Étiquette : Poe
Ombre par Edgar Allan Poe
Fiche de Ombre
Titre : Ombre
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1835
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Ombre
« Vous qui me lisez, vous êtes encore parmi les vivants ; mais moi qui écris, je serai depuis longtemps parti pour la région des ombres. Car, en vérité, d’étranges choses arriveront, bien des choses secrètes seront révélées, et bien des siècles passeront avant que ces notes soient vues par les hommes. Et quand ils les auront vues, les uns ne croiront pas, les autres douteront, et bien peu d’entre eux trouveront matière à méditation dans les caractères que je grave sur ces tablettes avec un stylus de fer.
L’année avait été une année de terreur, pleine de sentiments plus intenses que la terreur, pour lesquels il n’y a pas de nom sur la terre. Car beaucoup de prodiges et de signes avaient eu lieu, et de tous côtés, sur la terre et sur la mer, les ailes noires de la Peste s’étaient largement déployées. Ceux-là néanmoins qui étaient savants dans les étoiles n’ignoraient pas que les cieux avaient un aspect de malheur »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Ombre. »
Morella par Edgar Allan Poe
Fiche de Morella
Titre : Morella
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1835
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Morella
« Ce que j’éprouvais relativement à mon amie Morella était une profonde mais très singulière affection. Ayant fait sa connaissance par hasard, il y a nombre d’années, mon âme, dès notre première rencontre, brûla de feux qu’elle n’avait jamais connus ; – mais ces feux n’étaient point ceux d’Éros et ce fut pour mon esprit un amer tourment que la conviction croissante que je ne pourrais jamais définir leur caractère insolite, ni régulariser leur intensité errante. Cependant, nous nous convînmes, et la destinée nous fit nous unir à l’autel. Jamais je ne parlai de passion, jamais je ne songeai à l’amour. Néanmoins, elle fuyait la société, et, s’attachant à moi seul, elle me rendit heureux. Être étonné, c’est un bonheur ; – et rêver, n’est-ce pas un bonheur aussi ?
L’érudition de Morella était profonde. Comme j’espère le montrer, ses talents n’étaient pas d’un ordre secondaire »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Morella. »
Metzengerstein par Edgar Allan Poe
Fiche de Metzengerstein
Titre : Metzengerstein
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1832
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Metzengerstein
« L’horreur et la fatalité se sont donné carrière dans tous les siècles. À quoi bon mettre une date à l’histoire que j’ai à raconter ? Qu’il me suffise de dire qu’à l’époque dont je parle existait dans le centre de la Hongrie une croyance secrète, mais bien établie, aux doctrines de la métempsycose. De ces doctrines elles-mêmes, de leur fausseté ou de leur probabilité, – je ne dirai rien. J’affirme, toutefois, qu’une bonne partie de notre crédulité vient, – comme dit La Bruyère, qui attribue tout notre malheur à cette cause unique – de ne pouvoir être seuls.
Mais il y avait quelques points dans la superstition hongroise qui tendaient fortement à l’absurde. Les Hongrois différaient très essentiellement de leurs autorités d’Orient. »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Metzengerstein. »
Mellonta Tauta par Edgar Allan Poe
Fiche de Mellonta Tauta
Titre : Mellonta Tauta
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1887
Traduction :
Editeur : Bibebook
Première page de Mellonta Tauta
« A bord du Ballon l’Alouette,
1 avril, 2848.
Il faut aujourd’hui, mon cher ami, que vous subissiez, pour vos péchés, le supplice d’un long bavardage. Je vous déclare nettement que je vais vous punir de toutes vos impertinences, en me faisant aussi ennuyeux, aussi décousu, aussi incohérent, aussi insupportable que possible.
Me voilà donc encaqué dans un sale ballon, avec une centaine ou deux de passagers appartenant à la canaille, tous engagés dans une partie de plaisir (quelle bouffonne idée certaines gens se font du plaisir !) et ayant devant moi la perspective de ne pas toucher la terre ferme avant un mois au moins. Personne à qui parler. Rien à faire. Or quand on n’a rien à faire, c’est le cas de correspondre avec ses amis. »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Mellonta Tauta. »
Manuscrit trouvé dans une bouteille par Edgar Allan Poe
Fiche de Manuscrit trouvé dans une bouteille
Titre : Manuscrit trouvé dans une bouteille
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1833
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Manuscrit trouvé dans une bouteille
« De mon pays et de ma famille, je n’ai pas grand-chose à dire. De mauvais procédés et l’accumulation des années m’ont rendu étranger à l’un et à l’autre. Mon patrimoine me fit bénéficier d’une éducation peu commune, et un tour contemplatif d’esprit me rendit apte à classer méthodiquement tout ce matériel d’instruction diligemment amassé par une étude précoce. Par-dessus tout, les ouvrages des philosophes allemands me procuraient de grandes délices ; cela ne venait pas d’une admiration mal avisée pour leur éloquente folie, mais du plaisir que, grâce à mes habitudes d’analyse rigoureuse, j’avais à surprendre leurs erreurs. On m’a souvent reproché l’aridité de mon génie ; un manque d’imagination m’a été imputé comme un crime, et le pyrrhonisme de mes opinions a fait de moi, en tout temps, un homme fameux. »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Manuscrit trouvé dans une bouteille. »
Lionnerie par Edgar Allan Poe
Fiche de Lionnerie
Titre : Lionnerie
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1835
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Lionnerie
« Je suis, – c’est-à-dire j’étais un grand homme ; mais je ne suis ni l’auteur du Junius, ni l’homme au masque de fer ; car mon nom est, je crois, Robert Jones, et je suis né quelque part dans la cité de Fum-Fudge.
La première action de ma vie fut d’empoigner mon nez à deux mains. Ma mère vit cela et m’appela un génie ; – mon père pleura de joie et me fit cadeau d’un traité de nosologie. Je le possédais à fond avant de porter des culottes.
Je commençai dès lors à pressentir ma voie dans la science, et je compris bientôt que tout homme, pourvu qu’il ait un nez suffisamment marquant, peut, en se laissant conduire par lui, arriver à la dignité de Lion. Mais mon attention ne se confina pas dans les pures théories. Chaque matin, je tirais deux fois ma trompe, et j’avalai une demi-douzaine de petits verres. »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Lionnerie. »
Ligeia par Edgar Allan Poe
Fiche de Ligeia
Titre : Ligeia
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1838
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Ligeia
« Je ne puis pas me rappeler, sur mon âme, comment, quand, ni même où je fis pour la première fois connaissance avec lady Ligeia. De longues années se sont écoulées depuis lors, et une grande souffrance a affaibli ma mémoire. Ou peut-être ne puis-je plus maintenant me rappeler ces points, parce qu’en vérité le caractère de ma bien-aimée, sa rare instruction, son genre de beauté, si singulier et si placide, et la pénétrante et subjuguante éloquence de sa profonde parole musicale ont fait leur chemin dans mon cœur d’une manière si patiente, si constante, si si furtive que je n’y ai pas pris garde et n’en ai pas eu conscience.
Cependant, je crois que je la rencontrai pour la première fois, et plusieurs fois depuis lors, dans une vaste et antique ville délabrée sur les bords du Rhin. Quant à sa famille, – très certainement elle m’en a parlé. Qu’elle fût d’une date excessivement ancienne, je n’en fais aucun doute. – Ligeia ! Ligeia ! – Plongé dans des études qui par leur nature sont plus propres que toute autre à amortir les impressions du monde extérieur, – il me suffit de ce mot si doux, – Ligeia ! – pour ramener devant les yeux de ma pensée l’image de celle qui n’est plus. »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Ligeia. »
Le système du docteur Goudron et du professeur Plume par Edgar Allan Poe
Fiche de Le système du docteur Goudron et du professeur Plume
Titre : Le système du docteur Goudron et du professeur Plume
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1845
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Le système du docteur Goudron et du professeur Plume
« Pendant l’automne de 18…, comme je visitais les provinces de l’extrême sud de la France, ma route me conduisit à quelques milles d’une certaine maison de santé, ou hospice particulier de fous, dont j’avais beaucoup entendu parler à Paris par des médecins, mes amis. Comme je n’avais jamais visité un lieu de cette espèce, je jugeai l’occasion trop bonne pour la négliger, et je proposai à mon compagnon de voyage (un gentleman dont j’avais fait, par hasard, la connaissance quelques jours auparavant) de nous détourner de notre route, pendant une heure à peu près, et d’examiner l’établissement. Mais il s’y refusa, se disant d’abord très pressé et objectant ensuite l’horreur qu’inspire généralement la vue d’un aliéné. Il me pria cependant de ne pas sacrifier à un désir de courtoisie envers lui les satisfactions de ma curiosité, et me dit qu’il continuerait à chevaucher en avant, tout doucement, de sorte que je pusse le rattraper dans la journée, ou, à tout hasard, le jour suivant. Comme il me disait adieu, il me vint à l’esprit que j’éprouverais peut-être quelque difficulté à pénétrer dans le lieu en question »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Le système du docteur Goudron et du professeur Plume. »
Le sphinx par Edgar Allan Poe
Fiche de Le sphinx
Titre : Le sphinx
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1846
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Le sphinx
« Pendant l’effroyable règne du choléra à New York, j’avais accepté l’invitation d’un ami pour passer une quinzaine de jours avec lui dans la retraite de son cottage orné [1] sur les rives de l’Hudson. Nous avions ici autour de nous tous les moyens ordinaires de distraction estivale ; et avec quoi vaguer dans les bois, faire des esquisses, du bateau, pêcher, se baigner, faire de la musique, et des livres, nous aurions dû passer le temps assez agréablement, ne fut-ce par l’effrayante information qui nous parvenait chaque matin de la populeuse ville. Pas un jour ne s’écoulait sans qu’il ne nous apporte des nouvelles du décès de quelque connaissance. Ainsi, comme la fatalité augmentait, nous apprîmes à nous attendre quotidiennement à la perte de quelque ami. A la longue nous tremblions à l’approche de chaque messager. L’air même du sud nous semblait imprégné de mort. Cette pensée paralysante, en effet, prit entière possession de mon âme. Je ne pouvais ni parler, penser, ni rêver à rien d’autre. Mon hôte était d’un tempérament moins excitable, et, bien que le moral profondément déprimé, il s’efforçait à remonter le mien. »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Le Sphinx. »
Le scarabée d’or par Edgar Allan Poe
Fiche de Le scarabée d’or
Titre : Le scarabée d’or
Auteur : Edgar Allan Poe
Date de parution : 1843
Traduction : C. Baudelaire
Editeur : Bibebook
Première page de Le scarabée d’or
« Il y a quelques années, je me liai intimement avec un M. William Legrand. Il était d’une ancienne famille protestante, et jadis il avait été riche ; mais une série de malheurs l’avait réduit à la misère. Pour éviter l’humiliation de ses désastres, il quitta la Nouvelle-Orléans, la ville de ses aïeux, et établit sa demeure dans l’île de Sullivan, près Charleston, dans la Caroline du Sud.
Cette île est des plus singulières. Elle n’est guère composée que de sable de mer et a environ trois milles de long. En largeur, elle n’a jamais plus d’un quart de mille. Elle est séparée du continent par une crique à peine visible, qui filtre à travers une masse de roseaux et de vase, rendez-vous habituel des poules d’eau. La végétation, comme on peut le supposer, est pauvre, ou, pour ainsi dire, naine. On n’y trouve pas d’arbres d’une certaine dimension. »
Extrait de : Edgar Allan Poe. « Le scarabée d’or. »