Auteur/autrice : CH91

 

La fée aux miettes par Charles Nodier

Fiche de La fée aux miettes

Titre : La fée aux miettes
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1832
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Première page de La fée aux miettes

« Non ! sur l’honneur ! m’écriai-je en lançant à vingt pas le malencontreux volume…
C’était cependant un Tite-Live d’Elzévir relié par Padeloup.
Non ! je n’userai plus mon intelligence et ma mémoire à ces détestables sornettes !… Non, continuai-je en appuyant solidement mes pantoufles contre mes chenets, comme pour prendre acte de ma volonté, il ne sera pas dit qu’un homme de sens ait vieilli sur les sottes gazettes de ce padouan crédule, bavard et menteur, tant que les domaines de l’imagination et du sentiment lui étaient encore ouverts !…
Ô fantaisie ! continuai-je avec élan… Mère des fables riantes, des génies et des fées !… enchanteresse aux brillants mensonges, toi qui te balances d’un pied léger sur les créneaux des vieilles tours, et qui t’égares au clair de la lune avec ton cortège d’illusions dans les domaines immenses de l’inconnu ; toi qui laisses tomber en passant tant de délicieuses rêveries sur les veillées du village, et qui entoures d’apparitions charmantes la couche virginale des jeunes filles !… – »

Extrait de : C. Nodier. « La Fée aux Miettes. »

Jean-François les-bas-bleus par Charles Nodier

Fiche de Jean-François les-bas-bleus

Titre : Jean-François les-bas-bleus et autres contes
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1832
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Sommaire de Jean-François les-bas-bleus

  • Jean-François les-bas-bleus
  • Baptiste Montauban
  • Paul ou la ressemblance
  • Lidivine
  • La combe de l’homme mort
  • Les fiancés, nouvelle vénitienne

Première page de Jean-François les-bas-bleus

« Le fantastique est un peu passé de mode, et il n’y a pas de mal. L’imagination abuse trop facilement des ressources faciles ; et puis ne fait pas du bon fantastique qui veut. La première condition essentielle pour écrire une bonne histoire fantastique, ce serait d’y croire fermement, et personne ne croit à ce qu’il invente. Il arrive aussi bientôt qu’une combinaison d’effets trop arrangés, un jeu trop recherché de la pensée, un trait maladroitement spirituel, viennent trahir le sceptique dans le récit du conteur, et l’illusion s’évanouit. C’est le joueur de gobelets qui a laissé rouler ses muscades, ou le machiniste qui a laissé voir ses ficelles. Tout disparaît à la fois, comme derrière le rideau prosaïque et désenchanteur des ombres chinoises. Vous avez vu ce que vous ayez vu. Le nécromancien, dépouillé de sa barbe et de son bonnet pointu, se recommande à vos visites, si vous êtes content, et il ne vous y reprendra guère pour peu que vous soyez de mon goût, car il n’y a rien de plus sot qu’une illusion finie. Envoyez-lui vos connaissances. Voilà tout ce que vous lui devez. »

Extrait de : C. Nodier. « Jean-François-les-bas-bleus et autres Contes. »

Jean Sbogar par Charles Nodier

Fiche de Jean Sbogar

Titre : Jean Sbogar
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1818
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Première page de Jean Sbogar

« Un peu plus loin que le port de Trieste, en s’avançant sur les grèves de la mer, du côté de la baie verdoyante de Pirano, on trouve un petit ermitage, depuis longtemps abandonné, qui était autrefois sous l’invocation de saint André, et qui en a conservé le nom. Le rivage, qui va toujours en se rétrécissant vers cet endroit, où il semble se terminer entre le pied de la montagne et les flots de l’Adriatique, semble gagner en beauté à mesure qu’il perd en étendue ; un bosquet presque impénétrable de figuiers et de vignes sauvages, dont les fraîches vapeurs du golfe entretiennent le feuillage dans un état perpétuel de verdure et de jeunesse, entoure de toutes parts cette maison de recueillement et de mystère. Quand le crépuscule vient de s’éteindre, et que la face de la mer, légèrement ridée par le souffle serein de la nuit, commence à balancer l’image tremblante des étoiles, il est impossible d’exprimer tout ce qu’il y a d’enchantement dans le silence et le repos de cette solitude. »

Extrait de : C. Nodier. « Jean Sbogar. »

Infernalia par Charles Nodier

Fiche de Infernalia

Titre : Infernalia
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1822
Editeur : BnF

Première page de Infernalia

« La nonne sanglante

Un revenant fréquentait le château de Lindemberg, de manière à le rendre inhabitable. Apaisé ensuite par un saint homme, il se réduisit à n’occuper qu’une chambre, qui était constamment fermée. Mais tous les cinq ans, le cinq de mai, à une heure précise du matin, le fantôme sortait de son asile.

C’était une religieuse couverte d’un voile, et vêtue d’une robe souillée de sang. Elle tenait d’une main un poignard, et de l’autre une lampe allumée, descendait ainsi le grand escalier, traversait les cours, sortait par la grande porte, qu’on avait soin de laisser ouverte, et disparaissait.

Le retour de cette mystérieuse époque était près d’arriver, lorsque l’amoureux Raymond reçut l’ordre de renoncer à la main de la jeune Agnès, qu’il aimait éperdument.

Il lui demanda un rendez-vous, l’obtint, et lui proposa un enlèvement Agnès connaissait trop la pureté du cœur de son amant, pour hésiter à le suivre : « C’est dans cinq jours, lui dit-elle, que la non ne sanglante doit faire sa promenade. Les portes lui seront ouvertes, et personne n’osera se trouver sur son passage. Je saurai me procurer des vêtements convenables, et sortir sans être reconnue : soyez prêt à quelque distance… » Quelqu’un entra alors et les força de se séparer. »

Extrait de : C. Nodier. « Infernalia. »

Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé par Charles Nodier

Fiche de Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé

Titre : Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1836
Editeur : Bibliothèque numérique romande

Sommaire de Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé

  • Hurlubleu
  • Léviathan le long
  • Zerothoctro-Schah proto-mystagogue de Bactriane
  • Voyage pitoresque et industriel de Kaout’t’chouk dans le Paraguay-roux et la Palingénésie australe

Première page de Hurlubleu

« Grand Manifafa d’Hurlubière ou la Perfectibilité

– Que le diable vous emporte ! s’écria le Manifafa.
– Le grand loustic de votre sacré collège des mataquins en est-il ? dit Berniquet.
– Non, Berniquet, reprit Hurlubleu. Je parlais à cette canaille de rois et d’empereurs qui m’assassinent tous les soirs de leurs salamalecs, et qui usent à force de la caresser de vils baisers la semelle de mes augustes pantoufles. Je t’aime, Berniquet ; je t’aime, grand loustic du sacré collège des mataquins, parce que tu n’as pas le sens commun, et que tu ne manques point d’esprit sans qu’il y paraisse. Il faut même que j’aie fait une haute estime de ton mérite pour t’avoir conféré à la première vue une des plus éminentes dignités de mon empire, car je me souviens que tu tombas chez moi comme une bombe. »

Extrait de : C. Nodier. « Hurlubleu et autres contes du dériseur sensé. »

Histoire du Roi de Bohême et de ses sept chateaux par Charles Nodier

Fiche de Histoire du Roi de Bohême et de ses sept chateaux

Titre : Histoire du Roi de Bohême et de ses sept chateaux
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1830
Editeur : BnF

Première page de Histoire du Roi de Bohême et de ses sept chateaux

« Que ferois-je au reste d’un cheval ? je n’en donnerois pas la coquille univalve — je ne sais si c’est un cône ou un fuseau, une olive ou un sabot, une hélice ou un buccin — je crois que c’est une porcelaine — non, — je ne donnerois pas un fragment de cette petite monnoie du sauvage que la mer roule sur tes plages, pauvre et heureux insulaire, pour le cheval d’Alexandre qui avoit la tête du bœuf, et pour celui de César qui avoit le pied du bélier.

Ne puis-je voyager sans cheval dans tous les espaces que Dieu a ouverts à l’imagination de l’homme ? N’ai-je pas à mon service la voiture commode et obéissante dont il me fit présent, pour toute part de mon céleste héritage, et que j’ai préférée quelquefois aux chars de Pharaon ? »

Extrait de : C. Nodier. « Histoire du roi de Bohême et de ses sept chateaux. »

Histoire du chien de Brisquet par Charles Nodier

Fiche de Histoire du chien de Brisquet

Titre : Histoire du chien de Brisquet
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1853
Editeur : BnF

Première page de Histoire du chien de Brisquet

« En notre forêt de Lions, vers le hameau de la Goupillière, tout près d’un grand
puits-fontaine qui appartient à la chapelle Saint-Mathurin, il y avait un bonhomme,
bûcheron de son état, qui s’appelait Brisquet, ou autrement le fendeur à la bonne
hache, et qui vivait pauvrement du produit de ses fagots, avec sa femme qui
s’appelait Brisquette. Le bon Dieu leur avait donné deux jolis petits enfants, un
garçon de sept ans qui était brun, et qui s’appelait Biscotin, et une blondine de
six ans, qui s’appelait Biscotine. Outre cela, ils avaient un chien bâtard à poil
frisé, noir par tout le corps, si ce n’est au museau qu’il avait couleur de feu ; et
c’était bien le meilleur chien du pays, pour son attachement à ses maîtres. »

Extrait de : C. Nodier. « Histoire du chien de Brisquet. »

Dictionnaire raisonnée des onomatopées françaises par Charles Nodier

Fiche de Dictionnaire raisonnée des onomatopées françaises

Titre : Dictionnaire raisonnée des onomatopées françaises
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1808
Editeur : BnF

Première page de Dictionnaire raisonnée des onomatopées françaises

« AARBRER. Se cabrer. Terme de Manège, qui se dit des chevaux qui se dressent sur les pieds de derrière quand on leur tire trop la bride.Ce mot, plus énergique que celui qui nous est resté, et dont la double voyelle rend la construction plus imitative, est depuis longtemps hors d’usage. On le trouve dans le vieux roman de Perceval. »

Extrait de : C. Nodier. « Dictionnaire raisonné des onomatopées françaises. »

Contes fantastiques par Charles Nodier

Fiche de Contes fantastiques

Titre : Contes fantastiques
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1850
Editeur : BnF

Sommaire de Contes fantastiques

  • Trésor des fèves et fleur des pois
  • Le génie bonhomme
  • La fée aux miettes
  • Le songe d’or
  • Smarra ou les démons de la nuit

Première page de Trésor des fèves et fleur des pois

« Il y avoit une fois un pauvre homme et une pauvre femme qui étoient bien vieux, et qui n’avoient jamais eu d’enfants : c’étoit un grand chagrin pour eux, parce qu’ils prévoyoient que dans quelques années ils ne pourroient plus cultiver leurs fèves et les aller vendre au marché. Un jour qu’ils sarcloient leur champ de fèves (c’étoit tout ce qu’ils possédoient avec une petite chaumière ; je voudrois bien en avoir autant) ; un jour, dis-je, qu’ils sarcloient pour ôter les mauvaises herbes, la vieille découvrit dans un coin, sous les touffes les plus drues, un petit paquet fort bien troussé qui contenoit un superbe garçon de huit à dix mois, comme il paroissoit à son air, mais qui avoit bien deux ans pour la raison, car il étoit déjà sevré. Tant y a qu’il ne fit point de façons pour accepter des fèves bouillies qu’il porta aussitôt à sa bouche d’une manière fort délicate. Quand le vieux fut arrivé du bout de son champ aux acclamations de la vieille, et qu’il eut regardé à son tour le bel enfant que le bon Dieu leur donnoit, le vieux et la vieille se mirent à s’embrasser en pleurant de joie ; et puis ils firent hâte de regagner la chaumine, parce que le serein qui tomboit pouvoit nuire à leur garçon. »

Extrait de : C. Nodier. « Contes fantastiques. »

Contes de la veillée par Charles Nodier

Fiche de Contes de la veillée

Titre : Contes de la veillée
Auteur : Charles Nodier
Date de parution : 1853
Editeur : BnF

Sommaire de Contes de la veillée

  • Jean-François les-bas-bleus
  • Histoire d’Hélène Gillet
  • M. Cazotte
  • Légende de Soeur Béatrix
  • Les aveugles de Chamouny
  • Histoire du chien de Brisquet
  • Les quatre talismans
  • Le pays des rêves
  • La combe de l’homme mort
  • Paul ou la ressemblance
  • Lidivine
  • Le bibliomane
  • Polichinelle
  • M. de la Mettrie
  • Baptiste Montauban
  • La filleule du seigneur
  • L’homme et la fourmi

Première page de Jean-François les-bas-bleus

« En 1793, il y avoit à Besançon un idiot, un monomane, un fou, dont tous ceux de mes compatriotes qui ont eu le bonheur ou le malheur de vivre autant que moi se souviennent comme moi. Il s’appeloit Jean-François Touvet, mais beaucoup plus communément, dans le langage insolent de la canaille et des écoliers, Jean-François les Bas-Bleus, parce qu’il n’en portoit jamais d’une autre couleur. C’étoit un jeune homme de vingt-quatre à vingt-cinq ans, si je ne me trompe, d’une taille haute et bien prise, et de la plus noble physionomie qu’il soit possible d’imaginer. Ses cheveux noirs et touffus sans poudre, qu’il relevoit sur son front, ses sourcils épais, épanouis et fort mobiles, ses grands yeux, pleins d’une douceur et d’une tendresse d’expression que tempéroit seule une certaine habitude de gravité, la régularité de ses beaux traits, la bienveillance presque céleste de son sourire, composoient un ensemble propre à pénétrer d’affection et de respect jusqu’à cette populace grossière qui poursuit de stupides risées la plus touchante des infirmités de l’homme : « C’est Jean-François les Bas-Bleus, disoit-on en se poussant du coude, qui appartient à une honnête famille de vieux Comtois, qui n’a jamais dit ni fait de mal à personne, et qui est, dit-on, devenu fou à force d’être savant. Il faut le laisser passer tranquille pour ne pas le rendre plus malade. »

Extrait de : C. Nodier. « Contes de la veillée. »