Étiquette : Barjavel

 

Tarendol par R. Barjavel

Fiche de Tarendol

Titre : Tarendol
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1946
Editeur : Gallimard

Première page de Tarendol

« Aujourd’hui 9 septembre 1944, zéro heure trente… Je crois que mon réveil avance d’un quart d’heure. Je n’ai pas de montre, pas de pendule, rien que ce réveil.

Le jour, je le pose sur la cheminée de mon bureau, à côté du cadre à photos. Dans le cadre se chevauchent quelques photos de mes enfants. Voici ma fille dans le sable, le buste de mon fils avec son grand front. Les voici ensemble. Et puis tous les deux sur mes genoux, un jour d’hiver. Chers petits, ils sont si beaux, ils sont si jeunes. Quand je serai mort, ils se disputeront ma chemise. Dieu veuille que je meure nu.

La nuit, je le pose sur une chaise, près de mon lit. Souvent, il se prend un pied dans un  »

Extrait de : R. Barjavel. « Tarendol. »

Si j’étais Dieu … par R. Barjavel

Fiche de Si j’étais Dieu !

Titre : Si j’étais Dieu …
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1976
Editeur : Le livre de poche

Première page de Si j’étais Dieu !

« Jacques Jolivet est un garçon que je connais depuis longtemps. Tous les trois ou quatre ans il me téléphone pour me demander comment je vais. Je lui réponds que je vais bien, parce que c’est toujours ce qu’on répond, quelle que soit la santé, et j’ajoute affectueusement :
— Et toi ?
J’entends là-bas, tout au bout du fil, l’esquisse d’un ricanement, comme si c’était la question la plus saugrenue que l’on puisse poser. Puis il répond qu’il va bien lui aussi. Nous n’avons rien appris sur nos santés respectives, et nous continuons de nous porter comme nous pouvons ; il faut bien que ça aille…
La dernière fois il m’a dit en plus :
— J’aimerais vous voir…
Il me dit « vous », je lui dis « tu », car il pourrait être mon fils, et nous nous sommes connus quand nous étions, moi un sévère critique dramatique, lui un jeune acteur de grand talent, venu trente ans trop tôt sur les planches. C’était un de ces acteurs du genre qui-n’a-pas-l’air-d’être-un-acteur, que Hollywood a mis tant à la mode depuis, et qui font la gloire du nouveau cinéma américain. Il  »

Extrait de : R. Barjavel. « Si j’étais Dieu. »

Roland, le chevalier plus fier que le lion par R. Barjavel

Fiche de Roland, le chevalier plus fier que le lion

Titre : Roland, le chevalier plus fier que le lion
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1972
Editeur : Editions G.P.

Première page de Roland, le chevalier plus fier que le lion

« CHARLEMAGNE ET MARSILE

AU sommet de la plus haute tour de son château, sur la terrasse qui domine la vallée du Rhône, la dame de Beauséjour scrute l’horizon. Voilà trois ans que son noble époux, le baron de Beauséjour, s’est joint à l’immense armée qui déferlait au pied du château pour aller s’embarquer et délivrer Jérusalem du joug des infidèles. Trois ans qu’elle attend son retour et qu’elle prie Dieu chaque matin et chaque soir, et à midi également, de donner la victoire aux chrétiens et de conserver la vie à son seigneur. L’horizon est vide. Elle soupire, baisse la tête, et la pointe de son hennin se dresse vers le ciel.
Rassemblant de ses deux mains ses lourdes jupes de soie vert pomme, elle s’engage dans l’escalier qui descend vers les appartements. Son page blond, Geoffroi, vêtu de bleu, et son page brun, Girart, vêtu de rouge, descendent derrière elle, chacun tenant en laisse un lévrier blanc.
C’est la fin d’une courte journée d’hiver. À travers les étroites fenêtres qui percent les murs épais comme trois fois le pas d’un homme, une lumière pâle parvient à peine à traverser les carreaux verts sertis de plomb. »

Extrait de: R. Barjavel. « Roland, le chevalier plus fier que le lion. »

AVERTISSEMENT AU LECTEUR

L’auteur de cet ouvrage n’a pas eu d’autre ambition que de suivre au plus près le texte de la Chanson de Roland, tout en le mettant à la portée de ses jeunes lecteurs. Puisse-t-il leur donner l’envie de lire, par la suite, dans sa version originale, ce chef-d’œuvre de notre littérature héroïque.
 
R.B

Les enfants de l’ombre par R. Barjavel

Fiche de Les enfants de l’ombre

Titre : Les enfants de l’ombre et autres nouvelles
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 2016
Editeur : Gallimard

Sommaire de Les enfants de l’ombre

  • Le prince blessé
  • Les enfants de l’ombre
  • Béni soit l’atome

Première page de Les enfants de l’ombre

« En ce temps-là, une douce rivière coulait des monts d’Auvergne vers les plaines du Bourbonnais. Elle commençait en torrent maigrelet, prenait de la taille et de l’aisance jusqu’à ressembler à un fleuve moyen de région tempérée. On la nommait l’Allier. Les gens instruits, qui possédaient leur certificat d’études encadré au-dessus de la tête de leur lit, lui attribuaient le genre masculin, mais les simples ne se trompaient pas, et parlaient d’elle comme d’une fille. L’été, quand elle reflétait le ciel bleu pâle, elle avait l’air d’une bergère couchée parmi les fleurs et les herbes. Elle aimait les adolescents vierges, imprudents, qui ont les membres graciles et le ventre à peine fleuri. Chaque année elle en ravissait quelques-uns, elle les gardait longtemps dans son lit. Elle ne les rendait qu’après avoir tout tiré d’eux, elle les déposait doucement sur une berge de  »

Extrait de : R. Barjavel. « Les enfants de l’ombre et autres nouvelles. »

Les chemins de Katmandou par R. Barjavel

Fiche de Les chemins de Katmandou

Titre : Les chemins de Katmandou
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1969
Editeur : Pocket

Première page de Les chemins de Katmandou

« UN incendie brûlait derrière le brouillard. Jane en voyait la lumière vague en haut et à droite du pare-brise. Cela donnait à l’image floue encadrée dans la vitre l’apparence d’une pellicule voilée par un coup de soleil rouge. Mais à gauche et à droite de la voiture, le brouillard gris continuait à couler lentement comme le fond d’un fleuve dans lequel se déversent des égouts depuis l’éternité.
Jane ne savait pas où elle se trouvait, ne savait pas ce qui brûlait, commençait à ne plus savoir qui elle était. Elle aurait voulu ne plus rien savoir, plus rien, rien, et que le monde entier brûlât et s’écroulât sur elle pour écraser dans sa tête ce qu’elle avait vu, ce qu’elle avait entendu, le visage soudain figé de son père, le geste surpris interrompu, les mots de l’Autre, la main, le rire de l’Autre, le regard éperdu de son père sur elle, le désespoir dans le regard de  »

Extrait de : R. Barjavel. « Les Chemins de Katmandou. »

Le prince blessé par R. Barjavel

Fiche de Le prince blessé

Titre : Le prince blessé et autres nouvelles
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1974
Editeur : France Loisirs

Sommaire de Le prince blessé

  • Le prince blessé
  • Monsieur Lery
  • Monsieur Charton
  • Les bêtes 1 – le têtard
  • Les enfants de l’ombre
  • Les bêtes 2 – les lionnes
  • Les mains d’Anicette
  • Les bêtes 3 – le papillon
  • Péniche
  • Les bêtes 4 – la couleuvre
  • La fée et le soldat
  • Les bêtes 5 – les loups
  • L’homme fort
  • Les bêtes 6 – la créature
  • Béni soit l’atome
  • Les bêtes 7 – elle

Première page de Le prince blessé

«  Allô ! Ici Radio Bagdad… Vous êtes à l’écoute de Radio Bagdad sur ondes longues, sur ondes moyennes, sur ondes courtes et ultracourtes, sur toutes les ondes que vous voudrez et sur les autres aussi, car il faut que le monde entier reçoive aujourd’hui la nouvelle : notre souverain bien-aimé. Commandeur des Croyants, béni d’Allah, le grand Khalife Haroun al Raschid vient d’avoir un fils.
« Au cours de la très longue vie qu’Allah lui a accordée, notre souverain bien-aimé a fait don de lui-même, pour leur bonheur, à treize mille sept cent quarante-deux épouses. C’est la dernière choisie, la plus jeune, la plus rose, la plus ronde, Fatima la bien-aimée — elles furent toutes les bien-aimées —, qui a reçu d’Allah la grâce de porter en son sein le fils né ce soir. Il est venu au monde les yeux ouverts, ce qui signifie qu’il sera toujours à la recherche de la lumière. Qu’Allah lui accorde de la trouver, et qu’il vous accorde, à vous qui écoutez, la Paix et la Joie. Sa mère a donné au glorieux garçon le nom d’Ali. Qu’ils soient bénis, elle et lui. Il n’y a qu’un seul Dieu, c’est Dieu.  »

Extrait de : R. Barjavel. « Le Prince Blessé et autres nouvelles. »

Le grand secret par R. Barjavel

Fiche de Le grand secret

Titre : Le grand secret
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1973
Editeur : Pocket

Première page de Le grand secret

« Comme une Jeanne d’autrefois

LE 17 janvier 1955, un peu après onze heures du matin, le Pandhit Nehru, Premier ministre de l’Inde, ouvrit la séance de ce qu’on nommerait en France un Conseil des ministres. Il mit immédiatement en discussion les mesures à prendre pour parer à la famine qui ravageait le Bihar. Cette grande plaine du nord de l’Inde n’avait pas reçu une goutte de pluie depuis trois ans. Sur sa terre craquelée, les gens et les bêtes perdaient peu à peu l’eau et la chair de leur corps, et devenaient squelettes avant de mourir.
Ce qu’il fallait faire, c’était simple : irriguer le Bihar avec les eaux du Gange. Cela demanderait un demi-siècle. Distribuer de la nourriture. On n’en avait pas. Prier pour que la pluie tombât. On priait depuis toujours. »

Extrait de : R. Barjavel. « Le Grand Secret. »

La tempête par R. Barjavel

Fiche de La tempête

Titre : La tempête
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1982
Editeur : Gallimard

Première page de La tempête

« Judith aux étoiles

« Mettez-vous à votre aise », dit le Président Fergusson.
Et il ôta son veston.
Les ministres l’imitèrent avec soulagement. Le général Sunhorn, chef d’état-major, déboutonna sa vareuse, mais ne la quitta pas. Le secrétaire d’État garda sa chaude veste de tweed irlandais. Sur convocation urgente du Président, il venait d’arriver d’Australie, où c’était l’hiver. Il n’avait eu le temps ni de se doucher ni de se changer. Depuis qu’il avait plongé de l’avion dans la chaleur torride de Washington, la sueur l’inondait. Il avait peur, s’il ôtait son veston, d’incommoder ses voisins. Il prit dans sa serviette un mouchoir de papier, le passa entre son cou et le col de sa chemise et le jeta, humide, dans l’urne cubique, en acier inoxydable, posée au centre de la table de réunion. L’urne l’avala, l’incinéra et broya ses cendres, avec une petite fumée et un ronron. C’était la corbeille à papier des réunions top secret. »

Extrait de : R. Barjavel. « La tempête. »

La peau de César par R. Barjavel

Fiche de La peau de César

Titre : La peau de César
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1985
Editeur : Mercure de France

Première page de La peau de César

« PREMIER SOIR
— Alors meurs, César !…

L’homme colla sur le papier la dernière lettre de son message. C’était R, qui terminait le mot CESAR.
Puis il plia la feuille et l’introduisit dans une enveloppe qui portait déjà une adresse, également constituée de syllabes et de lettres collées. Il eût été plus facile d’utiliser les lettres-décalques dont on trouve des variétés dans les papeteries, mais le papetier ou la papetière aurait pu se souvenir de lui, pendant l’enquête, tandis qu’acheter France-Soir est un acte presque invisible, et en tout cas innocent. C’était dans ce quotidien qu’il avait découpé ce dont il avait besoin, et un titre intérieur lui avait magnifiquement fourni les premiers mots de son message : FRANCE-SOIR moins FRAN donne : CE-SOIR.
Il ferma l’enveloppe et la glissa dans la poche intérieure de son léger veston d’été. Une autre enveloppe s’y trouvait déjà, portant une autre adresse  »

Extrait de : R. Barjavel. « La peau de César. »

La nuit des temps par R. Barjavel

Fiche de La nuit des temps

Titre : La nuit des temps
Auteur : R. Barjavel
Date de parution : 1968
Editeur : Pocket

Première page de La nuit des temps

« Le Dr Simon, les mains dans les poches, le front appuyé au mur de verre de sa chambre, regarde Paris, sur lequel le jour se lève. C’est un homme de trente-deux ans, grand, mince, brun. Il est vêtu d’un gros pull à col roulé, couleur pain brûlé, un peu déformé, usé aux coudes, et d’un pantalon de velours noir. Sur la moquette, ses pieds sont nus. Son visage est mangé par les boucles d’une courte barbe brune, la barbe de quelqu’un qui l’a laissée pousser par nécessité. A cause des lunettes qu’il a portées pendant l’été polaire, le creux de ses yeux apparaît clair et fragile, vulnérable comme la peau cicatrisée d’une blessure. Son front est large, un peu caché par les premières boucles des cheveux courts, un peu bombé au-dessus des yeux, traversé par une profonde ride de soleil. Ses paupières sont gonflées, le blanc de ses yeux est strié de rouge. Il ne peut plus dormir, il ne peut plus pleurer, il ne peut pas oublier, c’est impossible… »

Extrait de : R. Barjavel. « La nuit des temps. »