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Le bonheur des sardines par Pierre Pelot

Fiche de Le bonheur des sardines

Titre : Le bonheur des sardines
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1993
Editeur : Bragelonne

Première page de Le bonheur des sardines

« Il entra dans le bar à midi tapant, traversa la salle de restau bondée, taillant dans la fumée et le brouhaha. À cette heure-là, c’était une clientèle de bureaux. Aucune des filles attablées devant le plat du jour ne détourna son attention à son passage.

Ils étaient comme prévu dans la salle du fond. Quatre autour d’une table. La partie n’était pas engagée depuis longtemps, à en juger par le tapis découvert et les piles de jetons. Le vacarme en provenance de la salle voisine était à peine moins fort.

Deux autres types, inconnus, se tenaient assis un peu en retrait, derrière Norbert. Visiblement deux frères, maigres, grands, osseux, dont un avec une tête incroyablement hirsute et vêtu un peu comme un hippie des temps révolus – une allure qui aurait motivé tout net le refoulement à l’entrée de l’établissement. Il fallait que ce type soit important pour que Norbert tolère un pareil look.

Il attendit, debout, sous le regard inexpressif des deux types maigres. »

Extrait de : P. Pelot. « Le Bonheur des sardines. »

La passante par Pierre Pelot

Fiche de La passante

Titre : La passante
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1999
Editeur : Bragelonne

Première page de La passante

« Il a plu toute la journée.

Je ne crois pas mentir en affirmant que l’averse ne s’est pas calmée une seconde. La bourrasque battant contre les volets métalliques de ma chambre m’a tiré du sommeil bien avant que sonne le réveil. Il est minuit moins le quart, les rafales continuent de secouer régulièrement ce sacré volet – il faudra tout de même que je prenne mon courage à deux mains et trouve une petite demi-heure pour réparer ce qui cloche dans la fermeture : c’est quelque chose que je suis capable de faire.

Il semblerait que ce temps-là annonce un mois de juin totalement pourri, ce qui est le cas, régulièrement, depuis quelques années. Le mois de juin n’est pas un mois que j’aime, sur tous les plans, d’ailleurs, et pas uniquement sous l’angle météorologique. »

Extrait de : P. Pelot. « La Passante. »

La nuit sur Terre par Pierre Pelot

Fiche de La nuit sur Terre

Titre : La nuit sur Terre
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1983
Editeur : Bragelonne

Première page de La nuit sur Terre

« Il avait neigé la veille, vendredi 31 mars, sur les premiers bourgeons éclatés des saules. De la neige fondue et de la pluie crachouillante, du matin jusqu’au soir, et même encore dans les heures avancées de la nuit. Résultat : le sol une fois de plus recouvert de mauvaise boue, l’air humide porté par un vent ricanant, qui savait s’insinuer par le moindre interstice – même qu’il n’avait pas besoin de ça, le vent, pour vous pénétrer sous la peau et venir vous lécher l’intérieur des boyaux.

Et aujourd’hui, jeudi 1er avril, grand soleil, beau temps parfait, ciel bleu. Ce n’était pas une blague. À croire que la veille remontait à des mois…

En fait, cette alternance de chaleurs odoriférantes et de froidures traîtresses ne présentait rien d’extraordinaire pour la saison et le manège durait depuis le milieu du mois écoulé. »

Extrait de : P. Pelot. « La nuit sur Terre. »

L’assassin de Dieu par Pierre Pelot

Fiche de L’assassin de Dieu

Titre : L’assassin de Dieu
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1998
Editeur : Bragelonne

Première page de L’assassin de Dieu

« … Et de tous ceux qui hantent ce pays, pas un ne sait ni ne se souvient qui il était avant, d’où il venait. Ni quels sont les pays d’avant ce pays-là, et pas davantage ceux d’après.

C’est un pays que certains personnages particulièrement mystérieux, et qui disent tout connaître des secrets, nomment parfois le Monde au bord du Gouffre. Ce qui finalement ne veut rien dire, car les gouffres ne sont pas plus inquiétants ni plus grands dans ce monde qu’ils ne le sont ailleurs. Le seul vrai gouffre, si l’on veut bien, est peut-être le ciel. L’immense, l’insondable trou noir du ciel.

Mais est-ce le ciel ? »

Extrait de : P. Pelot. « L’Assassin de Dieu. »

Fou comme l’oiseau par Pierre Pelot

Fiche de Fou comme l’oiseau

Titre : Fou comme l’oiseau
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1980
Editeur : Bragelonne

Première page de Fou comme l’oiseau

« La mère s’était déjà mise à la vaisselle, achevant de mâcher une dernière bouchée de pain. Irénée leva les yeux sur Chip, quand celui-ci repoussa sa chaise et s’en alla, claquant peut-être un peu fort la porte derrière lui. Irénée demeura immobile pendant quelques secondes ; même ses mâchoires se figèrent. Son visage n’avouait rien de ce qu’il pensait en cet instant, ses yeux gris pâle, comme à l’accoutumée, étaient vides. Il reprit sa mastication.

Sur le buffet de bois peint en blanc, parmi des bibelots, le transistor diffusait en sourdine les nouvelles du monde et de l’extérieur.

La cuisine était sombre, mais moins qu’en plein hiver à cette même heure, sur cette pente de la montagne. En hiver, il fallait allumer du lever au coucher.

La mère quitta l’évier pour venir ramasser la vaisselle sur la table. Elle prit l’assiette devant Irénée, et sa fourchette, mais lui laissa son couteau. Elle n’avait pas encore fini de mâcher sa croûte de pain. Son dentier clapait. »

Extrait de : P. Pelot. « Fou comme l’oiseau. »

Dylan Stark – l’intégrale par Pierre Pelot

Fiche de Dylan Stark – l’intégrale

Titre : Dylan Stark – l’intégrale
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution :
Editeur : Bragelonne

Sommaire de Dylan Stark – l’intégrale

  • Quatre hommes pour l’enfer
  • Le vent de la colère
  • La couleur de Dieu
  • La horde aux abois
  • Les loups dans la ville
  • Les loups sur la piste
  • Les irréductibles
  • Le hibou sur la porte
  • La marche des bannis
  • Deux hommes sont venus
  • 7h20 pour Opelousas
  • La peau du nègre
  • L’homme-qui-marche
  • Quand gronde la rivière
  • Plus loin que les docks
  • Un jour, un ouragan…
  • Le tombeau de Satan
  • L’homme des monts déchirés

Du plomb dans la neige par Pierre Pelot

Fiche de Du plomb dans la neige

Titre : Du plomb dans la neige
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 2016
Editeur : Bragelonne

Première page de Du plomb dans la neige

« — Ça t’a jamais fait ça ? demanda Mocky sur un ton qu’il voulait détaché.

Mais ça ne prenait pas : il y avait l’œil, et cette façon de tordre la bouche en coin, et cette décontraction, en somme, qui n’était pas dans l’attitude habituelle de Mocky.

Louis enclencha la troisième. Il avait un profil dur de bandit calabrais, comme on en voit dans les films. Le profil et la face. D’ailleurs, il était calabrais naturalisé, vacciné et tout le tremblement, mais pour ce qui est de l’origine, il ne pouvait pas nier.

Qu’est-ce que ça m’a jamais fait ? demanda-t-il dans un souffle, les paroles glissant tout autour du cigare à embout plastifié qu’il serrait entre les dents.

— Un truc, comme ça, dans le ventre. »

Extrait de : P. Pelot. « Du plomb dans la neige. »

Danger, ne lisez pas ! par Pierre Pelot

Fiche de Danger, ne lisez pas !

Titre : Danger, ne lisez pas !
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1975
Editeur : Bragelonne

Première page de Danger, ne lisez pas !

« Je ne l’avais jamais consulté ce docteur.

Et si j’étais arrivé le premier, ce jour-là, dans la petite salle d’attente de son cabinet, cela n’avait littéralement rien à voir avec mon état de santé. Je n’étais pas malade. Je ne souffrais d’aucun malaise nécessitant le concours d’un docteur.

Certes, je fumais beaucoup plus depuis quelques mois, et j’étais parfois sujet à des crises d’irritabilité inexplicables… Mais c’est le lot de chacun, surtout en cette année 1999, où tout va de mal en pis. Et cela, je le répète, n’a rien à voir avec ma présence en ce lieu.

D’abord, je ne connaissais pas ce toubib, nouvellement installé. J’avais depuis toujours l’habitude de confier mes crampes d’estomac au savoir d’un antique médecin de famille, et je ne vois pas quelle idée bizarre aurait pu me pousser au changement. »

Extrait de : P. Pelot. « Danger, ne lisez pas !. »

Ce soir, les souris sont bleues par Pierre Pelot

Fiche de Ce soir, les souris sont bleues

Titre : Ce soir, les souris sont bleues
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1999
Editeur : Bragelonne

Première page de Ce soir, les souris sont bleues

« Le silence était retombé.

Même les mouches semblaient ne plus avoir la force ni l’envie de voler ; elles bourdonnaient confusément aux fenêtres, suivant le tour des carreaux.

C’était un peu après que l’ombre eut glissé de ce côté-ci du bâtiment. Elian descendit de chez lui au-dessus du garage – et sortit. L’esquisse d’un pas, suspendu une seconde, traduisit sa perplexité en lisière de la chaleur vibrante. Seuls des fous ou des gens en vacances pouvaient à l’évidence se remuer à plaisir dans les pesanteurs de cette fournaise.

Les paupières d’Elian, plissées et lourdes, encadrant le gris du regard méfiant, papillotèrent et se fermèrent à demi. Il écouta. La grimace appuyée avança comme un bec sous la moustache raide et compacte. »

Extrait de : P. Pelot. « Ce soir, les souris sont bleues. »

Brouillards par Pierre Pelot

Fiche de Brouillards

Titre : Brouillards
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 2014
Editeur : Bragelonne

Première page de Brouillards

« Sous la semelle, à chaque pas, les graviers rares de l’allée s’incrustaient dans la terre humide. Le gazon avait tout envahi. Un des murs du cimetière, écroulé depuis Dieu sait quand, était sauvagement remplacé par une haie touffue de noisetiers ébouriffés. La plupart des tombes disparaissaient sous des amas d’orties froissées.

L’homme marchait à pas lents et précis, un peu comme si chacune de ses enjambées était comptée, pesée – quelque chose de très important. Il était de taille légèrement supérieure à la moyenne, élancé. Des épaules droites, et larges, que l’on devinait dures, musclées, tendaient la toile de son imperméable gris. Il allait tête nue, ses cheveux noirs et bouclés sous la bruine.

À un moment, il s’arrêta. Ses poings bougèrent, dans les poches de l’imperméable, comme s’il froissait quelque chose – mais peut-être remuait-il simplement ses doigts : un geste pour presque rien, qui voulait seulement marquer l’hésitation, une certaine tension nerveuse. »

Extrait de : P. Pelot. « Brouillards. »