Étiquette : Fleuve noir
La porte des ténèbres par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de La porte des ténèbres
Titre : La porte des ténèbres (Tome 3 sur 6 – Le neuvième cercle)
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1999
Editeur : Fleuve noir
Première page de La porte des ténèbres
« Raak le gros se retourna sur sa couche en grognant d’aise, puis lâcha un rot sonore. D’un mouvement brusque de sa main velue, il repoussa le drap qui recouvrait son corps pâle et adipeux, comme si le contact de l’étoffe était insupportable à sa panse gonflée de bière. Puis il administra une claque sur la croupe de la prostituée étendue près de lui, en marmonnant d’une voix pâteuse :
— Allez, dégage maintenant ! Je t’ai assez vue… Tire toi, vite !
La jeune femme se leva, ramassa ses vêtements à la hâte et se dirigea vers la porte de la chambre sans un mot. Raak lui jeta un regard torve, satisfait de constater une nouvelle fois la beauté de ce corps dont il avait joui toute la nuit. La fille avait une peau ambrée, de longues jambes fuselées, le galbe de ses hanches était parfait… Elle se tourna brièvement en direction du lit avant de disparaître. Le gros Thorg contempla alors son visage ovale, ses cheveux noirs et luisants, et ses yeux, ses yeux en amande aux iris gris clair, et songea qu’elle devait être une métisse, moitié Fabérienne, moitié Korometh ; un mélange rare, au résultat magnifique… »
Extrait de : J.C Chaumette. « La porte des ténèbres. »
L’impossible quête par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de L’impossible quête
Titre : L’impossible quête (Tome 2 sur 6 – Le neuvième cercle)
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1998
Editeur : Fleuve noir
Première page de L’impossible quête
« Les barbares nous traitèrent comme on ne traite pas des hommes : sans violence, sans mépris, mais avec cette froide indifférence qu’on réserve au bétail. Ils nous donnèrent des sandales de corne et de longs vêtements faits d’une sorte de laine grise et crasseuse, car il fallait nous protéger du soleil, sans quoi nous eûmes rapidement été brûlés, aussi sûrement que par le jet des bouches-flammes de guerre crachant leur liquide enflammé. Jamais je n’avais vu d’astre semblable à ce brasier immaculé suspendu à un firmament couleur de plomb, ce fanal cauchemardesque braquant sur nous son regard pesant de cruel cyclope. Je ne parvenais pas alors à comprendre comment la vie était possible dans ce monde sauvage, cette couche d’air surchauffé, écrasée entre les deux plaques d’une presse géante, l’une de roche noire pulvérulente, l’autre de ciel et de feu…
Peu à peu, je découvrais tout ce qui m’environnait, très progressivement, très doucement, comme un malade émergeant d’un long coma. J’avais été arraché à mon palais-champignon pavé de jaspe, aux grands couloirs emplis du parfum du Thyriül, ma douce île de pierre et de musique flottant sur un océan de jardins tranquilles toujours verts, et jeté brutalement, à travers l’espace et le temps, au cœur d’un enfer noir et brûlant, comme esclave d’un peuple terrible, primitif. »
Extrait de : J.C Chaumette. « L’impossible quête. »
Le peuple oublié par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de Le peuple oublié
Titre : Le peuple oublié (Tome 1 sur 6 – Le neuvième cercle)
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1998
Editeur : Fleuve noir
Première page de Le peuple oublié
« Oningu vient se blottir contre la poitrine de son grand-père. Il enfouit sa tête dans les nattes épaisses, blanches et douces, et caresse de sa petite main le visage ridé d’Aru Barani – la racine noire – , la vieille racine noire, crevassée et desséchée, mais profonde, si profonde dans la terre de l’histoire des Kreels.
— Grand-père, raconte-moi l’histoire de Bunda Yungui !
Le vieil homme sourit. Dans trois mois, Oningu aura cinq ans. Il a presque atteint la moitié de sa vie d’enfant. Mais pour le moment, il a toujours besoin d’entendre la voix rauque de son grand-père chanter les histoires du temps d’avant les Naa-Gundis.
— Tu l’as déjà écoutée, Oningu ! Plusieurs fois…
— S’il te plaît, grand-père…
Aru Barani prend son tonango pour s’accompagner. Il s’accroupit et place l’instrument entre ses cuisses. Puis il le palpe longuement et place l’instrument entre ses cuisses. Ses vieilles mains en aiment le contact : les cylindres de terre cuite sont comme leurs paumes, secs, rugueux, fendillés ; et la peau de leurs doigts est aussi raide et épaisse que le cuir des membranes. Il y a si longtemps que les mains d’Aru Barani et son tonango font naître la musique de leur rencontre, qu’ils ont fini par se ressembler. »
Extrait de : J.C Chaumette. « Le peuple oublié. »
Le guerrier sans visage par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de Le guerrier sans visage
Titre : Le guerrier sans visage (Tome 6 sur 6 – Le neuvième cercle par Fleuve Noir (2 volumes))
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1991
Editeur : Fleuve noir
Première page de Le guerrier sans visage
« Le vieil ermite parla longtemps, très longtemps. Chacune des phrases qu’il prononçait semblait le soulager d’une partie de l’immense fardeau accumulé sur ses épaules. Stanley et Lyrnio s’étaient assis en face de lui. Ils écoutaient, fascinés, l’histoire de cet être qui avait vu grandir les premiers empires galactiques.
— Je suis né, ou plutôt ce fragment de mon esprit qui n’est pas humain est né il y a approximativement cent mille ans, sur une planète dont j’ai oublié jusqu’à l’aspect… Je ne me rappelle même pas à quoi ressemblait mon corps originel. En fait, j’ai du mal à imaginer l’existence d’une enveloppe physique qui eût été véritablement mienne. Pourtant, il a bien dû en être ainsi au début… Mais dans ma mémoire qui vient enfin de se réveiller, un souvenir est encore très net : cette harmonie, cet accord qui existait entre le monde et moi, entre le monde et mon peuple, devrais-je dire… C’était un peu comme si nous avions vécu environnés d’un flux nourricier à la douce température, dans lequel chaque mouvement était simple, aisé. Il n’y avait pas de conflit, pas de lutte pour survivre. Nous étions des fœtus à la dérive dans un placenta géant ; la planète était notre mère… »
Extrait de : J.C Chaumette. « Le guerrier sans visage. »
Les épées de cristal par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de Les épées de cristal
Titre : Les épées de cristal (Tome 5 sur 6 – Le neuvième cercle par Fleuve Noir (2 volumes))
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1991
Editeur : Fleuve noir
Première page de Les épées de cristal
« Aru Barani est pensif. Il est accroupi derrière son tour de potier, adossé à l’enveloppe d’écorce de la maison-au-creux-de-l’arbre, mais ses vieilles mains restent immobiles, leurs longs doigts noueux bien étalés sur ses genoux.
Il sait que le moment est venu de révéler à Oningu quel doit être son destin. Dans neuf mois exactement, il devra conduire le garçon à la cité de pierre pour qu’il reçoive l’éducation des mangas.
— Neuf mois… Le temps nécessaire à deux cellules qui se rencontrent pour donner vie à un enfant humain… Il aura neuf mois pour se préparer à sa seconde naissance.
— Que dis-tu, grand-père ?
Oningu vient d’entrer dans la caverne de bois de l’arbre géant. Son large visage est éclairé d’un sourire, et ses yeux rient aussi ; ses yeux rient tout le temps…
— Je radotais, Oningu… Je radotais comme un vieux fou ! Sais-tu ce qu’est un manga ?
— Un manga ? Ça veut dire homme fort, homme véritable… Les mangas habitent Faya Nubangui. Ils viennent au village des arbres, parfois. »
Extrait de : J.C Chaumette. « Les épées de cristal. »
La prophétie par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de La prophétie
Titre : La prophétie (Tome 4 sur 6 – Le neuvième cercle par Fleuve Noir (2 volumes))
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1991
Editeur : Fleuve noir
Première page de La prophétie
« Les barbares nous traitèrent comme on ne traite pas des hommes : sans violence, sans mépris, mais avec cette froide indifférence qu’on réserve au bétail. Ils nous donnèrent des sandales de corne et de longs vêtements faits d’une sorte de laine grise et crasseuse, car il fallait nous protéger du soleil, sans quoi nous eûmes rapidement été brûlés, aussi sûrement que par le jet des bouches-flammes de guerre crachant leur liquide enflammé. Jamais je n’avais vu d’astre semblable à ce brasier immaculé suspendu à un firmament couleur de plomb, ce fanal cauchemardesque braquant sur nous son regard pesant de cruel cyclope. Je ne parvenais pas alors à comprendre comment la vie était possible dans ce monde sauvage, cette couche d’air surchauffé, écrasée entre les deux plaques d’une presse géante, l’une de roche noire pulvérulente, l’autre de ciel et de feu…
Peu à peu, je découvrais tout ce qui m’environnait ; très progressivement, très doucement, comme un malade émergeant d’un long coma. J’avais été arraché à mon palais-champignon pavé de jaspe, aux grands couloirs emplis du parfum du Thyriül, ma douce île de pierre et de musique flottant sur un océan de jardins tranquilles toujours verts, et jeté brutalement, à travers l’espace et le temps, au cœur d’un enfer noir et brûlant, comme esclave d’un peuple terrible, primitif. »
Extrait de : J.C Chaumette. « La prophétie. »
AONI par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de AONI
Titre : AONI (Tome 3 sur 6 – Le neuvième cercle par Fleuve Noir (2 volumes))
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1990
Editeur : Fleuve noir
Première page de AONI
« — Grand-père, je me sens… Je suis triste. Pourquoi ressent-on de la tristesse ? Pourquoi
peut-on être triste ?
Aru Barani est en train de vernir un grand vase au long col élancé. Il interrompt son travail pour
répondre à Oningu :
— Il y a quelques jours, tu as eu six ans. C’était ton anniversaire, et nous avons fait une belle fête ; tu as chanté, tu as vu tes amis, tu t’es amusé… Tu as été joyeux, heureux ; tu as connu le plaisir de recevoir des cadeaux et le bonheur de te sentir entouré d’affection. Maintenant, ces moments-là sont terminés, envolés… Alors tu es triste. Tu es triste d’avoir été joyeux… La peine ne peut exister
sans le bonheur : le bonheur ne peut exister sans la peine. Ce sont deux sentiments indissociables ; et plus fort on ressent le chagrin, plus fort on ressentira la joie. Tu es un enfant, et un enfant éprouve toujours très fort le chagrin et la joie. Plus tard, tu apprendras à tempérer tes émotions ; c’est ce que nous essayons tous de faire en recherchant l’harmonie, la Voie… Et quand tu seras comme moi un vieillard, tu comprendras que chaque instant qui passe n’est porteur ni de peine, ni de bonheur ; il est, tout simplement…
— Alors, grand-père, tu ne peux jamais être heureux. »
Extrait de : J.C Chaumette. « AONI. »
La cité sous la terre par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de La cité sous la terre
Titre : La cité sous la terre (Tome 2 sur 6 – Le neuvième cercle par Fleuve Noir (2 volumes))
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1990
Editeur : Fleuve noir
Première page de La cité sous la terre
« Combien de temps dans cette pièce sans fenêtre, à peine éclairée, enfouie au creux des roches noires ? Cinq minutes ? Plusieurs heures ? Stanley n’en savait rien. Il s’était coupé du monde, se fondant dans le silence et l’obscurité, immobile ; tout s’était figé avec lui. Soudain, l’instinct animal qui s’était éveillé en lui des années auparavant l’avertit qu’il était observé par des yeux immatériels tout proches, derrière lui. Il fit volte-face, se ramassant légèrement tel un fauve prêt à bondir, et ses grands yeux de glace se mirent à scruter la pénombre…
Pendant trois mois, on l’avait gardé dans cette étrange cité de pierre, dédale de souterrains et de salles froides et ténébreuses. De grands hommes noirs aux longs cheveux tressés avaient soigné ses blessures et l’avaient nourri. Il n’avait posé aucune question, mais il était sûr de se trouver parmi les Kreels, ce peuple mystérieux vivant en marge des autres mondes humains. Il n’en avait jamais vu auparavant mais connaissait bien des histoires sur leur compte, celles qu’il avait entendues pendant son enfance chez les Svens, et celles que racontaient les guerriers moog-saïs au soir des batailles : « Leur peau est noire comme la nuit… Ils tirent leur force de leurs cheveux immenses qu’ils tressent
en nattes magiques ; elles aspirent l’énergie des étoiles… »
Extrait de : J.C Chaumette. « La cité sous la terre. »
L’homme-requin par Jean-Christophe Chaumette

Fiche de L’homme-requin
Titre : L’homme-requin (Tome 1 sur 6 – Le neuvième cercle par Fleuve Noir (2 volumes))
Auteur : Jean-Christophe Chaumette
Date de parution : 1990
Editeur : Fleuve noir
Première page de L’homme-requin
« Oningu vient se blottir contre la poitrine de son grand-père. Il enfouit sa tête dans les nattes épaisses, blanches et douces, et caresse de sa petite main le visage ridé de Aru Barani – la racine noire –, la vieille racine noire, crevassée et desséchée, mais profonde, si profonde dans la terre de l’histoire des Kreels.
— Grand-père, raconte-moi l’histoire de Bunda Yungui !
Le vieil homme sourit. Dans trois mois, Oningu aura cinq ans. Il a presque atteint la moitié de sa vie d’enfant. Mais pour le moment, il a toujours besoin d’entendre la voix rauque de son grand-père chanter les histoires du temps d’avant les Naa-Gundis.
— Tu l’as déjà écoutée, Oningu ! Plusieurs fois…
— S’il te plaît, grand-père…
Aru Barani prend son tonango pour s’accompagner. Il s’accroupit et place l’instrument entre ses cuisses. Puis il le palpe longuement. Ses vieilles mains en aiment le contact ; les cylindres de terre cuite sont comme leurs paumes, secs, rugueux, fendillés ; et la peau de leurs doigts est aussi raide et épaisse que le cuir des membranes. »
Extrait de : J.C Chaumette. « L’homme-requin. »
Wonderland par Serge Lehman

Fiche de Wonderland
Titre : Wonderland
Auteur : Serge Lehman
Date de parution : 1997
Editeur : Fleuve noir
Première page de Wonderland
« Peter avait un problème avec sa chaussure. La semelle – une mousse semi-rigide de plastique et de filaments de carbone, divisée par une couche d’air sous pression – était en train de fondre. Bientôt, l’air se mettrait à fuir. La semelle opposerait de moins en moins de résistance aux aspérités. Les éclats de verre et de métal qui jonchaient le sol achèveraient de la mettre en pièces et Peter devrait se résoudre à marcher pieds nus.
En temps normal, il se serait contenté de maugréer à mi-voix avant d’aller fouiller, dans le stock du Corbeau, à la recherche d’une autre paire (si possible à sa taille).
Mais pas aujourd’hui…
Pas avec le piège-à-homme lancé à leur poursuite.
« On n’est pas obligés de fuir comme des rats, dit soudain Andréa. On a le choix ! »
Elle marchait devant Peter, réglant son pas de façon à conserver sept à huit mètres d’avance sur lui. Il lui jeta un regard furieux. On a le choix ! On a le choix ! C’était la centième fois au moins qu’Andréa lançait cette phrase depuis le début de la traque – et Peter savait exactement ce qu’elle allait dire ensuite. »
Extrait de : S. Lehman. « Wonderland. »