Étiquette : Pelot
Brouillards par Pierre Pelot

Fiche de Brouillards
Titre : Brouillards
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 2014
Editeur : Bragelonne
Première page de Brouillards
« Sous la semelle, à chaque pas, les graviers rares de l’allée s’incrustaient dans la terre humide. Le gazon avait tout envahi. Un des murs du cimetière, écroulé depuis Dieu sait quand, était sauvagement remplacé par une haie touffue de noisetiers ébouriffés. La plupart des tombes disparaissaient sous des amas d’orties froissées.
L’homme marchait à pas lents et précis, un peu comme si chacune de ses enjambées était comptée, pesée – quelque chose de très important. Il était de taille légèrement supérieure à la moyenne, élancé. Des épaules droites, et larges, que l’on devinait dures, musclées, tendaient la toile de son imperméable gris. Il allait tête nue, ses cheveux noirs et bouclés sous la bruine.
À un moment, il s’arrêta. Ses poings bougèrent, dans les poches de l’imperméable, comme s’il froissait quelque chose – mais peut-être remuait-il simplement ses doigts : un geste pour presque rien, qui voulait seulement marquer l’hésitation, une certaine tension nerveuse. »
Extrait de : P. Pelot. « Brouillards. »
Braves gens du purgatoire par Pierre Pelot

Fiche de Braves gens du purgatoire
Titre : Braves gens du purgatoire
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 2019
Editeur : Editions Héloïse d’Ormesson
Première page de Braves gens du purgatoire
« ET MÊME LUI – cet homme-là qu’elle s’était donc décidée dans un farouche sursaut de déplaisir à appeler à son aide, pour ne pas dire son secours, dans la confusion de ce qu’elle pensait être, à l’instar de son père, un double meurtre et non pas un suicide et un assassinat, et après l’enterrement un même funeste jeudi, dans le même cimetière, des deux cadavres – n’eût été capable à l’évidence de satisfaire son questionnement, si elle l’avait exprimé, ici, à cet instant, dans l’entrouverture de la porte qui suivit le heurt de ses deux doigts recourbés contre le bois de hêtre. N’eût été capable de lui dire – ou simplement l’éclairer sur ce qu’elle devait être censée savoir, à ce que paraissaient croire à sa place tous ces gens de la parentèle qui s’étaient succédé, avec aux lèvres des questions plus ou moins finement montées et puis tombées, concernant le danger sous-entendu encouru par elle et son père, à présent que la source du mal avait été radicalement détournée, ses racines enterrées au sens propre du terme mais pas forcément à jamais – et de lui faire savoir ce qu’elle avait à penser de tout cela. »
Extrait de : P. Pelot. « Braves gens du purgatoire. »
Aux chiens écrasés par Pierre Pelot

Fiche de Aux chiens écrasés
Titre : Aux chiens écrasés (Gore)
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1987
Editeur : Fleuve Noir
Première page de Aux chiens écrasés
« La première fois qu’Alain Chalendon entendit prononcer son nom à la radio, cela lui fit un choc. Sa première réaction fut de se dire que le seul ayant le droit de porter ce nom était lui, personne d’autre; qu’il était bel et bien le véritable Alain Chalendon, et ce depuis suffisamment longtemps pour qu’il en soit certain, que tout autre utilisateur du patronyme ne pouvait être qu’un usurpateur éhonté.
Après quoi, passée sa première bouffée de stupéfaite révolte, cela lui fit tout drôle.
Il avait vécu pendant soixante-huit ans, s’imaginant l’unique détenteur du nom, n’ayant en vérité jamais rien fait d’autre, jamais rien de franchement important, que s’appeler ainsi et être reconnu comme tel par une trentaine de personnes au monde. »
Extrait de : P. Pelot. « Aux Chiens Écrasés. »
Ailleurs sous zéro par Pierre Pelot

Fiche de Ailleurs sous zéro
Titre : Ailleurs sous zéro
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 2020
Editeur : Editions Héloïse d’Ormesson
Sommaire de Ailleurs sous zéro
- Ailleurs sous zéro
- Apportez-moi trois petits cochons
- Bievenu les canpeurs
- Beau mais orageux en soirée
- Doulce France
- Frères de sang
- Le lundi c’est gym
- Le tonneau
- Les quarante balais de mon con
- Commandos
- Le retour de Zan
- Suaire (et Suaire la preuve)
- Poésie, comme on dit
Première page de Ailleurs sous zéro
« Salut, ça va ?
Si ça va ? Oui, oui, ça va. On fait aller. Évidemment que ça va. Que veux-tu répondre d’autre ? Que ça ne va pas ? Et puis quoi ? Te dire ce qu’il en est vraiment ? Oui bien entendu, mais comment le dire, et avec quels mots ? Alors rester là à ressasser et décliner des hésitations, des approximations, des tentatives malhabiles d’explications ? Des errances de langage à la recherche du mot juste, précis. Pour, au final, que ça change quoi ? Que ça aille mieux ? Parce que, non, ça ne va pas trop. Ça ne va pas tellement. Mais ça va.
On retrouve le monde qu’on avait déserté il y a quelque temps. Absent pour cause de fracas. Pour cause de vrac en tête. D’effondrement des piliers de la terre.
Nous revoilà. Nous revoici. En vérité on n’était pas partis, on n’était juste pas là. Ça n’en avait pas l’air mais c’était ça. Oui, absent, c’est le mot. L’absence. »
Extrait de : P. Pelot. « Ailleurs sous Zéro. »
Offensive du virus sous le champ de bataille par Pierre Pelot

Fiche de Offensive du virus sous le champ de bataille
Titre : Offensive du virus sous le champ de bataille (Tome 5 sur 5 – Ballade de Tony Burden)
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1987
Editeur : Fleuve noir
Première page de Offensive du virus sous le champ de bataille
« C’était un jour de janvier 1997 ; lequel, exactement, Burden n’aurait su le dire ; en début, milieu ou fin de semaine, il ne savait pas. Depuis trop longtemps, ce maelström dans lequel il survivait avait transformé en tourbillon cet ordonnancement hebdomadaire.
Le nom des jours, il s’en fichait bien. La seule chose importante était qu’ils continuent de se succéder encore, encore et toujours, envers et contre tout. Et qu’il en soit témoin, lui, à chaque aube une fois encore, à chaque crépuscule une fois de plus.
Il n’y avait pas d’autre urgence.
Il n’existait plus d’autre façon d’exister ; pour Burden, en tout cas. »
Extrait de : P. Pelot. « Offensive du virus sous le champ de bataille – Ballade de Tony Burden. »
Sécession bis par Pierre Pelot

Fiche de Sécession bis
Titre : Sécession bis (Tome 4 sur 5 – Ballade de Tony Burden)
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1987
Editeur : Fleuve noir
Première page de Sécession bis
« On ne résume pas en quelques lignes, en quelques mots, ces événements qui se succédèrent depuis le mois d’août 1996, pour en arriver à la situation présente de fin décembre de cette même année : cet état de guerre qui opposait une fois de plus le Sud des États-Unis au Nord, et qu’ils appelèrent « Sécession Bis ».
Tout au plus, peut-on tenter de remonter la filière, d’établir une sorte de récapitulation des faits significatifs qui amenèrent à l’explosion. Tout au plus, peut-on faire ce que fit un dénommé Mat Pealbean, qui se crut malin en jouant les détectives et en perdit la vie.
Et voici ce que fut la fin de la vie de Mat Pealbean, obscur représentant de commerce marron, petit escroc à la vente au porte-à-porte et occasionnellement dealer. »
Extrait de : P. Pelot. « Sécession bis – Ballade de Tony Burden. »
Alabama un. neuf. neuf. six. par Pierre Pelot

Fiche de Alabama un. neuf. neuf. six.
Titre : Alabama un. neuf. neuf. six. (Tome 3 sur 5 – Ballade de Tony Burden)
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1987
Editeur : Fleuve noir
Première page de Alabama un. neuf. neuf. six.
« Naturellement, en vérité, tout commença ailleurs et bien longtemps auparavant. Mais il faut bien tenter un début quelque part, comme on attrape une balle au vol ; un début qui, tout menteur et apparemment approximatif qu’il soit, n’en est pas moins aussi fiable, aussi solide – peut-être même probablement davantage – que ne l’est le véritable début dont les racines, pareilles à celles d’un sacré saule sauvage vert, se perdent et s’enfouissent à Dieu sait quelles distances du tronc visible de l’arbre. Et ce n’était pas à quelques centaines de miles de ce bled d’Alabama, dans les collines, rizières et marais à l’abandon de la fourche entre la Tombigbee River et l’Alabama River, que le véritable début eut lieu ; ce n’était pas uniquement une question de distance géographique ; c’était si bien enfoui ailleurs et dans le temps que seules quelques personnes auraient pu préciser où et quand, pour avoir vécu ces instants de la genèse. »
Extrait de : P. Pelot. « Alabama. Un. Neuf. Neuf. Six. – Ballade de Tony Burden. »
Observation du virus en temps de paix par Pierre Pelot

Fiche de Observation du virus en temps de paix
Titre : Observation du virus en temps de paix (Tome 2 sur 5 – Ballade de Tony Burden)
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1986
Editeur : Fleuve noir
Première page de Observation du virus en temps de paix
« L’autre avait passé la moitié de son temps à me dire que s’il avait été plus jeune et en bonne santé il y aurait belle lurette qu’il aurait quitté le pays ; à part ça, pour le reste du temps, il mâchonnait en silence un chewing-gum, ou peut-être une vieille chique de tabac, je sais pas – mais si c’était du tabac il ne crachait pas – ; et aussi il me demanda trois ou quatre fois d’où je venais, où j’allais. J’avais dû lui dire à un moment quelconque que je revenais au pays. Ça l’intriguait.
Surtout à cause de mon ventre.
Il me jetait des regards en coin, tout en ouvrant et refermant ses doigts sur le volant. Je voyais ses doigts bouger ; j’avais pas besoin de tourner la tête. »
Extrait de : P. Pelot. « Observation du virus en temps de paix – Ballade de Tony Burden. »
Mémoires d’un épouvantail blessé au combat par Pierre Pelot

Fiche de Mémoires d’un épouvantail blessé au combat
Titre : Mémoires d’un épouvantail blessé au combat (Tome 1 sur 5 – Ballade de Tony Burden)
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1986
Editeur : Fleuve noir
Première page de Mémoires d’un épouvantail blessé au combat
« En ce début d’après-midi torride et plat, Ab Cutty et Tony Burden regardaient s’agiter Malcolm, à quelques pas, de l’autre côté de la route poussiéreuse et blanche, devant le hangar aux pneus branlants. C’était comme si le simple fait d’avoir à contempler le nègre qui bougeait dans le soleil les eut terrassés définitivement, eux, victimes de quelque processus sournois de vases communicants qui les clouait plus profondément, à chaque seconde écoulée, au creux de cette vieille banquette de Ford défoncée qui leur servait de fauteuil, sous l’auvent de la boutique. Comme si, à cause du nègre et de ses gestes lourds, lents, à cause de la sueur du nègre qui coulait sur ses joues et que parfois, de loin en loin, il essuyait d’un revers de main excessivement caricatural – sans manquer, alors, de leur glisser un regard en biais, et aussi à cause des taches sombres de transpiration sur sa chemise vieux rose fanée, Cutty aussi bien que Burden eussent éprouvé de plus en plus de peine à soulever les paupières, à porter à leurs lèvres les boîtes de Bud tiède, à faire le minimum de gestes nécessaires pour chasser les mouches bleues – et même, quasiment respirer. »
Extrait de : P. Pelot. « Mémoires d’un épouvantail blessé au combat – Ballade de Tony Burden. »
Debout dans le ventre blanc du silence par Pierre Pelot

Fiche de Debout dans le ventre blanc du silence
Titre : Debout dans le ventre blanc du silence (Tome 3 sur 5 – Sous le vent du monde)
Auteur : Pierre Pelot
Date de parution : 1999
Editeur : Milady
Première page de Debout dans le ventre blanc du silence
« Le premier, le boiteux, s’avança à découvert, piquant de son bâton la neige devant lui. Les autres attendaient, groupés près de l’arbre dont une partie de la ramure s’était secouée dans un grand poudroiement quand le boiteux avait frappé le tronc, au passage.
La trace était unique, derrière eux, une seule frayée pour tous, droite.
Le boiteux piquait, poussait sur le bâton à petits coups, levait sa jambe valide et enfonçait son pied à hauteur du bâton, amenait la jambe raide, retirait le bâton et piquait de nouveau, une longueur de pas devant. Sous la neige recouvrant l’eau dure, la rivière coulait.
Il traversa.
Arrivé près de l’arbre, là-bas, il fit comme il avait fait de ce côté-ci de la rivière : fouetta les branches, libérant une grande envolée poudreuse jaillie et retombée en scintillant, et lui dessous, blanchi d’un seul coup. »
Extrait de : P. Pelot. « Debout dans le ventre blanc du silence – Sous le vent du monde. »