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Une fille comme les autres par Jack Ketchum

Fiche de Une fille comme les autres

Titre : Une fille comme les autres
Auteur : Jack Ketchum
Traduction : B. Domis
Date de parution : 1989
Editeur : Bragelonne

Première page de Une fille comme les autres

« Vous pensez connaître la douleur ?

Parlez-en à ma deuxième femme. Elle sait. Ou elle croit savoir.

Elle m’a raconté qu’une fois, quand elle avait dix-neuf ou vingt ans, elle s’est interposée entre deux chats qui se battaient – le sien et celui d’un voisin – et l’un d’eux s’en est pris à elle. Il lui a grimpé dessus, comme à un arbre, lui a lacéré les cuisses, le ventre et les seins, laissant des entailles encore visibles aujourd’hui. Il lui a flanqué une telle frousse qu’elle est tombée en arrière, contre le vaisselier du début du siècle de sa mère, cassant son plus beau plat à tarte en céramique et s’éraflant la peau des côtes sur quinze bons centimètres pendant que le chat en furie reprenait le même chemin en sens inverse, toutes griffes dehors. Je crois qu’elle m’a dit qu’elle s’en était tirée avec trente-six points de suture. Plus une fièvre qui a duré plusieurs jours.

D’après ma deuxième épouse, c’est ça, la douleur.

Elle sait que dalle cette bonne femme.

Evelyn, ma première femme, s’en est peut-être plus approchée.

Elle est hantée par une image. »

Extrait de : J. Ketchum. « Une fille comme les autres. »

Morte saison par Jack Ketchum

Fiche de Morte saison

Titre : Morte saison
Auteur : Jack Ketchum
Traduction : B. Domis
Date de parution : 1980
Editeur : Bragelonne

Première page de Morte saison

« Ils la virent traverser le pré et enjamber le muret de pierre, se dirigeant vers la forêt. Elle paraissait désorientée. Une proie facile.

Ils prirent le temps d’arracher les branches de bouleau blanc, d’enlever l’écorce. Ils l’entendaient progresser dans le sous-bois. Ils échangèrent des sourires en silence. Une fois les baguettes dénudées, ils se lancèrent à sa poursuite.

Sans le clair de lune, elle serait tombée dans la bouche béante menant à la vieille cave – et celle-ci semblait profonde. Elle l’évita soigneusement et poursuivit sa course à travers les herbes hautes et les massettes (6), cernée par les pins noirs et les pins argentés, les bouleaux et les peupliers. Ses pieds foulaient un matelas de mousse et de lichen exhalant des odeurs de pourriture et de conifères. Dans son dos, elle les entendait gambader sur la piste qu’elle avait ouverte ; des voix légères et flûtées d’enfants qui jouent dans le noir. Elle se souvint de leurs petites mains, grossières et fortes, des ongles longs, sales et effilés sur sa peau, quand ils s’étaient agrippés à elle. Elle frissonna, distingua leurs rires de plus en plus proches. Devant elle, la forêt s’épaississait. »

Extrait de : J. Ketchum. « Morte saison. »

Fils unique par Jack Ketchum

Fiche de Fils unique

Titre : Fils unique
Auteur : Jack Ketchum
Traduction : B. Domis
Date de parution : 1985
Editeur : Bragelonne

Première page de Fils unique

« Assez, pensa-t-elle.
Ça suffit, bon sang !
Le bébé pleurait.
Le bébé voulait téter. Ou le bébé voulait être porté. Ou alors le bébé s’était chié ou pissé dessus ou peut-être voulait-il pisser ou chier sur elle, qu’il se retenait, emmagasinait tout ça, en attendant le bon moment, quand elle viendrait le changer et qu’il pourrait lui projeter sa merde en pleine figure. C’était déjà arrivé.
Elle sortit du lit et marcha jusqu’au berceau. L’homme continua à dormir.
Elle souleva le bébé et palpa sa couche. Sèche. Elle agita l’enfant de haut en bas. Il pleura de plus belle.
Pas question de lui donner le sein !
Ses mamelons étaient déjà bien assez endoloris comme cela. »

Extrait de : J. Ketchum. « Fils unique. »

Vengeresse par A. Reynolds

Fiche de Vengeresse

Titre : Vengeresse
Auteur : A. Reynolds
Date de parution : 2016
Traduction : B. Domis
Editeur : Bragelonne

Première page de Vengeresse

« Adrana avait toujours détesté le docteur Morcenx, le médecin de notre famille depuis que nos parents avaient atterri sur Mazarile, avant notre naissance. Il avait vu Adrana grandir, et il avait été là quand l’épidémie avait emporté notre mère. Le fléau : la raison pour laquelle mon père s’en prenait à des hommes comme le capitaine Rackamore, les accusant de se mêler de choses qu’il aurait mieux valu ne pas déranger. Mais pour autant que je sache, personne n’a jamais prouvé que le fléau provenait d’un écrin.

Et cela ne l’avait pas empêché de se laisser convaincre d’investir précisément dans le genre d’entreprise qu’il désapprouvait.

Il était comme ça : aisément persuadé, malgré lui. Et la situation arriva à son point critique un forgedi soir du printemps 1799, à l’Historium. Père s’y était rendu pour savoir ce qu’était devenu son investissement. Et pour faire bonne impression parmi les huiles de la chambre de commerce de Mazarile, il nous avait traînées là avec lui et attendait de nous le comportement exemplaire de demoiselles bien élevées.

Adrana ne l’entendait pas de cette oreille.
— Docteur Morcenx ! (Père avait aperçu le médecin de famille à quelques tables de là.) Venez vous joindre à nous. Cela fait si longtemps que vous n’avez pas vu Adrana et Arafura. Regardez comme elles ont grandi. »

Extrait de : A. Reynolds. « Vengeresse. »

Mémoire de métal par A. Reynolds

Fiche de Mémoire de métal

Titre : Mémoire de métal
Auteur : A. Reynolds
Date de parution : 2004
Traduction : B. Domis
Editeur : Bragelonne

Première page de Mémoire de métal

« Ma mère avait un faible pour la poésie. À la mort de ma sœur, mais avant la nouvelle de mon propre enrôlement, elle me fit lire des passages d’un poème de Giresun, Fleurs du matin.

C’était un acte illégal.

Giresun était la poétesse de guerre officielle des Mondes centraux. Les Systèmes périphériques avaient interdit ses œuvres, considérées comme de la propagande. Ma mère, qui possédait plusieurs de ses recueils acquis avant le conflit, n’avait pu se résoudre à profiter d’une des amnisties accordées par les autorités pour leur remettre ces livres. L’un d’eux, offert par Vavarel, contenait une dédicace de sa belle écriture si fluide.

Ma sœur avait toujours eu une bien meilleure écriture que la mienne.

Fleurs du matin avait pour thème la mort et le souvenir. L’acceptation de la perte d’un être cher, tout en se raccrochant au fil lumineux de son existence.

Giresun me fut d’un grand réconfort pendant cette période. Mais je ne pouvais pas parler de son œuvre en dehors de notre maison. Après mon enrôlement, je partis au combat en laissant son poème derrière moi. J’eus beau tenter de les graver dans ma mémoire, même les quelques vers brefs de Fleurs du matin résistèrent à mes efforts. »

Extrait de : A. Reynolds. « Mémoire de métal. »