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La faim du tigre par R. Barjavel

Fiche de La faim du tigre

Titre : La faim du tigre
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1966
Editeur : Gallimard

Première page de La faim du tigre

« Jamais je ne m’habituerai au printemps. Année après année, il me surprend et m’émerveille. L’âge n’y peut rien, ni l’accumulation des doutes et des amertumes. Dès que le marronnier allume ses cierges et met ses oiseaux à chanter, mon cœur gonfle à l’image des bourgeons. Et me voilà de nouveau sûr que tout est juste et bien, que seule notre maladresse a provoqué l’hiver et que cette fois-ci nous ne laisserons pas fuir l’avril et le mai.
Le ciel est lavé, les nuages sont neufs, l’air ne contient plus de gaz de voitures, on ne tue plus nulle part l’agneau ni l’hirondelle, tout à l’heure le tilleul va fleurir et recevoir les abeilles, les roses vont éclater et cette nuit le rossignol chantera que le monde est une seule joie. Tout recommence avec des chances neuves et, cette fois, tout va réussir. J’ai un an de moins que l’an dernier. Non, pas un an, toute ma vie de moins. Je suis une source qui commence. C’est la grande illusion annuelle. Le règne végétal s’y laisse prendre en premier. D’un seul élan, des milliards d’arbres et de plantes resurgissent, poussent des tiges enthousiastes, déplient des feuilles parfaites qui n’ont pas de raison de ne pas être éternelles. Pourtant, dans l’autre moitié du monde,  »

Extrait de : R. Barjavel. « La faim du tigre. »

La charrette bleu par R. Barjavel

Fiche de La charrette bleue

Titre : La charrette bleue
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1980
Editeur : Gallimard

Première page de La charrette bleue

« La rue Gambetta est déserte.
Il fait très chaud. C’est un après-midi d’été, l’heure où l’on reste chez soi, derrière les volets de bois plein, bien clos. Ma mère est debout, seule, au milieu de la rue. Elle s’est placée en plein soleil pour que je la voie bien, elle a le bras droit levé, elle tient quelque chose dans sa main et elle m’appelle :
— René ! René !…
Je suis au bout de la rue, devant l’atelier d’Illy, le charron, avec des copains de mon âge et aussi quelques vieux qui ne veulent manquer aucune occasion de se distraire, et qui ne craignent pas de transpirer, parce que tant d’étés successifs leur ont depuis longtemps pompé toute l’eau du corps. Nous regardons Illy se livrer à une de ses opérations magiques. Sur un grand cercle de fer couché à terre il a entassé des copeaux et des morceaux de bois sec, déchets légers de son atelier, puis d’autres plus gros, et les a allumés en quatre endroits, en croix. Mainte- »

Extrait de : R. Barjavel. « La charette bleue. »

L’enchanteur par R. Barjavel

Fiche de L’enchanteur

Titre : L’enchanteur
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1984
Editeur : Gallimard

Première page de L’enchanteur

« Le grand cerf blanc sortit d’un fourré d’aubépines sans déranger la moindre fleur. Son poil était pareil à de la neige fraîchement tombée et tandis qu’il traversait la clairière sa ramure se balançait comme la voilure d’un vaisseau.
Merlin aimait prendre cette apparence quand il se déplaçait dans la forêt. Il s’arrêta sans bruit au débouché du sentier qui menait à la source de l’Œil, ainsi nommée parce que, par les beaux jours, le ciel se reflétait à la surface de la vasque qu’elle s’était creusée dans le sable et le fin gravier, et elle prenait alors la ressemblance d’un grand œil bleu entre des cils de menthe et de myosotis.
Une fille était en train de s’y baigner, blonde et nue. Le cerf la voyait à travers le feuillage. Elle était très jeune, douze ans, treize ans peut-être. Dans  »

Extrait de : R. Barjavel. « L’Enchanteur. »

Journal d’un homme simple par R. Barjavel

Fiche de Journal d’un homme simple

Titre : Journal d’un homme simple
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1951
Editeur : Denoël

Première page de Journal d’un homme simple

« Si j’entreprends d’écrire ce journal, ce n’est, pas pour laisser à la postérité un document sensationnel. C’est seulement pour écrire un livre de plus. Écrire est mon métier. Ce n’est pas le dernier des métiers, mais peut-être l’avant-dernier. Dans ce pays de France où l’on boit soixante millions d’hectolitres de vin par an, on ne consomme guère, pour la même période, qu’un dixième de livre par habitant. Les vignerons sont riches et les écrivains portent des chaussures trouées.
Quand on a quelque chose à dire, on doit, il est vrai, supporter, pour l’exprimer, la gêne et même les persécutions. Mais qui aujourd’hui, quelque part au monde, a quelque chose à dire ? Qui peut nous apporter une certitude. Nous montrer le chemin vers la lumière ? J’écoute, j’écoute, je n’entends que du bruit…
Je vais donc écrire un livre de plus, bien que je n’aie rien de plus à dire que la plupart de nos beaux génies. Pourquoi un journal ? Pourquoi pas ? Un journal n’est pas plus menteur qu’un roman. Un  »

Extrait de : R. Barjavel. « Journal d’un homme simple. »

Jour de feu par R. Barjavel

Fiche de Jour de feu

Titre : Jour de feu
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1957
Editeur : Denoël

Première page de Jour de feu

« Une fourmi me mordait la peau du ventre au-dessus du nombril. Qu’est-ce que j’étais pour elle ? Sahara ? Bifteck ? Elle essayait de m’entamer. Un petit casse-croûte avant d’alerter la tribu. Un papillon vermillon palpitait au-dessus de ma barbe et de mes sourcils. J’ouvris un œil noir, il s’enfuit. Il espérait peut-être une pervenche. Le soleil me cuisait la poitrine. L’air frais glissait au ras de l’herbe courte. Il me caressa le flanc gauche, m’apporta le parfum d’une touffe d’œillets maigres, sauvages.
L’herbe était si épaisse que mes mains reposaient sur elle sans la plier. Il me fallait enfoncer l’index en le vrillant, dans l’épaisseur verte, pour trouver la terre. Je touchais alors, du bout du doigt, sa chair humide et tiède, qui vivait.
Les abeilles se gorgeaient de thym. De gros bourdons bleus maladroits bousculaient les fleurs d’or. Sur chaque fleur, sous chaque feuille, une bête allait à ses affaires. Toutes les bêtes du rez-de-chaussée,  »

Extrait de : R. Barjavel. « Jour De Feu. »

Commando spatial par R. Barjavel

Fiche de Commando spatial

Titre : Commando spatial
Auteur : R. Barjavel et P. Lamblin
Date de parution : 1967
Editeur : Orion

Première page de Commando spatial

« Où l’on fait connaissance du commandant Cliff McLane et de son équipe

Nous sommes en l’an 2593.

Le monde a bien changé ! Sur la Terre, les États nationaux sont devenus une notion entièrement périmée. Les guerres n’opposent plus les pays du globe, et, depuis plusieurs siècles, si la paix règne enfin, d’autres menaces surgissent du fond de l’Espace.

Associant leurs recherches, mettant en commun leurs inventions, les savants ont fait progresser la science d’une façon fantastique. La Terre devenue trop étroite, les hommes se sont échappés de leur séjour traditionnel.

Désormais l’Humanité unie occupe toutes les planètes du Système Solaire, s’élance vers les étoiles lointaines et habite le fond des océans, aussi bien que les terres. »

Extrait de : R. Barjavel. « Commando spatial. »

Colomb de la lune par R. Barjavel

Fiche de Colomb de la lune

Titre : Colomb de la lune
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1959
Editeur : Gallimard

Première page de Colomb de la lune

« La police fit sortir les journalistes et établit un cordon autour de la villa. Blanche et bleue avec ses tuiles roses au sommet de la colline verte, elle avait l’air d’une maquette pour lotissement de luxe. Deux cent cinquante policiers en uniforme ceinturèrent la colline et un véhicule à sirène et phares rouges s’installa en travers de l’allée.
La femme de Colomb se trouva enfin seule avec sa mère dans le salon aux meubles bousculés. Ils avaient réussi à renverser la table basse en dalle de verre noir, aux pieds de fer forgé noirs, dorés sur la tranche et dans les contours. Les poissons figés qui étalaient dans l’épaisseur de la dalle des nageoires de voile rose parmi des algues jaunes, se trouvaient maintenant à la verticale, et un des pieds forgés avait troué la moquette couleur tabac de Virginie.
– Ces journalistes ! dit la mère de la femme de Colomb. »

Extrait de : R. Barjavel. « Colomb de la lune. »

Béni soit l’atome par R. Barjavel

Fiche de Béni soit l’atome

Titre : Béni soit l’atome
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1998
Editeur : Librio

Sommaire de Béni soit l’atome

  • Les enfants de l’ombre
  • Les mains d’Anicette
  • Péniche
  • La fée et le soldat
  • L’homme fort
  • Béni soit l’atome

Première page de Les enfants de l’ombre

« En ce temps-là, une douce rivière coulait des monts d’Auvergne vers les plaines du Bourbonnais. Elle commençait en torrent maigrelet, prenait de la taille et de l’aisance jusqu’à ressembler à un fleuve moyen de région tempérée. On la nommait l’Allier. Les gens instruits, qui possédaient leur certificat d’études encadré au-dessus de la tête de leur lit, lui attribuaient le genre masculin, mais les simples ne se trompaient pas, et parlaient d’elle comme d’une fille. L’été, quand elle reflétait le ciel bleu pâle, elle avait l’air d’une bergère couchée parmi les fleurs et les herbes. Elle aimait les adolescents vierges,  imprudents, qui ont les membres graciles et le ventre à peine fleuri. Chaque année elle en ravissait quelques- uns, elle les gardait longtemps dans son lit. Elle ne les rendait qu’après avoir tout tiré d’eux, elle les déposait doucement sur une berge de sable, nus, les yeux ouverts, les mains abandonnées, la bouche close.
A l’automne, elle poussait un ventre de matrone et gémissait ses douleurs. Les riverains dont elle écrasait les prés en se retournant juraient sur elle : « La garce ! Al’est encor’grosse ! » Ils la connaissaient bien. »

Extrait de : R. Barjavel. « Béni soit l’Atome. »

Le voyageur imprudent par R. Barjavel

Fiche de Le voyageur imprudent

Titre : Le voyageur imprudent (Tome 2 sur 2 – Ravage)
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1944
Editeur : Gallimard

Première page de Le voyageur imprudent

« L’APPRENTISSAGE

Il faisait un froid de guerre. Au petit matin, le sergent Mosté découvrit un soldat, demi-nu, tordu en travers des feuillées. Le gel qui montait de la neige l’avait empoigné à mort. Ses cuisses sonnaient au doigt comme des planches. Quatre hommes l’emportèrent. Celui qui le prit par la tête lui cassa les oreilles.
Les chasseurs pyrénéens du 27e bataillon occupaient depuis deux mois le village de Vanesse, au bord de la plaine de betteraves. Ils devaient le quitter ce jour-là, pour une destination inconnue. Le caporal d’échelon Pierre Saint-Menoux, enfoui dans la paille de l’écurie, dormit peu, tourmenté par le souci de son septième déménagement. Il était responsable des dix-sept conducteurs de la compagnie de mitrailleuses, de leurs chevaux et de leurs voitures. Dans le civil, il enseignait les mathématiques au lycée Philippe-Auguste. »

Extrait de : R. Barjavel. « Ravage – Le voyageur imprudent. »

Ravage par R. Barjavel

Fiche de Ravage

Titre : Ravage (Tome 1 sur 2 – Ravage)
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1943
Editeur : Gallimard

Première page de Ravage

« LES TEMPS NOUVEAUX

« Vos gratte-ciel ? Ils sont bien petits ! »
(Déclaration de Le Corbusier aux journalistes new-yorkais)

François Deschamps soupira d’aise et déplia ses longues jambes sous la table.
Pour franchir les deux cents kilomètres qui le séparaient de Marseille, il avait traîné plus d’une heure sur une voie secondaire et supporté l’ardeur du soleil dans le wagon tout acier d’un antique convoi rampant. Il goûtait maintenant la fraîcheur de la buvette de la gare Saint-Charles. Le long des murs, derrière des parois transparentes, coulaient des rideaux d’eau sombre et glacée. Des vibreurs corpusculaires entretenaient dans la salle des parfums alternés de la menthe et du citron. Aux fenêtres, des nappes d’ondes filtrantes retenaient une partie de la lumière du jour. Dans la pénombre, les consommateurs parlaient peu, parlaient bas,  »

Extrait de : R. Barjavel. « Ravage – Ravage. »