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Une enfance sorcière par C. Seignolle

Fiche de Une enfance sorcière

Titre : Une enfance sorcière
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 2000
Editeur : Omnibus

Première page de Une enfance sorcière

« C’est à Périgueux, dans un Périgord truffé du passé le plus ancien, celui des civilisations longtemps dites « antédiluviennes », que ma mère me porta en ventre, de septembre 1916 au 25 juin 1917, à quinze heures très précises, les trois coups d’horloge frappant les toits de la basse ville et annonçant le lever de rideau sur le spectacle que j’allais jouer dans la vie. 
Chaque jour de sa croissante grossesse, elle se livra à de vaillants exercices pédestres, car elle n’a jamais su tenir en place, et promena le docile fœtus que j’étais, l’imprégnant d’ambiances extérieures qui décidèrent de mes goûts futurs, tant il est vrai qu’un embryon subit non seulement l’héritage chromosomique mais encore les influences, le milieu et les humeurs d’autrui. Et l’on comprendra le sort de ma destinée lorsqu’on saura que ma mère avait de hautes prédilections, puisqu’elle parcourait avec ivresse les ruines des arènes romaines et prétocoriennes, les jardins du musée encombrés de stèles funéraires gauloises »

Extrait de : Claude Seignolle. « Une enfance sorcière. »

Sexie par C. Seignolle

Fiche de Sexie

Titre : Sexie ou l’éloge de la nymphomanie
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 2013
Editeur : Editions Dominique Leroy

Première page de Sexie

« Grâce à une chance qui, en bien des cas, m’est particulière, je me trouve à la tête d’un compartiment vide ; banquette bien rembourrée, munie d’accoudoirs et d’allonge pieds. Par une faveur divine, j’ai tout cela pour moi seul… Une veine ! Pour s’en persuader, il suffit de jeter un coup d’œil aux compartiments voisins, gavés d’un enchevêtrement de jambes, de baluchons et de valises, le tout noyé dans une âcre fumée de tabac.

Dès lors, privilégié, je tire les rideaux, éteins la lumière et m’installe, requérant toute mon ingéniosité pour parer à la première attaque venant du couloir. Mais je n’ai, hélas ! que mon imperméable et une toute petite valise pour m’aider à donner l’illusion d’une absence momentanée de compagnons de voyage. Et, de ce moment, commence – faiblesse humaine – cette inquiétude sociale qui me force à reconnaître que je barbote tout simplement sept places qui ne sont pas à moi. »

Extrait de : Claude Seignolle. « Sexie ou L’éloge de la nymphomanie. »

Récits cruels par C. Seignolle

Fiche de Récits cruels

Titre : Récits cruels
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 1967
Editeur : Marabout

Sommaire de Récits cruels

  • Récits cruels
    • Les chevaux de la nuit
    • Le dernier visiteur
    • Minnah l’étoile
    • Le retour à Tiburiac
  • Bestiaires et cruautés rustiques
    • Lou Siblaire
    • Le dormeur
    • Celui qui s’y frotta
    • Le marchand de rats
    • Les deux plumes
    • Le chien pourri
  • Nuits
    • Nuits
    • Le Hupeur
    • L’auberge du Larzac

Première page de Les chevaux de la nuit

« Venant de Paris par chemin de fer, je descendis en fin d’après-midi à Landivisiau. C’était la première fois que je me rendais en Bretagne, où le temps de ce mois de mars 1892, doux et humide, se montrait plus clément qu’en la capitale. La nuit se hâtait de clore le jour, mais l’éclairage municipal, bien que faible, l’empêchait d’effacer complètement les rues de cette petite ville dont l’architecture provinciale, voilée par l’atmosphère crépusculaire, me dépaysa ; sensation accrue par la vision de ses habitants en costume local et par les étranges sonorités de leur langue, qui évoquèrent pour moi une époque révolue.

Je dînai à la table d’hôtes du meilleur hôtel de la ville et, malgré la possibilité d’y coucher confortablement, je décidai de repartir le soir même vers ma destination. L’impatience de mon cœur voulait me rapprocher encore de Kerentran où je n’étais attendu que le lendemain. Mais, sachant que la nuit me serait moins longue à proximité de Joceline, je désirais passer ce temps à l’auberge voisine de son manoir. »

Extrait de : Claude Seignolle. « Récits cruels. »

Les loups verts par C. Seignolle

Fiche de Les loups verts

Titre : Les loups verts
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 1970
Editeur : Marabout

Sommaire de Les loups verts

  • Les loups verts
  • Masques et malfarces
  • Monsieur le cerf

Première page de Les loups verts

« Cette nuit-là, une nuit de juillet 1944, une nuit d’eau, la pluie diluvienne nous avait tenu éveillés, Micheline et moi, dans cette ferme des Quatre-Vents, que l’on connaît également sous d’autres noms moins rassurants : les Mauvents ou la Hardière, terres et bâtiments marqués des haines environnantes, qu’elles fussent humaines ou animales. Quant à la végétation, victime d’une terre sableuse et avare de sève, elle ne pouvait servir que de cape au Satan solognot, partout chez lui dans ce pays pourri d’étangs glauques, auréolé de landes mauves et verminé de reptiles sifflants. Sologne sauvage où je faisais retraite et méditation, me croyant momentanément éloigné de la folie guerrière mais livré à la sourde démence de la magie paysanne que j’étudiais alors, notant mes constats et écrivant mes premiers contes de sorcellerie. »

Extrait de : C. Seignolle. « Les loups verts. »

La malvenue par C. Seignolle

Fiche de La malvenue

Titre : La malvenue
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 1965
Editeur : Marabout

Sommaire de La malvenue

  • La malvenue
  • Désirée la sangsue
  • La huche
  • Marie la louve
  • Le gâloup
  • Le diable en sabots

Première page de La malvenue

« L’air de cette nuit d’août pèse. Ce n’est pas encore le moment où l’haleine fraîche du matin délie les senteurs pour les répandre de loin en loin. Le silence peine à se glisser entre les bruits qui animent la nuit : coassements naissants des mares, réguliers et lassants comme des battements d’horloge ; cris forts ou inquiets venant des bois que le noir rend encore plus mystérieux ; craquements qui effritent la quiétude. La ferme de la Noue, aux murs crépis d’une chaux blême, brille à la lune au milieu de ses terres enlisées dans le sombre. Les volets de bois et les fenêtres sont ouverts pour aspirer le peu d’air errant. Sur les lits défaits, chacun dort d’un sommeil commun, profond, pénible. Les muscles ont gardé la cadence du labeur de la journée et par moments se mettent à moissonner dans le vide. Chacun souffre à froid mais ne se réveille pas pour fuir ce cauchemar d’efforts inutiles. Les femmes geignent d’épuisement. Elles sentent leurs reins se tordre comme si elles continuaient véritablement à relever les javelles hargneuses pourries de chardons agressifs. »

Extrait de : Claude Seignolle. « La Malvenue. »

La gueule par C. Seignolle

Fiche de La gueule

Titre : La gueule
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 1999
Editeur : France Loisirs

Sommaire de La gueule

  • Les kartoffeln
  • Le surstrëmming
  • La soif

Première page de Les kartoffeln

« C’était à une des aubes de juillet quarante-quatre. 
Il avait plu jour et nuit, vingt-quatre heures durant. Une pluie d’été, torrentielle, brutale, hargneuse, qui avait réussi à scalper le champ d’avoine maigre dégageant le sud de la ferme où nous logions tant bien que mal Micheline et moi ; cette ferme des Quatre-Vents aux bâtiments misérables, sans bétail, sans matériel, perdue au milieu de sa ch’tite terre sableuse, avare de sève, cernée par les grands carrés cubiques des sapinières dociles ; les landes infinies, déroulées comme des pièces de mauvaise étoffe entre les marécages de cette Sologne divine et bénie du diable. L’eau tombait des citernes du ciel toutes vannes ouvertes, à croire que le bon Dieu, à son tour pris de folie furieuse, essayait une bonne fois pour toutes de noyer les hommes et leur sale vice de vouloir se casser la figure. »

Extrait de : C. Seignolle. « La Gueule. »

Histoires vénéneuses par C. Seignolle

Fiche de Histoires vénéneuses

Titre : Histoires vénéneuses
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 1970
Editeur : Marabout

Sommaire de Histoires vénéneuses

  • Le venin de l’arbre
  • Chaque chose à sa place
  • Une veillée
  • La vierge maudite
  • L’Odile
  • La fille gagnée
  • Les roses d’en-haut
  • L’impossédable
  • La brume ne se lèvera plus

Première page de Le venin de l’arbre

« Moi, Simon, il faut que je regarde la Malvina, et, si je ne l’avais pas, je crois bien que je n’aurais rien pour aider ma vie qui n’a pas les mêmes goûts que celle des autres. 
Quand je la regarde, je crois visiter une personne aussi grande mais bien plus douce que le Bon Dieu qu’on raconte au catéchisme. Lui, il me fait peur, tellement il est puissant pour faire naître les gens, dire aux plantes de pousser et commander aux choses.
C’est par crainte de Lui que je mets sur moi beaucoup de Signes de Croix.
La Malvina, elle, ne m’oblige à rien. Je sais qu’elle ne peut pas autant, mais, si je veux une grande lumière, c’est à elle que je la demandé sans être forcé de me mettre à genoux, et de faire le plus petit signe obligé.
Je la regarde et je vois qu’elle voit dans sa tête, plus loin que plus loin, des pays pas comme celui d’ici, avec des châteaux de fer couverts de toits de cuivre et habités par des princes d’argent ou des rois d’or. »

Extrait de : Claude Seignolle. « Histoires vénéneuses. »

Histoires maléfiques par C. Seignolle

Fiche de Histoires maléfiques

Titre : Histoires maléfiques
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 1965
Editeur : Marabout

Sommaire de Histoires maléfiques

  • L’âme boiteuse
  • Le bahut noir
  • Pauvre Sonia !
  • Ce que me raconta Jacob
  • L’exécution
  • Les âmes aigries
  • Le millième cierge
  • Le chupador
  • Le faucheur
  • L’homme qui ne pouvait mourir
  • Le rond des sorciers
  • Un petit monstre à louer au quart d’heure
  • Et si c’était !
  • Delphine

Première page de L’âme boiteuse

« Oncle Christian est étendu sur son lit, encore en tenue de promenade matinale, mais nous lui avons retiré sa veste, débouclé sa ceinture, dénoué sa cravate et largement ouvert le col de sa chemise. Nous… ses proches, venus hâtivement : son frère Michel et ses deux fils, mes cousins Louis et Henri ; le docteur, son ami de toujours ; Marthe, sa vieille bonne et moi, autre neveu par sa sœur.
Subitement poignardé par une attaque, l’oncle se meurt dans cette tenue négligée, lui pour qui la correction vestimentaire est devenue le bouclier de l’âge. Son visage buriné par tous les vents de la terre et que le soleil a cuit comme une brique, se déteint en gris cendres et se boursoufle de tourments. On dirait un grossier nœud de chêne. Ses paupières, closes, lui montrent déjà le noir revers de la vie. Son cœur, coupable d’abandon, ne spasme plus qu’après hésitation, et ce n’est pas, hélas ! »

Extrait de : Claude Seignolle. « Histoires Maléfiques. »

La brume ne se lèvera plus par C. Seignolle

Fiche de La brume ne se lèvera plus

Titre : La brume ne se lèvera plus
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 1959
Editeur : Phébus

Première page de La brume ne se lèvera plus

« Le plus gros de la nuit est à présent derrière nous. Commandée par la grosse chaussure de Justin qui maintient l’accélérateur à fond et oblige le moteur à boire comme un pochard sans reprendre souffle, la Tite s’épanouit à plein régime.
Les phares du camion enduisent la route d’une couche de lumière laiteuse. Les vagues de la nuit se referment sur nous à la façon d’un miracle biblique. Parfois le ressac se brise sur ces réconfortants îlots lumineux qui surgissent de loin en loin et dont la plage goudronnée permet le repos à quelques camions massifs : les cafés routiers, escales où, dans une tenace senteur d’anis et de gas-oil, les pilotes roulants se réchauffent le corps avec un rhum, ou un petit blanc tonique.
Mais Justin ne s’arrête pas. Clignant de l’œil à d’autres camions qui redescendent vers le Midi, d’où
nous venons, les phares de la Tite étravent la nuit sans répit. Je suis assoupi, soulevé par le rythme onduleux du moteur que le lourd pied de Justin allège dans les descentes et grossit dans les montées, ce chemin de croix des mécaniques. »

Extrait de : C. Seignolle. « La brume ne se lèvera plus. »

Contes sorciers par C. Seignolle

Fiche de Contes sorciers

Titre : Contes sorciers
Auteur : C. Seignolle
Date de parution : 1974
Editeur : Marabout

Sommaire de Contes sorciers

  • L’oubliette
  • Mais, qui est le plus fort ?
  • Une santé de cerisier
  • La morsure de Satan
  • Un viol
  • Il ne faut jamais
  • La “Panard”
  • A l’enseigne de l’étrange
  • Un vieux mélomane
  • Hupe et Pupuler
  • La main de pierre
  • Une enfance sorcière

Première page de L’oubliette

« Saint-Gaudrans est ce bourg aux maisons grisâtres tassées contre le château, comme peureuses, soumises à cet énorme monstre trapu d’épaisses murailles rousses, toujours roi de son passé terrifiant, mais vide de guerriers et grignoté par des vents rongeurs qui, après seigneurs et batailles, a continué à ruiner les finances municipales.
On le tint en vente pendant des années, mentant aux acheteurs ses inconvénients et vantant ses qualités perdues. Mais, qui eût acheté cinquante immenses pièces, toutes à refaire ? C’eût été plus coûteux que de construire à neuf ! Personne, ni richissime excentrique, ni milliardaire américain, n’en voulait malgré les avantages que promettait désespérément le maire, accablé par ce legs de pierres reçu de la vieille et dernière demoiselle châtelaine.
Il fallut la chance du député qui, devenant ministre, put imposer qu’on y installât un hospice de vieillards, poussant si adroitement l’affaire que les travaux de réfection commencèrent aussitôt l’achat conclu. »

Extrait de : Claude Seignolle. « Contes sorciers. »