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Le sortilège de Babylone par Anne Rice

Fiche de Le sortilège de Babylone

Titre : Le sortilège de Babylone
Auteur : Anne Rice
Date de parution : 1996
Traduction : M. Véron
Editeur : Pocket

Première page de Le sortilège de Babylone

« Assassinée. Elle avait les cheveux noirs. Les yeux aussi.

C’est arrivé sur la Cinquième Avenue, dans une élégante boutique de vêtements, en pleine confusion, dans la bousculade. L’hystérie quand elle est tombée… peut-être.

Je l’ai vue à la télévision, sans le son. Je la connaissais. Oui, elle avait été dans ma classe. Esther Belkin. Riche et ravissante.

Son père dirigeait un « temple mondial ». Platitudes et T-shirts ésotériques. Les Belkin avaient tout l’argent dont on peut rêver, et maintenant cette jeune fille en fleur qui posait toujours ses questions si timidement, Esther, était morte.

Au journal télévisé, en direct, il me semble bien que je l’ai vue mourir. Je lisais un livre, sans faire bien attention. Les nouvelles défilaient en silence, mêlant guerres et stars de cinéma. L’écran projetait de lents reflets électriques sur les murs. Les soubresauts et les éclats d’une télévision que personne ne regarde. Après sa mort en direct, j’ai poursuivi ma lecture. »

Extrait de : A. Rice. « Le sortilège de Babylone. »

La vie avant l’homme par M. Atwood

Fiche de La vie avant l’homme

Titre : La vie avant l’homme
Auteur : Margaret Atwood
Date de parution : 1979
Traduction : M. Véron
Editeur : Robert Laffont

Première page de La vie avant l’homme

« Je ne sais pas comment je devrais vivre. Je ne sais pas comment on devrait vivre. Je sais seulement comment je vis. Je vis comme un escargot privé de sa coquille. Et ce n’est pas un moyen de gagner de l’argent.

Je veux qu’on me rende ma coquille, j’ai mis assez longtemps à la fabriquer. Tu l’as emportée, où que tu sois désormais. Tu as bien su me l’ôter. Je veux une coquille comme une robe à sequins, faite de piécettes argentées et de dollars se chevauchant comme les écailles d’une armadille. L’arme à gauche. Imperméable ; comme un ciré breton.

Je voudrais bien n’avoir pas à penser à toi. Tu as voulu m’impressionner ; eh bien je ne suis pas impressionnée, seulement écœurée. C’était dégoûtant de faire cela. Et puéril. Et idiot. Comme de fracasser une poupée dans un moment de fureur, mais toi, c’est ta tête que tu as fracassée. »

Extrait de : M. Atwood. « La vie avant l’homme. »

Le monde de Ben par D. Lessing

Fiche de Le monde de Ben

Titre : Le monde de Ben
Auteur : Doris Lessing
Date de parution : 2000
Traduction : M. Véron
Editeur : J’ai lu

Première page de Le monde de Ben

«  Quel âge avez-vous ?
— Dix-huit ans. »
La réponse ne vint pas tout de suite car Ben redoutait ce qui, il le savait, allait arriver maintenant ; et en effet, derrière la vitre qui le protégeait du public, l’employé posa son stylo-bille sur le formulaire qu’il remplissait, puis, avec sur son visage une expression que Ben connaissait trop bien, examina son client d’un regard à l’amusement empreint d’impatience qui n’était pas tout à fait de la dérision. L’homme qu’il avait devant lui était petit, gros, ou en tout cas trapu. La veste qu’il portait était trop grande pour lui. Il devait avoir au moins quarante ans. Et ce visage ! C’était une large face aux traits grossiers, dont la bouche s’étirait en un grand sourire – qu’est-ce qu’il pouvait bien trouver de si fichtrement drôle ? -, un nez épaté aux narines dilatées, des yeux glauques avec des cils roux pâle, sous des sourcils en bataille de la même couleur. »

Extrait de : D. Lessing. « Le monde de Ben. »

Le cinquième enfant par D. Lessing

Fiche de Le cinquième enfant

Titre : Le cinquième enfant
Auteur : Doris Lessing
Date de parution : 1988
Traduction : M. Véron
Editeur : Albin Michel

Première page de Le cinquième enfant

« Harriet et David se rencontrèrent à une fête d’entreprise à laquelle ni l’un ni l’autre n’avait eu envie d’aller, et tous deux surent à l’instant même que c’était là ce qu’ils attendaient. Quelqu’un d’assez conservateur, démodé, pour ne pas dire vieillot; timide, difficile à contenter : voilà comment les autres les définissaient, il n’y avait pas de fin aux qualificatifs désobligeants qu’ils s’attiraient. Ils défendaient obstinément une certaine vision d’eux-mêmes, qui était la banalité et le droit à la banalité, sans pour autant avoir à subir de critiques pour leurs exigences émotionnelles et leur abstinence simplement parce que c’étaient là des qualités passées de mode.

A cette fameuse fête d’entreprise, environ deux cents personnes s’entassaient dans une longue salle solennelle, qui était une salle de conseil d’administration trois cent trente-quatre jours par an. Trois sociétés associées, toutes liées à la construction immobilière, tenaient là leur fête de fin d’année. »

Extrait de : D. Lessing. « Le Cinquième enfant. »

Le carnet d’or par D. Lessing

Fiche de Le carnet d’or

Titre : Le carnet d’or
Auteur : Doris Lessing
Date de parution : 1962
Traduction : M. Véron
Editeur : Albin Michel

Première page de Le carnet d’or

« Les deux femmes étaient seules dans l’appartement.
« En fait, ça craque par tous les bouts », dit Anna tandis que Molly reposait le récepteur.
Molly passait sa vie au téléphone. Avant qu’il ne sonne, cette fois, elle avait juste eu le temps de demander à Anna : « Alors ? Quels sont les derniers cancans ? » Et elle annonça en revenant du téléphone : « C’est Richard. Il arrive. Son seul instant libre d’ici un mois, du moins il le prétend.
— De toute façon je ne m’en irai pas, dit Anna.
— Surtout pas, reste où tu es. »
Molly s’examina d’un œil critique : elle portait un pantalon et un pull-over aussi défraîchis l’un que l’autre. « Il n’aura qu’à me prendre comme je suis, décréta-t-elle en s’asseyant devant la fenêtre. »

Extrait de : D. Lessing. « Le Carnet d’or. »