Étiquette : Jeury
La vallée du temps profond par M. Jeury
Fiche de La vallée du temps profond
Titre : La vallée du temps profond
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 2007
Editeur : Les moutons électriques
Sommaire de La vallée du temps profond
- L’adieu aux lucioles
- Vers la haute tour
- Simulateur ! Simulateur !
- La guerre et mon amour
- Le temps des masques
- La fête du changement
- L’usine et le château
- Elle elle elle
- Escale
- La source rouge
- Allons voir si la rose
- Eve, à tout jamais
- Les négateurs
- Le cimetière des éléphants de la planète Cinéma
- OPA mon amour
- Je t’offrirai la guerre
- Phénix Copernic
- Vivre le temps
- Une fenêtre sur la guerre
- La disparition du conseiller Wordy
- Le voyage de la morille
- La bonne étoile
- Le vol de l’hydre
- Maxima la kickaha
- Le compagnon du paysan
- La vallée du temps profond
Première page de La vallée du temps profond
« Quelquefois, le cœur plein d’un espoir fou, je poursuivais au fond de la vallée mon chien César, un corniaud fureteur qui connaissait mieux les secrets de l’univers qu’un professeur de grec à la Sorbonne. Je courais vite, en ce temps-là. J’avais dix ans… Si ces mots ont un sens. Je veux dire les mots « an » et « temps ». Mais peu importe.
Le plus souvent, César bondissait vers la vallée de façon si soudaine que je n’avais aucune chance de m’accrocher à son sillage. Alors, en attendant son retour, je m’asseyais sur une pierre plate, toujours la même, et je regardais les vaisseaux ou les traîneaux flotter dans le temps profond, poussés par des chiens ou tirés par des serpents. Ces silhouettes étaient étirées et déformées par un phénomène de réfraction en traversant la surface du temps. Il fallait de jeunes yeux et un regard bien entraîné pour les distinguer des jeux d’ombre et de lumière dans les feuillages ou les nuages. Mais quel spectacle exaltant pour un petit paysan qui demandait la lune ! Je rêvais à l’infini, à l’éternité, comme d’autres aux prochaines vacances. »
Extrait de : M. Jeury. « La Vallée du temps profond. »
La source au trésor par M. Jeury
Fiche de La source au trésor
Titre : La source au trésor
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1994
Editeur : Robert Laffont
Première page de La source au trésor
« Constance Sénon et sa fille Faustine, âgée de six ans et demi, arrivent au bourg de Saint-Priest de Lafaux, un soir de décembre 1856, peu avant la tombée de la nuit. Le bourg est un tas de maisons, à peine plus hautes que les fermes du voisinage, qui serrent la route et la font éclater en deux venelles autour de la place du marché.
La jeune femme et la petite fille errent depuis plusieurs semaines de métairie en presbytère, mendiant parfois leur pain. Constance évite les asiles et les couvents, craignant par-dessus tout qu’on lui prenne son enfant. C’est une femme d’environ trente ans, vêtue d’un manteau en bon tissu de laine marron, presque luxueux, mais usé jusqu’à la trame. Un fichu à pois gris lui couvre la tête et les épaules, cachant plus qu’à demi son visage amaigri, fin, pâle, aux grands yeux fiévreux. Faustine porte une longue cape trouée, qui l’enveloppe jusqu’aux pieds, chaussés de sabots de paysans. Des boucles brunes frisottent sous le bonnet qui protège son front et ses oreilles, mais elle a les joues rouges, le nez pincé et les lèvres gercées. Un mouchoir d’homme, tout déchiré, est noué autour de son cou d’oiseau. »
Extrait de : M. Jeury. « La source au trésor. »
La Sainte Espagne programmée par M. Jeury
Fiche de La Sainte Espagne programmée
Titre : La Sainte Espagne programmée
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1981
Editeur : Fleuve noir
Première page de La Sainte Espagne programmée
« Dennic Joboem regarda le ciel par le toit ouvrant de la cabine. Devant lui, la piste s’étendait, poussiéreuse et presque droite. Il pouvait sans risque distraire son attention pendant quelques secondes.
Il eut une grimace d’inquiétude : les nuages s’accumulaient à l’ouest, du côté de la mer d’Amérique. On était à la fin de la matinée. Le temps couvert signifiait pour son véhicule électro-solaire un arrêt forcé de durée indéterminée. D’autant que ses batteries étaient presque à plat… Or, il se trouvait dans une région tout à fait désolée, quelque part en Eurasie, à la limite de l’Espagne et de la Galatie.
La roue avant gauche du camion s’enfonça dans une ornière. Il y eut un choc très sec, suivi d’un bruit suspect à l’arrière. Un bruit que Dennic connaissait bien : il avait encore perdu une caisse de savon ! Résigné, il s’arrêta et descendit sans couper le contact. »
Extrait de : M. Jeury. « La sainte Espagne programmée. »
La petite école dans la montagne par M. Jeury
Fiche de La petite école dans la montagne
Titre : La petite école dans la montagne
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 2005
Editeur : Pocket
Première page de La petite école dans la montagne
« C’était un matin d’octobre comme tant d’autres. La bruyère en fleur teintait de mauve les pentes au-dessus des bois, les sorbiers des oiseleurs jalonnaient les chemins de leurs grappes rouges, les bogues des châtaigniers commençaient à s’ouvrir, ici et là, et laissaient pleuvoir sur la terre les beaux marrons étincelants. Le vent portait l’odeur un peu âcre de la forêt en automne, sève, humus, champignons, feuillages mouillés…
Les matins de rentrée, pareils à celui-ci, s’alignaient vers l’avenir, en file indienne, de plus en plus flous et serrés ; trente au moins, si Victor Chambost vivait jusqu’à la retraite : il avait vingt-neuf ans. Il venait d’être nommé à Saint-Just-la-Roche, un village de quelques centaines d’habitants, à près de mille mètres d’altitude, au mont Pilat, dans la Loire.
La veille, il avait écrit au tableau le nom du président de la République : Monsieur Armand Fallières. Puis la date du jour : Vendredi 2 octobre 1908. Morale (pour tous). L’École. »
Extrait de : M. Jeury. « La petite école dans la montagne. »
La machine du pouvoir par M. Jeury
Fiche de La machine du pouvoir
Titre : La machine du pouvoir
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1960
Editeur : Bragelonne
Première page de La machine du pouvoir
« Than Horn débarqua le matin à l’astrodrome de la Nouvelle-Europe. Il déjeuna au bar des pilotes et navigateurs avec un ami rencontré par hasard et, comme tout le monde, il consacra aux formalités administratives les premières heures qu’il vivait sur la planète métropole. Il ne voulut pas visophoner chez lui, car ses parents adoptifs ne l’attendaient pas encore : il désirait les surprendre totalement.
Ses véritables parents étaient morts dans l’espace, vingt ans plus tôt, et il ne se souvenait pas très bien d’eux… Son père était navigateur à bord d’un astronef circumsolaire – un des meilleurs navigateurs de l’époque, disait-on – et sa mère, technicienne sur le même vaisseau. Mais vraiment il les avait oubliés, en bon citoyen dépourvu de sensibilité morbide. Oublier, tout était là, chacun le savait en ces temps heureux : la mémoire des hommes pouvait et devait s’effacer, au besoin, comme celle de l’Idéal-Machine… Un couple de vieux amis l’avait recueilli et adopté, à une époque où la Loi acceptait encore le dévouement humain. En l’an de Science M. 64, cet acte ne leur eût pas été permis. Machine merci ! »
Extrait de : M. Jeury. « La Machine du pouvoir. »
La grâce et le venin par M. Jeury
Fiche de La grâce et le venin
Titre : La grâce et le venin
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1992
Editeur : Robert Laffont
Première page de La grâce et le venin
« Transcrit sous dictée par maître Cieuzac,notaire à Bourg-de-Lémance. Je m’appelle Colin Aline, connue sous le nom de veuve Colin. Aujourd’hui, 2 août 1924, dixième anniversaire de la déclaration de guerre, j’approche de mes septante-cinq ans. Je trouve que ma vie est un roman, c’est pourquoi j’ai demandé à mon notaire… Oui, oui, notez ça aussi, maître… J’ai demandé à mon notaire, et en payant, d’écrire tout ce que je vais lui raconter, sans rien changer ni retrancher.J’ai été depuis l’âge de douze ans guérisseuse, panseuse ou, comme on dit, « leveuse de maux ». Écrivez tout, faites-moi signe si je vais trop vite, mais ne me coupez pas. Je sais ce que j’ai à dire et ce sera plus long qu’un testament. Mais, au fond, c’est bien une sorte de testament que je vous dicte. Soyez tranquille. Je ne veux pas raconter toute ma vie an par an, depuis ma naissance, qui a coïncidé comme par hasard avec la mort de ma pauvre mère. Je sais exactement où je vais commencer…
… Un beau jour d’avril 1898, j’avais quarante-huit ans. Quand je revois ce temps, j’ai l’impression que j’étais une vraie jeunesse et quand même il me semble que je n’ai pas changé. »
Extrait de : M. Jeury. « La grâce et le venin. »
La croix et la lionne par M. Jeury
Fiche de La croix et la lionne
Titre : La croix et la lionne
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1986
Editeur : Bragelonne
Première page de La croix et la lionne
« IBÉRIA-TERVILLE, SEPTEMBRE 3301
Greg Zaruel emplit ses poumons et quitta d’un léger bond le trottoir rapide qui plongeait vers la rue Médina-Sidonia et vers l’océan. À sa gauche, la voie lente remontait vers les tours du gouvernement régional, les six tours Europe. Il retomba en soufflant fort sur le trottoir central.
— Nage un peu, gros ! cria une voix moqueuse.
Il reçut un coup de hatacha à l’épaule et s’écarta pour laisser passer son agresseur. Celui-ci avançait à la tête d’un groupe de cinq jeunes, filles et garçons, en costume solarien : autant dire nus. Tous brandissaient des compensateurs de gravité en forme d’haltère à main, des hatachas. Ils posaient un pied sur le trottoir tous les quatre ou cinq mètres, puis décollaient et voletaient gracieusement au-dessus du sol. Ils s’amusaient bien et affichaient un complet mépris pour les piétons. Greg les vit s’éloigner en direction de la rue Véga où il se rendait lui-même. Selon toute probabilité, leur destination finale était bien différente. Ils n’avaient aucune raison, eux, et sans doute aucune envie de quitter la Terre, qui leur était sûrement douce et propice. »
Extrait de : M. Jeury. « La Croix et la Lionne. »
L’univers – ombre par M. Jeury
Fiche de L’univers – ombre
Titre : L’univers – ombre
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1987
Editeur : Fleuve noir
Première page de L’univers – ombre
« Une pluie de lumière m’éveilla. Il me sembla un instant que le soleil tout entier se mettait à fondre et coulait autour de moi en un ruisseau mousseux et pétillant. J’étais dans mon lit et le matin m’avait réveillé. Mais quel lit et quel matin ?
La lumière qui baignait la chambre m’étonna par une qualité que je n’arrivais pas à définir. Elle était vive et pâle, éclatante et soyeuse à la fois.
Je regardai avec curiosité ma chambre au plafond peint et le décor luxuriant de l’autre côté des baies vitrées. Je m’emplis les yeux de lumière, je laissai le ciel bleu se poser sur moi et j’admirai longuement le paysage. Ma tête était encore vide.
Un souvenir naquit dans ma mémoire, grossit et devint plus brillant que mille soleils Syris. Je me rappelai Syris, la visiteuse d’un autre monde. Je revis avec précision son visage long et mince, ses grands yeux verts, si doux et si fous, ses cheveux blonds qui dansaient sur ses épaules quand elle marchait de ce pas balancé dont le rythme me souleva une seconde. »
Extrait de : M. Jeury. « L’univers-ombre. »
L’armée rouge contre les utopistes par M. Jeury
Fiche de L’armée rouge contre les utopistes
Titre : L’armée rouge contre les utopistes
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1977
Editeur : Bragelonne
Première page de L’armée rouge contre les utopistes
« Simple péripétie. Incident mineur.
Peut-être… Ce serait le hasard qui aurait donné à cet événement une importance historique. Le hasard et la personnalité des protagonistes. Pour ceux qui l’ignoreraient encore : d’un côté, Clotilde Igor, commandant de l’Ira, l’Armée Rouge Internationale ; de l’autre, deux anarchistes célèbres, Pascal Fouvarol et Mara Idaho.
Le décor : une vallée du Massif Central, avec beaucoup d’arbres, de lacs, de rivières, un paradis secret entre la montagne et la plaine, le ciel et la terre, le passé et l’avenir…
Cent personnes de tout âge vivaient dans la communauté Allende de Serre-Bazac. Cette “utopie” s’était constituée autour de la ferme Fouvarol. Pascal Fouvarol était un homme du Sud, un aventurier repenti ou Dieu sait quoi. Il avait une femme jeune et belle… Contrairement à beaucoup de communautés qui avaient poussé comme des champignons après la révolution, soulevant le mépris et la haine des habitants, la “bande à »
Extrait de : M. Jeury. « L’Armée rouge contre les utopistes. »
L’année du certif par M. Jeury
Fiche de L’année du certif
Titre : L’année du certif
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1995
Editeur : France Loisirs
Première page de L’année du certif
« Paul Fontanes a traversé la classe de sa femme, il est venu poser ses coudes sur le bureau où Claire est en train de calligraphier un modèle d’écriture à l’encre rouge.
— C’est demain le dernier jour de classe. Tu pourrais te dispenser de préparer les cahiers des petits.
— Mais les gens nous regardent, depuis que nous sommes en école mixte. Et si les petits ne travaillent pas le dernier jour, les parents diront : « Ce n’était pas la peine de tout chambarder ! »
Paul Fontanes tire sur son faux col et sa cravate à système, essuie du dos de la main la sueur qui baigne son cou. C’est un homme de taille moyenne, mince, les épaules maigres, bien planté sur ses jambes courtes. Sa tête, un peu longue et chevaline, est juchée sur un cou nerveux, à la pomme d’Adam pointue et toujours en mouvement. »
Extrait de : M. Jeury. « L’année du certif. »