, dès la publication des ordonnances contre la liberté de la presse dans Le Moniteur du 26 juillet 1830, que Paris et peut-être la France entière allaient connaître des événements révolutionnaires. Malgré son jeune âge, tout juste quinze ans, la flamme de l’insurrection s’empara de son corps et de son esprit. Elle vibrait d’impatience retenue, voulait rejoindre les faubourgs où levait comme un pain noir la colère populaire, elle voulait marcher et crier avec les défenseurs de la liberté, s’imaginait portant à bout de bras le drapeau tricolore. Elle parvint à se maîtriser, continua de livrer les placets et les exploits, mais à la nuit elle disparut.

Il régnait une grande agitation porte Saint-Denis et le drapeau blanc, accroché à l’arc de la porte, avait été remplacé par le drapeau tricolore. »

Extrait de : G. J. Arnaud. « Le prince des ténèbres – Hyacinthe et Narcisse. »

La congrégation des assassins par G. J. Arnaud

Fiche de La congrégation des assassins

Titre : La congrégation des assassins (Tome 3 sur 6 – Hyacinthe et Narcisse)
Auteur : G. J. Arnaud
Date de parution : 1999
Editeur : L’Atalante

Première page de La congrégation des assassins

« Les fortes pluies de la fin mars avaient provoqué de graves inondations dans la région de Sens, et les diligences et voitures de poste se trouvèrent immobilisées à la tombée de la nuit dans un relais en pleine campagne. Comme l’expliqua le maître de poste, il était possible de continuer sa route mais mieux valait attendre le jour que prendre le risque de verser et de se noyer.

Faisant contre fortune bon cœur, un Parisien, M. Danancier, certain d’avoir un bon lit dans un cabinet étroit, certes, mais où il dormirait seul, commanda un souper fin qu’il attendit en lisant les quelques journaux mis à sa disposition.

Peu après il lia connaissance avec son voisin de table, un certain Mirabel, voyageur de commerce qui vendait des almanachs, des écritoires, des plumes en fer et toutes sortes de marchandises contenues dans deux portemanteaux de bonne taille qui pour l’heure se trouvaient dans la salle d’auberge. »

Extrait de : G. J. Arnaud. « La congregation des assassins – Hyacinthe et Narcisse. »

Le rat de la Conciergerie par G. J. Arnaud

Fiche de Le rat de la Conciergerie

Titre : Le rat de la Conciergerie (Tome 2 sur 6 – Hyacinthe et Narcisse)
Auteur : G. J. Arnaud
Date de parution : 1998
Editeur : L’Atalante

Première page de Le rat de la Conciergerie

« Malgré le froid et la neige de cet hiver mémorable de 1830, le vieux Gaston Lamercie se fit transporter en fiacre jusqu’à la Salpêtrière où son vieil ami Horace Kellman se trouvait hospitalisé depuis l’automne pour une vilaine affaire de gangrène qui refusait de guérir. On lui avait coupé les orteils pour commencer, puis le pied gauche, et le mal gagnait toujours les parties hautes de son corps d’octogénaire.

L’ancien clerc d’avoué parcourut non sans frémir les immenses couloirs glacés et puants avant d’atteindre la salle où son vieil ami, désormais couché, partageait avec quarante autres malades les affres de la souffrance.

— Mon brave Gaston, murmura l’alité, te voilà avec ce froid, cette neige… Comment as-tu fait pour venir de Notre-Dame-de-Nazareth jusqu’ici ? Cela représente une belle trotte. »

Extrait de : G. J. Arnaud. « Le Rat de la Conciergerie – Hyacinthe et Narcisse. »

L’homme au fiacre par G. J. Arnaud

Fiche de L’homme au fiacre

Titre : L’homme au fiacre (Tome 1 sur 6 – Hyacinthe et Narcisse)
Auteur : G. J. Arnaud
Date de parution : 1998
Editeur : L’Atalante

Première page de L’homme au fiacre

« En cette fin de l’année 1829, une pluie mêlée de neige tombait sur Paris. Marchant en direction des grilles de L’Observatoire, un homme, plié en deux sous le poids d’une grosse caisse attachée à ses épaules, frottait ses mains pincées par le froid tout en se réjouissant sans retenue de ce qui l’attendait un peu plus loin. Une vieille matelassière qui rentrait chez elle en poussant sa machine s’arrêta pour se signer à la vue de l’individu et grommela, à l’abri de son capuchon, quelque chose comme « pauvres
chérubins ».

L’homme à la caisse continua en direction de la porte de Fontainebleau, fit bientôt un détour dans un chemin boueux qui le conduisit à une masure en torchis, consolidée de planches goudronnées jusqu’à hauteur de l’étage. C’était l’estaminet de la mère Bachelin, où, le vendredi soir, on trouvait non seulement de la soupe au lard et du boudin grillé mais le punch offert par la veuve à ses habitués. Lui n’aimait que le vin. »

Extrait de : G. J. Arnaud. « L’homme au fiacre – Hyacinthe et Narcisse. »