Étiquette : Bélial
Pandémonium par Johan Heliot

Fiche de Pandémonium
Titre : Pandémonium
Auteur : Johan Heliot
Date de parution : 2002
Editeur : Bélial
Première page de Pandémonium
« Il faisait encore nuit noire lorsque ma logeuse vint tambouriner à ma porte.
Je venais juste de m’endormir, après avoir peiné de longues heures à la correction d’un manuscrit confié par un feuilletoniste de mes amis. Pour subvenir à mes besoins, je louais mes talents d’écrivain public à qui se pouvait soucier des règles de l’orthographe et de la grammaire. Mais si Paris était alors riche en pamphlétaires, chroniqueurs ou publicistes de tous acabits, ils étaient peu nombreux à posséder les quelques sous requis par mon intervention. Aussi la langue en pâtissait-elle souvent, et je devais me satisfaire de peu : un modeste garni où déposer ma malle et mes livres, potage, pain noir et piquette – mes trois « p » nourriciers, répétais-je à l’envi – chaque soir, quand ce n’était pas un jour sur deux.
Fort heureusement, la mère Blanchot, ma logeuse, appréciait ma compagnie et acceptait souvent de prolonger mon crédit plus que de raison. »
Extrait de : J. Heliot. « Pandemonium. »
Rempart par Laurent Genefort

Fiche de Rempart
Titre : Rempart
Auteur : Laurent Genefort
Date de parution : 2011
Editeur : Bélial
Première page de Rempart
« 2019
C’est cette année-là que les Bouches se sont ouvertes. Deux d’abord, une au-dessus du Pacifique et une autre au milieu de la mer de Chine. Rien de grave pour la sécurité mondiale : ce qui en sortait, la plupart du temps, tombait dans un grand « plouf », se débattait quelques secondes avant de se noyer. L’avantage d’avoir beaucoup d’océans…
Le choc a été brutal pour les grandes religions : le choc de l’innocence perdue. Par contre, pour un paquet de sectes, ça a été du pain bénit, tous ces aliens qui déboulaient sur notre belle planète bleue. Mais ensuite, même elles ont été débordées. Trop de variété, trop de biochimies, trop de langages différents… trop tout court.
Car d’autres Bouches se sont ouvertes sur la terre ferme. Par dizaines. »
Extrait de : L. Genefort. « Rempart. »
Points chauds par Laurent Genefort

Fiche de Points chauds
Titre : Points chauds
Auteur : Laurent Genefort
Date de parution : 2012
Editeur : Bélial
Première page de Points chauds
« C’est cette année-là que les Bouches se sont ouvertes. Deux d’abord, une au-dessus du Pacifique et une autre au milieu du golfe du Bengale. Rien de grave pour la sécurité mondiale : ce qui en sortait tombait dans un grand « plouf », se débattait quelques secondes avant de se noyer. L’avantage d’avoir beaucoup d’océans.
Voilà. Nous n’étions plus seuls.
À cette époque, je sortais du lycée pour intégrer l’école des sous-officiers d’active. Mon père était instructeur, ma mère comptable dans l’armée de terre. Ils s’attendaient à ce que je postule à Saint-Cyr, j’en avais les capacités et le goût de la théorie. Mais moi, c’est le terrain qui m’intéressait. Pas seulement pour les sensations fortes et pour voyager. Pour secourir aussi, m’impliquer. Servir, pour servir à quelque chose : ce n’était pas qu’un slogan, cela avait une signification réelle. À la seconde où j’ai vu les images des premières Bouches qui s’ouvraient sur la terre ferme et tous ces aliens en dégorger, j’ai su que plus rien, jamais, ne serait comme avant. Pour le monde comme pour moi. »
Extrait de : L. Genefort. « Points chauds. »
Opexx par Laurent Genefort

Fiche de Opexx
Titre : Opexx
Auteur : Laurent Genefort
Date de parution : 2022
Editeur : Bélial
Première page de Opexx
« Les problèmes ne surviennent pas outre-monde. Ceux en dehors des risques du métier, je veux dire. Ils se produisent en permission, quand on a le temps de cogiter.
De mon côté, je ne risque pas d’en poser, des problèmes. On m’a diagnostiqué un syndrome de Restorff. Un profil recherché par le commandement Opexx, les opérations militaires ultramondaines, parce qu’au retour d’une mission, on ne souffre jamais de troubles post-traumatiques — ni de ce que les médias ont appelé le « spleen opexx ». En contrepartie, mon empathie s’en ressent. La norme considère le Restorff comme un handicap, et ça l’est probablement. Je ne le saurai jamais, mais Claire n’a-t-elle pas coutume de dire que j’avance dans la vie sans espoir et sans crainte ?
Pas en opération, en tout cas, au contraire. Au débriefing, dans le sas de décompression, mon psy vérifie si des tics ne sont pas apparus sur mon visage, si je m’occupe convenablement de ma femme et de ma fille durant les permissions, si je ne me renferme pas quand on m’interroge sur le boulot, si mon entourage a constaté récemment des écarts de conduite. Rien de tout cela, mon comportement est aussi lisse que d’habitude. »
Extrait de : L. Genefort. « Opexx. »
Mémoria par Laurent Genefort

Fiche de Mémoria
Titre : Mémoria
Auteur : Laurent Genefort
Date de parution : 2012
Editeur : Bélial
Première page de Mémoria
« J’ai le droit de savoir pourquoi tu vas me buter, non ? » demanda Norodom.
Il ne se débattait plus. Il avait compris qu’il ne parviendrait jamais à briser la chaise sur laquelle il était ligoté, car l’inhibiteur neural que je lui avais posé sur la nuque l’empêchait de remuer le petit doigt. S’il était attaché, c’était avant tout pour ne pas qu’il s’effondre. Il ne pouvait ni bouger, ni hurler. De toute façon, nous nous trouvions dans une cabane en tôle, plus exactement un container éventré reconverti en abri : crier aurait été inutile.
J’avais traîné Norodom là-dedans une heure auparavant, mais il m’avait fallu une bonne semaine pour monter l’enlèvement. De la porte entrouverte filtrait une brise aux relents de curry : les miasmes du marécage voisin, qui venait lécher un récif de citernes géantes le séparant des tarmacs de l’astroport de Koh-Tap. Un grondement extérieur enflait jusqu’à faire trembler le mobilier : un vieux socle holo, des sièges de salle d’attente fissurés et écaillés, une glacière en mousse cryostat, une banquette défoncée… et, posée sur un cageot en plastique, la mallette. »
Extrait de : L. Genefort. « Mémoria. »
Lum’en par Laurent Genefort

Fiche de Lum’en
Titre : Lum’en
Auteur : Laurent Genefort
Date de parution : 2015
Editeur : Bélial
Première page de Lum’en
« LA VIE INTELLIGENTE sur Garance apparut cent mille ans avant que la planète ne porte ce nom. Cette vie-là n’était pas humaine, ni même organique.
Lum’en était unique en son genre parmi les Dépositaires.
Elle avait commis l’un des crimes les plus graves: détourner un passage à discontinuité spatiale dans le but de le transformer en pont temporel et tenter de modifier le passé de l’univers. La Marraine des Espèces avait laissé des milliers de passages analogues ouvrant sur autant de mondes (bien plus tard, les humains les désigneraient sous le nom de Portes de Vangk). Les Dépositaires voguaient de monde en monde, explorant des volumes d’espace vertigineusement vastes, dans le cerveau de vaisseaux dont ils formaient la conscience. Ils n’avaient aucun ennemi. Le respect des passages à discontinuité spatiale constituait un fondement non seulement de leur civilisation, mais aussi de leur morale personnelle.
Lum’en fut jugée, reconnue coupable et condamnée à une peine de réclusion de dix mille ans sur une planète déserte. Dévoyer un instrument de la Marraine des Espèces était considéré comme une déviance éthique extrême pour des êtres qui se qualifiaient eux-mêmes de Dépositaires. »
Extrait de : L. Genefort. « Lum’en. »
Fleur par Laurent Genefort

Fiche de Fleur
Titre : Fleur
Auteur : Laurent Genefort
Date de parution : 2012
Editeur : Bélial
Première page de Fleur
« Même avec ton nom, Fleur, une pute ça reste une pute. »
La baffe de Juancho m’éclate la lèvre. Et un revers à la volée, qui m’envoie valser contre le coin de la porte et cogner sur le trottoir en me faisant voir trente-six chandelles. Celle-là, Juancho, je ne lui en veux pas de me l’avoir balancée. Ça me permet de moins sentir les autres coups qui pleuvent.
Par terre le bitume fissuré, le ploc ploc de l’averse qui commence. Je me dis : Bon, les gouttes vont le mouiller, Juancho déteste ça, il va rentrer et me laisser tranquille.
Mais ça ne l’arrête pas. Du coin de l’œil, j’aperçois des passants qui s’écartent. Personne ne voudrait se frotter à lui.
« Regarde, salope, regarde ce que tu me fais faire ! Hein, pourquoi tu m’obliges à te faire ça ? »
Extrait de : L. Genefort. « Fleur. »
Colonies par Laurent Genefort

Fiche de Colonies
Titre : Colonies
Auteur : Laurent Genefort
Date de parution : 2019
Editeur : Bélial
Sommaire de Colonies
- Colonies planétaires
- Le lot n°97
- Le dernier Salinkar
- Le bris
- Je me souviens d’opulence
- Le jardin aux mélodies
- Colonies spatiales
- Longue vie
- T’ien-keou
- La fin de l’hiver
- Proche-horizon
- L’homme qui n’existait plus
Première page de Le lot n°97
« On avait cru tout d’abord que l’objet en orbite autour de Fenua était un cargo à la dérive. Or l’épave, recroquevillée sur elle-même, ne ressemblait à aucun appareil répertorié, et sa trajectoire indiquait qu’elle n’avait pas émergé d’une Porte de Vangk. Les vaisseaux fantômes n’étaient pas chose courante. À vrai dire, de mémoire d’homme, le cas ne s’était jamais présenté. C’est pourquoi il n’avait fallu que trente-six heures à la Fédération de Fenua pour décider d’envoyer un orbiteur explorer l’épave.
Cette affaire, médiatisée à outrance, peinait à intéresser Adrien Resnick. L’actualité l’avait toujours ennuyé. Et il avait plus important à l’esprit, se dit–il en entrant dans la cuisine pour petit-déjeuner. Il s’assit sur le pistil pétrifié d’une plante carnivore de la planète forestière Verfébro, sculpté non sans art par les indigènes. La table avait été taillée dans une pierre de rêve qu’il avait rachetée à un musée en faillite, sur Florem. Il ne se donna toutefois pas la peine d’annuler l’allumage du mur-écran. »
Extrait de : L. Genefort. « Colonies. »
Ethfrag par Laurent Genefort

Fiche de Ethfrag
Titre : Ethfrag (Tome 6 sur 6 – Omale)
Auteur : Laurent Genefort
Date de parution : 2015
Editeur : Bélial
Première page de Ethfrag
« Je prends ce jour possession des laboratoires A à G. Les équipements commenceront à arriver dès demain. La nouvelle ligne d’autodiligences reliant Simi à Spærer facilite grandement mon installation.
Le camp d’expérimentations se dresse sur une plaine dénudée, à mi-chemin du fleuve Simiande et du lac Benedikt. Vu depuis la fenêtre de la diligence, il ressemble à une caserne avec ses cantonnements rectangulaires aux épais murs de pierre grise disposés de façon géométrique. Ses gardes, postés sur des tours à intervalles réguliers, renforcent l’impression. En franchissant le portail, mon cœur a battu plus fort. J’ai le sentiment d’être chez moi. Agassiz, le directeur administratif, m’accueille par un interminable discours en présence d’une vingtaine d’assistants des blocs A-G. La diplomatie, qui n’est pourtant pas mon fort, m’oblige à l’écouter sans broncher. Agassiz est un homme assez maigre pour passer par le chas d’une aiguille, mais énergique, affublé de petites moustaches en virgule parfaitement ridicules (pour ma part, j’arbore une barbe taillée chaque matin avec soin, afin qu’elle reste impeccable). »
Extrait de : L. Genefort. « Ethfrag. »
Nouvelles d’antan par Jack Finney

Fiche de Nouvelles d’antan
Titre : Nouvelles d’antan (1948-1965)
Auteur : Jack Finney
Date de parution : 2023
Traduction : P.-P. Durastanti
Editeur : Bélial
Sommaire de Nouvelles d’antan
- La boîte à mots du cousin Len
- Dans un nuage
- Le troisième sous-sol
- Des voisins originaux
- Arrête de faire l’avion avec tes mains !
- J’ai peur
- Le dompteur du tigre
- Il est une marée
- Les dessous de l’information
- Les disparus
- Seconde chance
- Contenu des poches du mort
- Sept jours à vivre
- La lettre d’amour
- Le numismate
- Un printemps à Galesburg
- Une vieille chanson
- Où sont les Cluett
- La magie au déjeuner
- Hé ! Regardez-moi !
- La photo
- Temps d’arrêt
Première page de La boîte à mots du cousin Len
« Le cousin Len avait découvert son étonnante boîte à mots chez un prêteur sur gages. Il hantait volontiers ces boutiques poussiéreuses qui, pour la plupart, se trouvent sur la Deuxième Avenue ; cela le changeait et le soulageait, affirmait-il, des horreurs de la nature qui n’avait pour lui que peu d’attraits. Pour son métier, il devait en effet passer l’essentiel de ses journées au grand air, à réunir le matériel pour Attraits et mystères des bois, la rubrique hebdomadaire qu’il publiait dans le journal local – le pire des métiers, à l’entendre. Même celui de plombier, déclarait-il encore, lui aurait donné plus de satisfactions !
C’est pourquoi il profitait de ses loisirs pour faire le tour des prêteurs sur gages, rapportant de ses recherches tantôt un jeu de vues stéréoscopiques (l’Exposition universelle de Chicago, 1893), tantôt une montre sonnant les heures, ou un cheval en porcelaine à la bouche hérissée de cure-dents colorés. On admirait ces objets, ma femme et moi, habitant chez le cousin Len depuis ma démobilisation dans l’attente de trouver un appartement. »
Extrait de : J. Finney. « Nouvelles d’antan. »