Étiquette : livre

 

La légion écarlate par Johan Heliot

Fiche de La légion écarlate

Titre : La légion écarlate
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2007
Editeur : Mango

Première page de La légion écarlate

« Le vent hurlait comme un démon en colère. La mer était entrée dans une rage folle. Les vagues projetaient nos navires vers le ciel avant de les laisser basculer dans des creux si profonds qu’ils semblaient conduire tout droit au royaume de Neptune. Les galères à pont triple n’étaient pas adaptées à la navigation en haute mer. Si Rome avait pu, grâce à elles, conquérir les rivages de la Méditerranée, les marins se contentaient de suivre le tracé des côtes. Ils ne s’aventuraient pas en haute mer. Affronter une tempête dans des eaux inconnues et trop éloignées du cœur de l’Empire pour en espérer secours relevait de la folie. Malgré les panneaux de bois refermés sur les sabords, les hommes avaient dû s’attacher à leur banc pour ne pas être emportés par les embruns. Le mât principal de notre navire avait cédé dans un craquement sinistre et fauché plusieurs rangées de rameurs en s’abattant sur le pont supérieur. »

Extrait de : J. Heliot. « La légion écarlate. »

La harpe des étoiles par Johan Heliot

Fiche de La harpe des étoiles

Titre : La harpe des étoiles
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2003
Editeur : Editions Imaginaires sans frontières

Première page de La harpe des étoiles

« Comme Teer-Elben pénétrait dans le hall du spatioport, le Masque fendit la foule et s’approcha jusqu’à une distance respectueuse. Le Nomade ne prit pas garde à la créature anonyme qui s’accrochait à ses pas, évoluant dans son sillage à mesure qu’il glissait, souple et élégant, à la surface de la marée néo-humaine. Teer-Elben dominait de deux têtes les autres néos grouillant autour des guichets d’embarquement ; sa face émaciée, son regard fiévreux et sa peau mate étaient des repères faciles à suivre pour le Masque.
Teer-Elben s’arrêta un instant devant l’immense panneau qui signalait les prochains départs des navires commerciaux. Il n’était pas arrivé sur Epcidar depuis cinq minutes qu’il cherchait déjà le moyen d’en partir, sélectionnant avec soin les destinations possibles dans la longue énumération qui défilait sur l’écran. Des vaisseaux en provenance de tout l’Arc transitaient par Epcidar, aussi le Nomade n’avait-il que l’embarras du choix. Il pointa un index effilé sur les logos d’une série de planètes, enregistrant les données fournies par le panneau dans sa mémoire additionnelle, puis tourna les talons. »

Extrait de : J. Heliot. « La Harpe des etoiles. »

La fureur des siècles par Johan Heliot

Fiche de La fureur des siècles

Titre : La fureur des siècles
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2022
Editeur : Editions Critic

Première page de La fureur des siècles

« Ils étaient trois compagnons, engagés sur un chemin d’horreurs et d’abjections comme d’autres en religion. Ils avaient pour nom Kostas, Le Turc et Malamorte. D’eux, nul ne devait attendre la pitié ou le pardon. Mercenaires au service d’un condottiere, ils étaient payés sur le pillage et demeuraient fidèles autant que le chien dont on remplit la gamelle – pas plus, mais pas moins.

Ceci est leur histoire, celle aussi d’un siècle tourmenté, le quinzième pour certains, quattrocento pour d’autres, selon qu’on se situe au nord ou bien au sud du massif des Alpes. Quant à celui qui vous la narre, longtemps après les faits, fiez-vous à sa mémoire, lecteurs de cette chronique, car jamais son infaillibilité n’a été prise en défaut ; et si le grand âge a abîmé sa vue, amoindri son ouïe, ralenti ses gestes ou encore arc-bouté son dos, il lui a fait grâce de préserver intacts jusqu’aux moindres de ses souvenirs.

Cependant, parmi ceux-ci, beaucoup vous paraîtront surprenants, fantaisistes, le fruit d’une imagination fertile, sinon de la démence sénile. Surtout n’en croyez rien. Bientôt centenaire, l’auteur de ces lignes n’appartient pas à la race des affabulateurs, ni à celle des poètes. »

Extrait de : J. Heliot. « La Fureur des Siècles. »

La dernière sorcière par Johan Heliot

Fiche de La dernière sorcière

Titre : La dernière sorcière
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2020
Editeur : Fleurus

Première page de La dernière sorcière

« Ils surgirent au milieu de la nuit, en armure et montés sur des chevaux de guerre. Les claquements des sabots sur le pavé de la rue tirèrent Anya du sommeil, l’arrachant à un rêve paisible. Et lorsqu’ils frappèrent violemment à la porte, la jeune fille prit peur. On ne réveille pas les gens de cette manière pour leur apporter de bonnes nouvelles !

La mère d’Anya se glissa dans la mansarde qui lui servait de chambre, sous la pente inclinée du toit. L’index plaqué sur les lèvres, Elmira chuchota :

– Pas un mot, ma chérie. Surtout, ne fais aucun bruit.

Elle n’avait pas allumé de chandelle. Seule la lueur d’une pleine lune roussie éclairait sa silhouette à travers les carreaux de la fenêtre. Anya distinguait mal son visage. Mais elle devinait sans peine l’inquiétude, et même l’angoisse, qui crispait les traits d’ordinaire si doux d’Elmira.

– Le moment est arrivé, souffla cette dernière. Il faut nous séparer.

Anya étouffa un gémissement. Elle redoutait d’entendre ces mots depuis plusieurs saisons. »

Extrait de : J. Heliot. « La dernière sorcière. »

La couleur de la faim par Johan Heliot

Fiche de La couleur de la faim

Titre : La couleur de la faim
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2006
Editeur : Editions Octobre

Première page de La couleur de la faim

« — Je prétends, pour ma part, qu’une amitié virile vaut mieux qu’une amourette avec la première garce venue.
— Cette position t’honore, l’ami, fit Morcaï Treznor. Mais elle n’est pas de celles que j’aime pratiquer. Alors dégage.
La créature à la peau blanche et aux longs cheveux couleur d’or coula un regard entendu sur ses voisins de table. Morcaï piocha une aile de volaille dans la platée collective et mordit à pleines dents dans la chair rôtie. Un filet de jus et de salive dégoulina dans les poils de sa barbe. Il était arrivé trop tard pour occuper une autre place que celle-ci, la faute au mal qui lui rongeait les tripes et l’avait obligé à une longue halte dans un déféquoir public, à sa descente de la diligence. Les cahots du voyage n’avaient pas arrangé l’état de ses intestins. Comble de malchance, l’auberge, à l’instar des rues de Perdition, semblait prise d’assaut par tout ce que le pays comptait d’emmerdeurs patentés, toutes races confondues. »

Extrait de : J. Heliot. « La couleur de la faim. »

Johan Heliot vous présente ses hommages par Johan Heliot

Fiche de Johan Heliot vous présente ses hommages

Titre : Johan Heliot vous présente ses hommages
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2013
Editeur : Les moutons électriques

Sommaire de Johan Heliot vous présente ses hommages

  • Au plus élevé trône du monde…
  • Pax Bonapartia
  • Paris avant l’orage
  • La véritable toute première affaire
  • Trouver son coeur et tuer la bête
  • Monsieur Mouche et la grande demoiselle
  • Le robot du devoir
  • Le rêve d’Amerigo Vespucci
  • Le souffle du destin
  • Une étude au rouge
  • Idylle du temps des ombres
  • La chose dans la glace
  • La nuit du Grand Duc
  • Opération Münchhausen
  • Vous rêvez trop de Fantômas
  • Toujours plus, toujours !
  • L’huile et le feu
  • La musique des âmes
  • A la Bastille, gabba gabba hey !
  • Faërie Boots

Première page de Au plus élevé trône du monde…

« S’éveillant, Charles de Batz-Castelmore fut étonné de ne pas être mort. Il se souvenait pourtant qu’on l’avait tué tout net. Une balle hollandaise lui avait percé le front devant les murailles de Maastricht, alors qu’il s’apprêtait à donner l’assaut – un de plus, le dernier.

Le capitaine-lieutenant des Mousquetaires du Roi n’avait pas le moindre doute sur l’effet immédiat et, le croyait-il jusqu’à cet instant, irrémédiable, de la mesure de plomb chaud présentement logée sous son crâne, dans la masse grise et spongieuse où se tenait tapie sa conscience s’il en fallait croire monsieur Descartes, dont il avait fréquenté les écrits à ses (rares) temps perdus.
Conséquemment, le comte d’Artagnan s’écria :
« Je pense que je ne suis plus !
— Une erreur légitime, car c’était encore la vérité il y a peu », lui répondit une voix qu’il connaissait bien. »

Extrait de : J. Heliot. « Johan Heliot vous présente ses hommages. »

Involution par Johan Heliot

Fiche de Involution

Titre : Involution
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2014
Editeur : J’ai lu

Première page de Involution

« Vincent n’avait pas imaginé à quel point la chaleur et l’humidité peuvent porter sur les nerfs quand elles s’allient pour harasser le voyageur tout frais débarqué d’Europe du Nord. Pourtant, Sebastian l’avait mis en garde dans son dernier mail : Attends-toi à un choc, mon pâle et frêle ami habitué aux frimas !

Vincent avait souri, certain que son correspondant exagérait dans une sorte de réflexe chauvin destiné à mettre en avant les ressources naturelles de son pays – du moins les plus évidentes d’entre elles.

Mais il se heurte à un véritable mur de moiteur en sortant du terminal climatisé de Guarulhos, le gigantesque aéroport international implanté dans la banlieue nord-est de São Paulo. À peine a-t-il fait trois pas sous le soleil implacable que le dos de sa chemisette lui colle à la peau et que des auréoles sombres s’épanouissent sous ses aisselles. »

Extrait de : J. Heliot. « Involution. »

Guerre & peur par Johan Heliot

Fiche de Guerre & peur

Titre : Guerre & peur
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2023
Editeur : Mnémos

Première page de Guerre & peur

« Tout a commencé avec la peur, au début du mois de juin 1924, dans la terrible chaleur d’un printemps d’Europe méridionale.

Le soleil plombait les Balkans. La guerre allait bientôt entrer dans sa dixième année. Et ceux de la classe 24 connaître leur baptême du feu.

J’avais dix-neuf ans, vingt sous peu. Mais je n’étais pas certain de fêter mon prochain anniversaire. Un mois plus tôt, seulement, j’avais quitté les miens et des études de lettres qui ne mèneraient à rien tant que le conflit ne prendrait pas fin.

Après trois semaines d’une formation sommaire au maniement du fusil Lebel et des grenades à main, les gars de mon bataillon ont été expédiés par wagons jusqu’aux abords du front Sud, où les troupes austro-allemandes, complétées d’effectifs bulgares et ottomans, en faisaient baver à celles de la coalition.

On était encore tous fiers et beaux dans le bleu horizon impeccable de nos uniformes, persuadés de se battre pour une cause qui en valait la peine. »

Extrait de : J. Heliot. « Guerre et Peur. »

Führer prime time par Johan Heliot

Fiche de Führer prime time

Titre : Führer prime time
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2005
Editeur : Editions du Rocher

Première page de Führer prime time

« — La guerre mondiale, ouais, le génocide du peuple juif, tout ça, c’est pas vraiment cool, mec. J’veux dire, ils t’avaient rien fait, ces types, non ? Alors…

Une salve d’applaudissements éclate dans le studio, pour refluer comme clignote le panneau « SILENCE » suspendu dans les cintres. Shakira Miuy adresse un clin d’œil au gras quadragénaire à rouflaquettes qui vient de s’exprimer. Puis elle se tourne vers son contradicteur, un petit homme maigre, bien installé dans la cinquantaine et dont les joues creuses palpitent sous l’effet de la tension nerveuse.

— Eh bien, qu’avez-vous à répondre à Elvis ? La voix du bon sens, non ?

— Écoutez, se défend le petit homme, c’était une autre époque… Bon sang, ça va bientôt faire cent ans ! Et je ne peux même pas être sûr que j’y étais, que c’était vraiment moi !

Les huées du public l’interrompent. Il lève sur les premiers rangs un regard noir – aussitôt capté par une dronecam, diffusé en gros plan sur les milliards de récepteurs branchés partout sur la planète. L’effet produit par ces yeux-là, froncés sur la poitrine d’une Lolita moulée dans un TV-shirt, doit être doublement impressionnant. »

Extrait de : J. Heliot. « Fuhrer prime time. »

Frankenstein 1918 par Johan Heliot

Fiche de Frankenstein 1918

Titre : Frankenstein 1918
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2018
Editeur : L’Atalante

Première page de Frankenstein 1918

« Anvers fut l’endroit d’un tournant décisif dans l’évolution des combats qui conduisirent l’Europe, d’abord, puis le monde à la Guerre terminale, même si bien peu parmi les plus influents décisionnaires politiques et militaires de l’époque en eurent l’intuition. Aujourd’hui encore, les tenants et aboutissants de cette histoire secrète, comme on la nomme parfois avec un brin de condescendance chez mes collègues plus éminents, demeurent ignorés, sinon méprisés.
Ce document, fruit de longues années de recherches, d’entrevues, de lectures et de compilations des données disponibles, saura, je l’espère, apporter à ses lecteurs (s’il s’en trouve !) l’éclairage nécessaire à la compréhension des événements qui ont plongé nos sociétés dans l’Ère hivernale – avant la venue du Dégel salvateur.
On me pardonnera le jeu de mots de cet incipit, au regard de la gravité du sujet abordé, mais le principal responsable du revirement évoqué ne manquait pas d’humour, voire d’une certaine légèreté, même au plus fort des nombreuses crises qu’il eut à affronter au long de son incomparable carrière – incomparable bien qu’obscure pour le public. »

Extrait de : J. Heliot. « Frankenstein 1918. »