Auteur/autrice : CH91
Le rendez-vous aux 300 000 par Georges Murcie

Fiche de Le rendez-vous aux 300 000
Titre : Le rendez-vous aux 300 000
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1970
Editeur : Fleuve noir
Première page de Le rendez-vous aux 300 000
« Henri Dumont arpente nerveusement la pièce.
La nuit est tombée, sans pourtant lui apporter le moindre calme. Une nuit chaude de juillet. Derrière la baie, constamment close à cause de la climatisation, on imagine le crissement des insectes nocturnes qui emplit le silence de la campagne toute proche. Il s’arrête un instant devant la cloison de verre. Plusieurs mètres plus bas, la Loire reflète les lumières de l’énorme édifice. Dumont songe qu’il y aura bientôt cinq ans qu’il contemple quotidiennement ce paysage ; depuis que l’immeuble a été spécialement construit pour abriter le Centre Européen d’Etudes Cosmiques, en septembre 1982.
Plus loin, sur la gauche, on aperçoit les lueurs de La Charité-sur-Loire. Brusquement (mais pourquoi justement ce soir?), Dumont se rend compte que la ville, au cours de ces années, a connu une extension considérable… Peut-être le remarque-t-il parce qu’il n’a guère coutume de voir ce panorama de nuit. Il quitte normalement le C.E.E.C. vers seize heures… L’obscurité donne au paysage un aspect un peu insolite, pour lui au moins, et il en remarque peut-être mieux certains détails, certains changements… »
Extrait de : G. Murcie. « Le Rendez-vous au 300 000. »
Le non-être par Georges Murcie

Fiche de Le non-être
Titre : Le non-être
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1977
Editeur : Fleuve noir
Première page de Le non-être
« De nacre et d’ébène, la mer scintillait.
Un astre d’apparence assez volumineuse venait d’apparaître dans une sorte de clairière ouverte dans le ciel obscur. Dans les cieux de l’Empire Xaxalien, Kardan n’avait encore rien vu de semblable. Il le contempla avec admiration. Cet astre brillait intensément entre les nuages déchiquetés qui le cernaient de toutes parts et qu’il ourlait d’un feston pâle et mouvant. Par sa seule présence, la nuit était transformée.
Kardan eut l’impression qu’il faisait plus frais, brusquement ; à moins que ce ne fût qu’une illusion, peut-être due à cette lumière blafarde qui semblait tout saupoudrer de givre.
Kardan frissonna.
Devant lui, assez proche mais un peu en contrebas, le flot léchait l’étroite bande de sable avec une régularité un peu exaspérante, un entêtement patient.
Il bâilla. Malgré l’étrange beauté du spectacle, l’ennui le gagnait et, avec lui, un peu d’inquiétude. »
Extrait de : G. Murcie. « Le non-être. »
Là-bas par Georges Murcie

Fiche de Là-bas
Titre : Là-bas
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1978
Editeur : Fleuve noir
Première page de Là-bas
« Al Gance augmenta progressivement le régime des photoréacteurs.
Multicolores et brillants, les index lumineux se déplacèrent lentement sur les écrans et cadrans situés devant lui. Tout était normal. L’accélération s’effectuait régulièrement ; les propulseurs développaient maintenant une puissance considérable.
Pourtant, l’Interstella-14 ne se déplaçait pas d’un pouce…
Al Gance soupira.
Près de lui, Barbara Cartlew s’affairait vainement devant les émetteurs. Les communications avec les quatre autres appareils de l’escadrille étaient interrompues depuis quelques minutes. La Terre restait muette, ainsi que les six bases flottantes qui gravitaient en permanence sur des orbites solaires variables dont le tracé leur permettait d’être constamment à l’écoute du cosmos entier. Mais sans doute aurait-il été plus juste de parler de surdité que de mutisme. Il était en effet impensable que tous les émetteurs-récepteurs terrestres soient simultanément tombés en panne. Cependant, Barbara était sûre que ses propres appareils fonctionnaient parfaitement. Personne ne répondait à ses appels, et il lui fallait bien admettre que, d’une manière inexplicable, les messages qu’elle ne cessait d’émettre ne parvenaient pas à leurs destinataires. »
Extrait de : G. Murcie. « Là-bas. »
La révolte de Zarmou par Georges Murcie

Fiche de La révolte de Zarmou
Titre : La révolte de Zarmou
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1977
Editeur : Fleuve noir
Première page de La révolte de Zarmou
« La nuit se lovait dans l’étroite et profonde cuvette, avec la grâce lente et un peu dédaigneuse d’un fauve qui, repu, tourne en rond et se couche enfin, les yeux mi-clos, le souffle calme, ramassé sur lui-même, et comme enveloppé dans sa propre tiédeur.
L’épaisse nuit de Chigarnaga, humide, chaude, silencieuse, et pourtant pleine, ce soir encore, de présences vagues, ondoyantes, félines ; ombres imprécises comme des présages, à peine perceptibles, par instants, dans l’obscurité presque impénétrable.
Une nuit-lionne, sauvage et majestueuse, apparemment inoffensive et néanmoins dangereuse, apparemment indifférente à tout et pourtant vigilante, toujours prête à bondir sur l’innocente proie qui se serait laissé abuser par cette tranquillité trompeuse.
Vigilante, Ormeya l’était aussi.
Comme chaque soir depuis près de deux semaines, depuis le début de l’épreuve, elle s’était retranchée dès le crépuscule dans la Caverne de Lumière, au centre même de Chigarnaga dont les constructions s’étendaient en cercles concentriques dans le fond de la cuvette, comme autant de remparts érigés les uns contre les autres, étroitement juxtaposés. »
Extrait de : G. Murcie. « La Révolte de Zarmou. »
La puissance de l’ordre par Georges Murcie

Fiche de La puissance de l’ordre
Titre : La puissance de l’ordre
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1971
Editeur : Fleuve noir
Première page de La puissance de l’ordre
« Lew Welsh venait de le relever aux commandes.
Francis Lyotard gagna lentement la cabine de relaxation.
Le local, parfaitement isolé et conditionné, occupait la partie située à l’extrême droite de l’appareil.
L’extrême droite… Au fond, pensa-t-il, cela ressemblait à une couronne. Quatre énormes rayons tubulaires reliaient cette structure extérieure à la coupole centrale où se trouvaient la salie des machines et le poste de commande.
L’aéronef n’avait ainsi de parties gauche et droite que par rapport à un axe purement théorique. A bord, on parlait généralement d’avant, d’arrière, de tribord et de bâbord par rapport à la direction supposée du déplacement. Faute de points de repère fixes, on n’était même pas sûr de déterminer ce sens avec exactitude. L’oeil n’avait rien où accrocher ses regards. ti fallait se fier aux instruments. »
Extrait de : G. Murcie. « La puissance de l’ordre. »
La mémoire du futur par Georges Murcie

Fiche de La mémoire du futur
Titre : La mémoire du futur
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1978
Editeur : Fleuve noir
Première page de La mémoire du futur
« Soulevée par le lourd véhicule qui venait de le croiser en le frôlant, une gerbe d’eau sale vint s’abattre avec un bruit de grêle sur le pare-brise et le capot.
Instinctivement, Jean-Paul Roulès avait fermé les yeux durant une fraction de seconde, et il s’était légèrement rejeté en arrière, comme si les éclaboussures risquaient de l’atteindre. Un réflexe dont il eut un peu honte, encore qu’il fût seul à bord et que personne n’ait pu voir ce mouvement de recul qu’il jugeait ridicule. Il haussa les épaules et exhala un soupir de lassitude.
Il avait déjà parcouru une bonne centaine de kilomètres sous une pluie battante et le temps, franchement exécrable depuis le milieu de l’après-midi, ne s’améliorait pas. Un crépuscule précoce bleuissait le paysage et estompait les contours. Sur la route, assez étroite et plutôt mal entretenue, stagnaient de grandes flaques frémissantes. Un vent violent soufflait en rafales où la pluie tourbillonnait, affolée. Echevelés, les arbres se balançaient et semblaient être en proie à une étrange ivresse. »
Extrait de : G. Murcie. « La mémoire du futur. »
La folie du capitaine Sangor par Georges Murcie

Fiche de La folie du capitaine Sangor
Titre : La folie du capitaine Sangor
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1975
Editeur : Fleuve noir
Première page de La folie du capitaine Sangor
« Maïka était vraiment une fille extraordinaire.
C’était, en tout cas, ce que pensaient généralement d’elle les personnes qui la connaissaient ou l’approchaient. Surtout les hommes, qu’elle troublait autant par son indifférence, peut-être même davantage que par ses charmes. Elle avait une façon bien à elle, et qui déroutait son entourage, de rester froide, distante, comme si elle ne s’apercevait absolument pas que d’innombrables regards admirateurs convergeaient vers elle, plus éloquents que maints discours !
Ce n’était pas, à proprement parler, de l’arrogance. Plutôt de la distraction. Maïka avait constamment l’air d’être absente, lointaine, de songer à autre chose, absorbée dans les pensées qui lui étaient propres et qu’elle gardait secrètes.
Était-elle réellement belle ?
Frank s’était souvent posé cette question, sans jamais parvenir à y apporter une réponse satisfaisante.
Chez Maïka, c’était en réalité autre chose que de la beauté, si on désirait toutefois en respecter les classiques canons. Une longue fille mince aux attaches souples et graciles… Frank l’aurait volontiers comparée à une fleur, mais il ne savait pas très bien laquelle choisir… Il fallait que ce soit une fleur haute et longue, dans le genre des iris, des arums ou des lys… »
Extrait de : G. Murcie. « La folie du capitaine Sangor. »
La courte éternité d’Hervé Girard par Georges Murcie

Fiche de La courte éternité d’Hervé Girard
Titre : La courte éternité d’Hervé Girard
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1977
Editeur : Fleuve noir
Première page de La courte éternité d’Hervé Girard
« La nuit était claire et froide.
Dans la bâtisse vide et délabrée où il avait cherché refuge, Hervé Girard s’était accroupi dans un angle près de la porte, ce qui lui permettait de surveiller ce qui se passait à l’extérieur. Recroquevillé, tassé sur lui-même afin d’offrir moins de prise au souffle glacé qui s’engouffrait par les ouvertures, il se tenait immobile et seule la condensation de son haleine trahissait le rythme lent de sa respiration. Au-dessus de lui, le toit crevé découpait un morceau de ciel bouffé aux mites.
Il bougea un peu pour consulter sa montre, et il exhala un lent soupir de lassitude.
Il y avait plus de deux heures qu’il rôdait dans les parages, et il n’avait rien observé d’anormal. Découragé et transi, il avait finalement résolu de se tapir derrière ces vieux murs, mais leur abri n’était qu’illusoire. Il y faisait aussi froid que dehors et, depuis qu’il restait immobile, il sentait que l’engourdissement le gagnait sournoisement. »
Extrait de : G. Murcie. « La courte éternité d’Hervé Girard. »
L’homme de lumière par Georges Murcie

Fiche de L’homme de lumière
Titre : L’homme de lumière
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1976
Editeur : Fleuve noir
Première page de L’homme de lumière
« Georgia Hills fut tirée de son sommeil par le léger claquement que la porte métallique provoqua en se refermant.
Elle bougea, s’agita un peu, puis elle se retourna sans ouvrir les yeux, encore à demi assoupie.
Elle était maintenant étendue sur le flanc droit, tournée vers l’intérieur de la cabine assez vaste dont elle occupait l’une des couchettes inférieures.
Georgia entrouvrit alors les paupières. Prudemment. Juste assez pour laisser filtrer un regard entre ses cils.
Même parfaitement éveillée, elle aurait sans doute eu du mal à expliquer clairement son attitude. Elle agissait d’instinct, en obéissant aveuglément à une sorte de réflexe qui la poussait, presque inconsciemment, à feindre de dormir encore, de n’avoir été qu’à peine dérangée par le petit bruit de la porte.
Elle s’appliqua donc à continuer de respirer lentement, profondément, en s’imposant le rythme respiratoire d’un dormeur. Et elle se demanda en même
temps ce qui l’incitait à agir ainsi. »
Extrait de : G. Murcie. « L’homme de lumière. »
L’être polyvalent par Georges Murcie

Fiche de L’être polyvalent
Titre : L’être polyvalent
Auteur : Georges Murcie
Date de parution : 1976
Editeur : Fleuve noir
Première page de L’être polyvalent
« Jacques Dufour s’éveilla en sursaut lorsque la porte s’ouvrit.
Le panneau métallique avait pourtant glissé presque en silence, mais un léger crissement avait suffi pour le tirer de son sommeil.
De son sommeil ou de son inconscience ?
Il chassa cette question de son esprit en ébauchant un petit geste d’agacement. Cela n’avait pas d’importance. Il avait probablement perdu connaissance, au moment du choc, mais…
Il jeta autour de lui un regard un peu hébété. Il ne connaissait pas les lieux mais, au fond, c’était naturel. Comment était-il arrivé là ? Une ambulance, sans doute…
Pourtant, la pièce ne ressemblait pas à une chambre d’hôpital. Un poste de secours ?… S’il se fiait à sa mémoire, il devait se trouver dans les environs d’Avignon.
Il examina mieux la pièce et eut une moue perplexe. Non, décidément, elle n’évoquait pas du tout les locaux d’un centre hospitalier, pas plus que l’homme qui venait d’entrer ne ressemblait à un infirmier. »
Extrait de : G. Murcie. « L’Être polyvalent. »