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Les mariages de Paris par Edmond About

Fiche de Les mariages de Paris

Titre : Les mariages de Paris
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1856
Editeur : BnF

Première page de Les mariages de Paris

« Lorsque j’étais candidat à l’école normale (c’était au mois d’octobre de l’an de grâce 1848), je me liai d’amitié avec deux de mes concurrents, les frères Debay. Ils étaient Bretons, nés à Auray, et élevés au collège de Vannes. Quoiqu’ils fussent du même âge, à quelques minutes près, ils ne se ressemblaient en rien, et je n’ai jamais vu deux jumeaux si mal assortis. Mathieu Debay était un petit homme de vingt-trois ans, passablement laid et rabougri. Il avait les bras trop longs, les épaules trop hautes et les jambes trop courtes : vous auriez dit un bossu qui a égaré sa bosse. Son frère Léonce était un type de beauté aristocratique : grand, bien pris, la taille fine, le profil grec, l’œil fier, la moustache superbe. Ses cheveux presque bleus frissonnaient sur sa tête comme la crinière d’un lion. »

Extrait de : E. About. « Les Mariages de Paris. »

Le roi des montagnes par Edmond About

Fiche de Le roi des montagnes

Titre : Le roi des montagnes
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1857
Editeur : BnF

Première page de Le roi des montagnes

« Le 3 juillet de cette année, vers six heures du matin, j’arrosais mes pétunias sans songer à mal, quand je vis entrer un grand jeune homme blond, imberbe, coiffé d’une casquette allemande et paré de lunettes d’or. Un ample paletot de lasting flottait mélancoliquement autour de sa personne, comme une voile le long d’un mât lorsque le vent vient à tomber. Il ne portait pas de gants ; ses souliers de cuir écru reposaient sur de puissantes semelles, si larges que le pied était entouré d’un petit trottoir. Dans sa poche de côté, vers la région du cœur, une grande pipe de porcelaine se modelait en relief et dessinait vaguement son profil sous l’étoffe luisante. Je ne songeai pas même à demander à cet inconnu s’il avait fait ses études dans les universités d’Allemagne ; je déposai mon arrosoir, et je le saluai d’un beau : Guten Morgen. »

Extrait de : E. About. « Le Roi des montagnes. »

Le progrès par Edmond About

Fiche de Le progrès

Titre : Le progrès
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1864
Editeur : BnF

Première page de Le progrès

« Qui que tu sois, lecteur (et tu me pardonneras si je te calomnie), je suppose que tu n’es ni meilleur ni pire que moi. Je ne connais ni ton âge, ni ta fortune, ni le rang que tu occupes dans ce mondé ; mais je suis à peu près sûr que tu as l’amour du bien et quelque penchant au mal ; beaucoup d’idées justes et passablement de préjugés ; une forte dose de bienveillance au fond du cœur et un petit levain de haine et de colère. Tu as un peu travaillé, un peu lutté, un peu souffert, et connu cependant les heures délicieuses où l’on s’écrie que la vie est bonne. Tu sais un peu de tout, mais la somme de tes connaissances n’est presque rien au prix des choses que tu ignores. La passion, le calcul et la raison te conduisent tour à tour, mais il t’arrive aussi de sacrifier tes intérêts les plus évidents au bonheur de faire le bien, et c’est ainsi que tu te maintiens dans ta propre estime. »

Extrait de : E. About. « Le Progrès. »

Le Fellah par Edmond About

Fiche de Le Fellah

Titre : Le Fellah – Souvenir d’Egypte
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1869
Editeur : BnF

Première page de Le Fellah

« Je ne me rappelle pas précisément la date, mais l’Égypte était possédée par un original du nom de Saïd-Pacha, et je n’avais encore ni l’espérance ni même la curiosité de la voir. Tout compte fait, l’aventure que je vous livre en guise de prologue remonte à neuf ou dix hivers. Et l’hiver, cette fois, n’était pas un vain mot : les arbres ployaient sous le givre, la terre craquait sous nos bottes, le canon du fusil me brûlait le bout des doigts quand par hasard j’ôtais un gant.

La vieille année allait finir, à moins pourtant que la nouvelle eût commencé ; impossible de dire au juste si les étrennes étaient dues ou payées ; mais pour sûr c’était un dimanche, car nous chassions à quelques lieues de Paris chez un grand industriel qui travaille six jours sur sept. »

Extrait de : E. About. « Le Fellah – Souvenir d’Égypte. »

Le cas de M. Guérin par E. About

Fiche de Le cas de M. Guérin

Titre : Le cas de M. Guérin
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1862
Editeur : BnF

Première page de Le cas de M. Guérin

« M. Guérin, qui vient de mourir à l’âge de cinquante-deux ans, était chevalier de la Légion d’honneur, licencié en droit, chef de bureau au ministère des finances, ancien capitaine en premier de la 2e compagnie du 7e bataillon de la garde nationale. Il laisse une fortune d’environ vingt-cinq mille francs de rente, une veuve inconsolable
et un fils de dix-huit ans, bachelier ès sciences, candidat à l’École de Saint-Cyr.
Il décéda, le jeudi 15 novembre 1860, en son domicile, rue des Martyrs, 50, en face de la rue de Navarin. Le vicaire de Notre-Dame de Lorette, qui lui administra les derniers sacrements, dit qu’il avait vu peu de morts plus chrétiennes et plus édifiantes. Ses funérailles furent retardées jusqu’au dimanche 18, afin que ses chefs, ses collègues et ses subordonnés pussent lui rendre les derniers devoirs. »

Extrait de : E. About. « Le Cas de M. Guérin. »

La nouvelle carte d’Europe par Edmond About

Fiche de La nouvelle carte d’Europe

Titre : La nouvelle carte d’Europe
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1860
Editeur : BnF

Première page de La nouvelle carte d’Europe

« Le premier jour du mois d’avril, quelques voyageurs, rassemblés par le hasard, avaient dîné à l’hôtel dii Louvre. Soit que le repas eût été bon, soit que le hasard eût pris soin de réunir des gens sans morgue, une aimable familiarité naquit entre les convives, et tout le mondé se connaissait au dessert. La chose eût paru toute simple, il y a cent ans ; elle est presque invraisemblable dans un siècle gourmé comme le nôtre. Mais les voyageurs dont je vous parle, n’appartenant à aucune aristocratie, n’aspiraient point au ridicule des belles manières.
C’était un grand capitaine français, né dans une famille de soldats et neveu d’un lieutenant d’artillerie ; une belle dame anglaise, placée à la tête d’une maison d’exportation qui a des comptoirs jusqu’au bout du monde ; un vieux moine romain, de figure douce et respectable ; un beau sous-officier piémontais, bon appétit et longue moustache ; un Turc dé Constantinople, marié à sept cent cinquante femmes »

Extrait de : E. About. « La Nouvelle Carte d’Europe. »

L’infâme par Edmond About

Fiche de L’infâme

Titre : L’infâme
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1873
Editeur : BnF

Première page de L’infâme

« Le 24 janvier 185., ce qu’on appelle tout Paris se poussait, se foulait et se culbutait au bal de ces gens-là.
L’hôtel des Gautripon, qui recevait tous les mercredis, était cité comme un des plus vastes et des plus somptueux de l’avenue des Champs-Élysées. Le suisse et le premier palefrenier se partageaient vingt louis par semaine, rien qu’à montrer les écuries et les mangeoires de marbre blanc. On lisait dans le Guide de l’étranger que tel jour, à telle heure, les Anglais pouvaient voir la galerie de tableaux, et notamment l’incomparable Passion d’Albert Dürer. Mme Gautripon allait aux courses en voiture de gala, comme une reine ; elle achetait les chevaux que l’impératrice avait trouvés trop chers. »

Extrait de : E. About. « L’infâme. »

L’homme à l’oreille cassée par Edmond About

Fiche de L’homme à l’oreille cassée

Titre : L’homme à l’oreille cassée
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1862
Editeur : BnF

Première page de L’homme à l’oreille cassée

« Le 18 mai 1859, M. Renault, ancien professeur de physique et de chimie, actuellement propriétaire à Fontainebleau et membre du conseil municipal de cette aimable petite ville, porta lui-même à la poste la lettre suivante :

«  À monsieur Léon Renault, ingénieur civil, bureau restant, Berlin, Prusse.

« Mon cher enfant,

« Les bonnes nouvelles que tu as datées de Saint-Pétersbourg nous ont causé la plus douce joie. Ta pauvre mère était souffrante depuis l’hiver ; je ne t’en avais pas parlé de peur de t’inquiéter à cette distance. Moi-même je n’étais guère vaillant ; il y avait encore une troisième personne (tu devineras son nom si tu peux) qui languissait de ne pas te voir. Mais rassure-toi, mon cher Léon : nous renaissons à qui mieux mieux depuis que la date de ton retour est à peu près fixée. Nous commençons à croire que les mines de l’Oural ne dévoreront pas celui qui nous est plus cher que tout au monde. »

Extrait de : E. About. « L’homme à l’oreille cassée. »

De Pontoise à Stamboul par Edmond About

Fiche de De Pontoise à Stamboul

Titre : De Pontoise à Stamboul
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1884
Editeur : BnF

Première page de De Pontoise à Stamboul

« L’aventure que je vais vous raconter par le menu ne ressemble pas mal au rêve d’un homme éveillé. J’en suis encore ébloui et étourdi tout ensemble, et la légère trépidation du wagon-lit vibrera très probablement jusqu’à demain matin dans ma colonne vertébrale. Il y a exactement treize jours que je quittais les bords de l’Oise pour aller prendre le train rapide de l’Orient à la gare de Strasbourg ; et dans ces treize jours, c’est-à-dire en moins de temps qu’il n’en fallait à Mme de Sévigné pour aller de Paris à Grignan, je suis allé à Constantinople, je m’y suis promené, instruit et diverti, et j’en suis revenu sans fatigue, prêt à repartir demain si l’on veut, par la même voiture, pour Madrid ou Saint-Pétersbourg. Et notez que nous avons fait une halte de vingt-quatre heures dans cette France orientale qui s’appelle la Roumanie, assisté à l’inauguration d’un palais d’été dans les Carpathes, pris le thé avec un roi et un reine et banqueté somptueusement chez le Bignon de Bucarest. »

Extrait de : E. About. « De Pontoise à Stamboul. »

Ces coquins d’agents de change par Edmond About

Fiche de Ces coquins d’agents de change

Titre : Ces coquins d’agents de change
Auteur : Edmond About
Date de parution : 1861
Editeur : BnF

Première page de Ces coquins d’agents de change

« J’ai lu dans un vieux, dictionnaire français la définition suivante :
COQUIN. — Homme qui ne craint pas de violer habituellement les lois de son pays.
Si les articles d’un dictionnaire étaient des articles de foi, les plus grands coquins de France seraient les agents de change de Paris. Il n’en est pas un seul qui ne viole au moins cinquante fois par jour ces lois augustes et sacrées que Mandrin, Cartouche et Lacenaire oubliaient tout au plus deux fois par semaine.

Mais s’il était démontré que nous avons dans le Code des lois surannées, absurdes, monstrueuses ; si les magistrats eux-mêmes reconnaissaient quatre-vingt-dix-neuf fois sur cent que l’équité doit lier les mains à la justice ; si, en un mot, ces coquins étaient les plus honnêtes gens du monde, les plus utiles, les plus nécessaires à la prospérité publique, ne conviendrait-il pas de réformer la loi qu’ils violent habituellement et innocemment ? »

Extrait de : E. About. « Ces coquins d’agents de change. »