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C’est la lune finale par B. Blanc

Fiche de C’est la lune finale

Titre : C’est la lune finale
Auteur : B. Blanc
Date de parution : 1980
Editeur : Encre

Sommaire de C’est la lune finale

  • Ailleurs, jamais
    • Le soviet de Rétrograd de Y. Frémion
    • La révolution patauge dans le yaourt de B. Blanc
  • Ailleurs, demain
    • L’éclatement de Y. Olivier-Martin
    • Planétaires de la galaxie, unissez-vous ! de P. Larose
  • Ici, maintenant
    • Comme un soleil qui explose de D. Martinange
    • Une vie sans problème de M. Favarel
  • Ailleurs, demain
    • Variation autour d’un soupir de J.-P. Hubert
    • Grève générale de F. Jacomin
  • Ici, dedans
    • Sans temps morts et sans entraves de M. Benoit-Jeannin
    • Loto-gestion de P. Christin
    • Chacun de nous est une minorité ethnique de R. Durand
  • Ici, toujours
    • Le voyageur du rêveur de D. Douay
    • Le voyage de la morille de M. Jeury

Première page de La révolution patauge dans le yaout

« Je suis plongé dans une bande dessinée porno quand deux coups de sonnette me font sursauter. Pendant quelques secondes, je regarde autour de moi, sans trop savoir où je suis. Faut dire que les dessins pornos m’entraînent vers une douce rêverie, et que les coups de sonnette c’est plutôt le contraire. Vous me comprenez. C’était juste au moment palpitant où le gros monstre vert aux yeux pédonculés promenait ses quatre mains velues sur le corps blanc d’une actrice célèbre, un peu comme dans la troisième version de King Kong, mais en plus misérable.

Les bandes pornos, c’est tout ce qu’il me reste pour rêver. Je n’ai même plus envie d’aller au ciné sensoriel… Oh, à vous je ne vais pas raconter d’histoires… J’adore le sensoriel, mais c’est devenu trop cher pour moi. Voilà. Les quatre sous que j’ai mis de côté passent dans la bouffe de ma tendre petite famille. »

Extrait de : B. Blanc. « C’est la Lune finale. »

Quand le temps soufflera par M. Jeury

Fiche de Quand le temps soufflera

Titre : Quand le temps soufflera
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1983
Editeur : Fleuve noir

Première page de Quand le temps soufflera

« La mer était là : douce, rude, fidèle, éternelle… Pour la première fois depuis son retour du temps-plus, Simon Jallas pouvait regarder le monde sans trop d’angoisse. Il repartirait bientôt, il le savait. Il affronterait de nouveau les vents fous de l’année +10, mais il ne connaîtrait plus la terreur qui l’avait saisi à chacun de ses précédents voyages dans la destinée. Il serait prêt à affronter l’horreur et l’épouvante qui l’attendaient dix années en avant. Il serait prêt, il serait fort.
Les vagues dansaient à quelques pas en murmurant leur indéchiffrable message. La mer lui parlait. La mer savait peut-être. Un frisson d’écume courait sans fin tout au long de la plage. Les oiseaux criaient leur rauque salut. Le vent peignait la surface onduleuse de l’océan et tirait du sable un grésillement d’insecte piégé… Simon ouvrit grand la bouche pour expirer et l’air marin posa une touche salée sur la langue. Sensation naturelle, apaisante. »

Extrait de : M. Jeury. « Quand le temps soufflera. »

Poney-Dragon par M. Jeury

Fiche de Poney-Dragon

Titre : Poney-Dragon
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1978
Editeur : Bragelonne

Première page de Poney-Dragon

« Ella toucha par hasard les doigts de Vincent. Elle eut un petit rire d’excuse à demi étouffé. Vincent ne rit pas. Il sursauta et regarda sa main, mais il ne la voyait pas. Et il ne voyait pas Ella non plus.

Il se leva, traversa la pièce en accrochant un fauteuil avec la hanche et se mit devant la baie. Un beau soleil de fin d’été brillait sur le Centre Orenbourg Sud-Ouest. Les peupliers qui marquaient la limite du Val de l’Eyre commençaient pourtant à jaunir. Vincent les regardait pour la centième fois, mais il ne les voyait pas vraiment. Il observait, très au-delà des peupliers, un paysage secret, lointain.

— Ella, il faut que je sorte, dit-il d’un air préoccupé.

La jeune femme soupira légèrement. Elle était résignée. Elle avait l’habitude.

— Je voulais te proposer de manger avec moi ce soir… »

Extrait de : M. Jeury. « Poney-Dragon. »

Nounou par M. Jeury

Fiche de Nounou

Titre : Nounou
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 2002
Editeur : Robert Laffont

Première page de Nounou

« Que de bruit ! Que de bruit !Depuis ma descente du train, je n’entendais que clameurs, charivaris et tumultes. On s’appelait de-ci, de-là, à grands cris et grands gestes. Les porteurs proposaient leurs services en hurlant tandis que les locomotives crachaient leurs jets de vapeur comme de vieilles vaches leur dernier souffle. Les gens se heurtaient, donnant de l’épaule, agitant les bras, du moins ceux qui le pouvaient, car la plupart étaient chargés de sacs de toile ou de cuir.Sur l’esplanade devant la gare, les cochers de fiacre, claquant les rênes sur la croupe des chevaux apeurés, se forçaient un passage sous les invectives, hélés par des porteurs ployant sous les malles, les panières d’osier ou des équilibres miraculeux de cartons à chapeau.Quelqu’un, devant moi, montra l’énorme pendule de la gare de Lyon. J’y lus l’heure sans hésitation : 5 h 30 de l’après-midi.J’étais partie de chez moi depuis plus de douze heures. Augustin pesait lourd à mon bras, mais je me sentais plus forte que je n’aurais jamais osé l’espérer. Bien que ne sachant où me diriger dans cette folle cohue, je ne m’inquiétais pas trop : j’avais une langue et je parlais assez bien le français. »

Extrait de : M. Jeury. « Nounou. »

May le monde par M. Jeury

Fiche de May le monde

Titre : May le monde
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 2010
Editeur : Robert Laffont

Première page de May le monde

« Bonjour. Je suis le docteur Philip H. Goldberg, chargé des cours d’égologie et de mondologie à l’université libre de Sister Naya. À ce titre, je vous souhaite la bienvenue, chers étudiants, étudiantes et amis. L’égologie est une science ardue… si c’est une science. Peut-être un mélange de métaphysique et de psychologie, avec un zeste de physique quantique ? La théorie de la variation des probabilités du révérend père Feyman intervient aussi. Bref, une réflexion centrale sur l’univers infini et la condition humaine. Oh, les grands mots ! Je vous promets que nous ne les prononcerons plus dans ce cours. Enfin, le moins possible.

Je suppose que vous n’êtes pas ici pour préparer une thèse d’égologie. Rien qu’en France, il en jaillit chaque année quelques centaines de milliers, d’esprits torturés. Beaucoup sont en fait de simples carnets de méditation. Méditez donc et jetez vos carnets au feu. »

Extrait de : M. Jeury. « May le monde. »

Les yeux géants par M. Jeury

Fiche de Les yeux géants

Titre : Les yeux géants
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1980
Editeur : Robert Laffont

Première page de Les yeux géants

« J’ai vu les Yeux géants pour la première fois un soir de l’automne 2010. Un soir d’une douceur incomparable, d’une tristesse ardente et d’un calme de fin des temps.
Je participais à une méditation de groupe avec une dizaine d’amis. Un signe de l’époque : des centaines de millions de personnes dans le monde se livraient à des méditations de groupe presque chaque jour. J’étais consciente de suivre, d’une façon un peu moutonnière, un immense mouvement spirituel qui n’était lié à aucune religion établie. Mais je n’aimais pas penser que ce mouvement avait été déclenché ou, en tout cas, amplifié de façon considérable par l’apparition des Yeux géants.
Ce soir-là, pour moi comme pour beaucoup d’autres, la vérité a éclaté et il est devenu impossible de la refuser : nous vivions, et depuis longtemps, sous la haute surveillance des Étrangers. Les Yeux géants nous regardaient et nous n’étions plus les mêmes. »

Extrait de : M. Jeury. « Les yeux géants. »

Les trois veuves par M. Jeury

Fiche de Les trois veuves

Titre : Les trois veuves
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 2017
Editeur : Robert Laffont

Première page de Les trois veuves

« Pour la dixième fois en un quart d’heure, Marie bondit sur ses pieds chaussés de bottines à talons. Elle s’est habillée pour sortir et montrer un peu la ville à sa visiteuse. Elle préfère bavarder ou discuter en marchant, elle joue de son ombrelle et de son éventail, ce qui l’aide à réfléchir et lui donne une contenance. Toujours les nerfs qui sautent et se nouent pour un rien, la veuve Jardin !
La Sans-Corset, comme l’appellent les mauvaises langues de Saint-Genis et de plus loin…
Mais ce matin, elle a mis l’instrument de torture, avec le cache-corset par-dessus, sous sa robe d’organdi, peut-être trop élégante vu les circonstances. Bah, on ne perd rien à paraître à son avantage. Elle s’est habillée avec l’intention de sortir en taille, car le temps est doux et ensoleillé ce premier jour de mai, on peut se passer de »

Extrait de : M. Jeury. « Les trois veuves. »

Les secrets de l’école d’autrefois par M. Jeury

Fiche de Les secrets de l’école d’autrefois

Titre : Les secrets de l’école d’autrefois
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 2005
Editeur : Robert Laffont

Première page de Les secrets de l’école d’autrefois

« L’aventure magnifique

Apprendre à lire était vécu autrefois par beaucoup d’enfants du peuple comme une aventure magnifique. C’est ce que l’on ressent en tournant les pages du livre de lecture le plus célèbre de notre langue : Le Tour de la France par deux enfants1, de G. Bruno. Et cette aventure se confondait en partie avec celle de l’école de la IIIe République, du moins à ses débuts. Tous les enfants qui avaient la chance d’aller en classe quelques mois par an, pendant deux ou trois ans, réussissaient à lire couramment. Tous ? En 1900, l’armée chiffrait à environ 1 % le nombre de conscrits illettrés. On nous dit maintenant que 15 à 20 %, ou peut-être 25 % des élèves arrivent en sixième sans pouvoir décrypter deux lignes. Impossible de vérifier ces chiffres ; mais l’impression générale est bien que l’illettrisme ne fait que croître et embellir.

Ces maîtres d’autrefois croyaient à leur mission, aussi difficile fût-elle à accomplir. Ils trouvaient devant eux de nombreux obstacles. D’abord, jusqu’à la Première Guerre mondiale, une extrême pauvreté qui minait leur dignité et pouvait dans certains cas compromettre leur survie. Du côté des élèves, l’ignorance du français était assez générale chez les jeunes enfants des milieux ruraux. »

Extrait de : M. Jeury. « Les secrets de l’école d’autrefois. »

Les louves debout par M. Jeury

Fiche de Les louves debout

Titre : Les louves debout
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1984
Editeur : Fleuve noir

Première page de Les louves debout

« Au moment précis où Hugues Maillan prenait le couloir du premier étage, le soleil éclaira le tableau des lupins. Il regarda sa montre. Trois heures de l’après-midi… Le tableau se trouvait dans un angle mort, au fond du couloir. Il représentait une demi-douzaine d’animaux fantastiques, alignés devant un mur, sous un méchant croissant de lune. Enfant, Hugues les appelait les « loups debout ». Ils figuraient en bonne place au catalogue de ses terreurs.
L’ampoule du couloir, trop haute, laissait les lupins dans l’ombre et la lumière du jour ne les touchait qu’un moment, au milieu de l’après-midi, entre mai et septembre. D’être ainsi préservés les rendait plus mystérieux et plus redoutables. C’était la première fois que Hugues pouvait les observer en pleine clarté depuis… Il calcula. »

Extrait de : M. Jeury. « Les louves debout. »

Les iles de la Lune par M. Jeury

Fiche de Les iles de la Lune

Titre : Les iles de la Lune
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1979
Editeur : Fleuve noir

Première page de Les iles de la Lune

« Tête nue, ses longs cheveux noirs plaqués sur son visage maigre et bronzé, les mains posées sur les hanches, Algis Adamci regardait fixement le ciel qu’il ne pouvait voir.

– Dépêchez-vous, monsieur Adamci ! cria Abou Bo, le chef de l’équipe de surveillance. C’est une attaque climatique. A croire que les gens de Lackawanna vous ont repéré !

– Nous, on appelle ça un orage bison, monsieur Adamci, dit Togo Jeff, l’adjoint d’Abou. Je suppose que nous n’êtes jamais passé sous le ventre d’un bison ? Moi, ça m’est arrivé une fois !

– Et depuis, il ressemble à un grand singe cassé ! Ricana le pilote de l’hovercar dans son micro. »

Extrait de : M. Jeury. « Les iles de la Lune. »