Étiquette : Robert Laffont
Les yeux géants par M. Jeury
Fiche de Les yeux géants
Titre : Les yeux géants
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1980
Editeur : Robert Laffont
Première page de Les yeux géants
« J’ai vu les Yeux géants pour la première fois un soir de l’automne 2010. Un soir d’une douceur incomparable, d’une tristesse ardente et d’un calme de fin des temps.
Je participais à une méditation de groupe avec une dizaine d’amis. Un signe de l’époque : des centaines de millions de personnes dans le monde se livraient à des méditations de groupe presque chaque jour. J’étais consciente de suivre, d’une façon un peu moutonnière, un immense mouvement spirituel qui n’était lié à aucune religion établie. Mais je n’aimais pas penser que ce mouvement avait été déclenché ou, en tout cas, amplifié de façon considérable par l’apparition des Yeux géants.
Ce soir-là, pour moi comme pour beaucoup d’autres, la vérité a éclaté et il est devenu impossible de la refuser : nous vivions, et depuis longtemps, sous la haute surveillance des Étrangers. Les Yeux géants nous regardaient et nous n’étions plus les mêmes. »
Extrait de : M. Jeury. « Les yeux géants. »
Les trois veuves par M. Jeury
Fiche de Les trois veuves
Titre : Les trois veuves
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 2017
Editeur : Robert Laffont
Première page de Les trois veuves
« Pour la dixième fois en un quart d’heure, Marie bondit sur ses pieds chaussés de bottines à talons. Elle s’est habillée pour sortir et montrer un peu la ville à sa visiteuse. Elle préfère bavarder ou discuter en marchant, elle joue de son ombrelle et de son éventail, ce qui l’aide à réfléchir et lui donne une contenance. Toujours les nerfs qui sautent et se nouent pour un rien, la veuve Jardin !
La Sans-Corset, comme l’appellent les mauvaises langues de Saint-Genis et de plus loin…
Mais ce matin, elle a mis l’instrument de torture, avec le cache-corset par-dessus, sous sa robe d’organdi, peut-être trop élégante vu les circonstances. Bah, on ne perd rien à paraître à son avantage. Elle s’est habillée avec l’intention de sortir en taille, car le temps est doux et ensoleillé ce premier jour de mai, on peut se passer de »
Extrait de : M. Jeury. « Les trois veuves. »
Les secrets de l’école d’autrefois par M. Jeury
Fiche de Les secrets de l’école d’autrefois
Titre : Les secrets de l’école d’autrefois
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 2005
Editeur : Robert Laffont
Première page de Les secrets de l’école d’autrefois
« L’aventure magnifique
Apprendre à lire était vécu autrefois par beaucoup d’enfants du peuple comme une aventure magnifique. C’est ce que l’on ressent en tournant les pages du livre de lecture le plus célèbre de notre langue : Le Tour de la France par deux enfants1, de G. Bruno. Et cette aventure se confondait en partie avec celle de l’école de la IIIe République, du moins à ses débuts. Tous les enfants qui avaient la chance d’aller en classe quelques mois par an, pendant deux ou trois ans, réussissaient à lire couramment. Tous ? En 1900, l’armée chiffrait à environ 1 % le nombre de conscrits illettrés. On nous dit maintenant que 15 à 20 %, ou peut-être 25 % des élèves arrivent en sixième sans pouvoir décrypter deux lignes. Impossible de vérifier ces chiffres ; mais l’impression générale est bien que l’illettrisme ne fait que croître et embellir.
Ces maîtres d’autrefois croyaient à leur mission, aussi difficile fût-elle à accomplir. Ils trouvaient devant eux de nombreux obstacles. D’abord, jusqu’à la Première Guerre mondiale, une extrême pauvreté qui minait leur dignité et pouvait dans certains cas compromettre leur survie. Du côté des élèves, l’ignorance du français était assez générale chez les jeunes enfants des milieux ruraux. »
Extrait de : M. Jeury. « Les secrets de l’école d’autrefois. »
Le territoire humain par M. Jeury
Fiche de Le territoire humain
Titre : Le territoire humain
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1979
Editeur : Robert Laffont
Première page de Le territoire humain
« La tige flexible s’inclina et le calice de communication vint se placer de lui-même devant le visage de Jonas Claude.
— TAC 2, dit la machine. Un appel pour SIVOC, codification DOO1, en provenance du méridien, hauteur 47°. Le prenez-vous ?
SIVOC signifiait : Sir Jonas Val One Claude. Le procurateur d’État Jonas Claude. Lui-même. Le méridien était le méridien 0, autrefois Greenwich, devenu sous le Grand État III méridien de Normandie et de Gao. La zone d’influence du procurateur en mission – qui n’était pas un fonctionnaire d’autorité – s’étendait de 2° longitude ouest à 2° longitude est.
— Je le prends, dit sèchement Jonas Claude.
Et il appuya sur une touche placée à l’angle gauche de sa table de travail.
— Donnez-moi toutes les informations complémentaires en non-phonie non-impression sur E2. J’écoute. »
Extrait de : M. Jeury. « Le territoire humain. »
Le sablier vert par M. Jeury
Fiche de Le sablier vert
Titre : Le sablier vert
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1977
Editeur : Robert Laffont
Première page de Le sablier vert
« Taël Ohelen sursauta quand la sonnerie du téléphone retentit. Il avait vingt-cinq ans et il n’était pas particulièrement nerveux. Mais il n’avait guère l’habitude d’entendre ce bruyant signal. À Stagamabo, seuls quelques hauts fonctionnaires impériaux et deux ou trois dizaines de riches familles possédaient un téléphone privé.
Omir Fenseng se leva en souriant.
— Je vais répondre. Tu permets ?
Taël inclina la tête… Archéologue, spécialiste de la période de haute technologie qui avait précédé la naissance de l’Empire, il savait qu’un siècle et demi plus tôt un fabuleux réseau de communication couvrait Nova Persei, reliant des dizaines ou des centaines de millions de postes. En y songeant, il éprouvait une étrange impression de fierté et de regret mêlés. Et d’espoir aussi. Un certain nombre de jeunes Perseiens, comme lui-même, s’étaient juré de reconquérir la puissance et la richesse ancestrales. Si ce n’était pas un mythe… »
Extrait de : M. Jeury. « Le Sablier Vert. »
Le monde du lignus par M. Jeury
Fiche de Le monde du lignus
Titre : Le monde du lignus
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1978
Editeur : Robert Laffont
Première page de Le monde du lignus
« Au moment précis où Lorek Nalan rentrait dans sa cabine, après sa période de travail du matin, il reçut un appel du Pont I. Le haut commandement du vaisseau… Un sourire las errait sur le beau visage noir qui emplissait l’écran central. Le nom de l’homme s’inscrivit sur l’écran gauche : Conseiller Asha N’Boro.
— Je vous connais, Monsieur le Conseiller, dit Lorek.
Asha N’Boro inclina la tête en guise de salut.
— Je n’avais pas cet honneur, technicien Nalan. Croyez que je le regrette. Le Lord colonel m’a chargé de vous poser quelques questions. Pour quelle raison faites-vous partie de l’expédition Centaurus ?
Lorek éclata de rire.
— C’est très simple. J’ai négligé de rayer la mention « accepteriez-vous de participer à un voyage d’exploration galactique ? » dans un »
Extrait de : M. Jeury. « Le Monde du Lignus. »
Le jeu du monde par M. Jeury
Fiche de Le jeu du monde
Titre : Le jeu du monde
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1985
Editeur : Robert Laffont
Première page de Le jeu du monde
« On y va ? Courage, Bruno Mansa ! » Angella éclata de rire et je l’imitai, la gorge un peu serrée. La date limite pour ma mise en jeu expirait dans quatre jours. À quoi bon attendre encore ? Nous entrâmes dans la première cabine libre. Angella renifla avec dégoût. Les précédents occupants avaient abandonné derrière eux un relent sucré assez infect. Il traîne toujours dans tous les coins des arènes de Susa des senteurs un peu folles. Les cabines ne sont pas épargnées.
— Je n’aime pas trop jouer ma vie sur un coup de dés… sans même lancer les dés ! avouai-je.
— De l’air ! fit Angella en s’éventant avec son vapo F. & T.
Docile, la soufflerie commença à chuinter et la cabine s’emplit de frais embruns. Je m’approchai du tableau, un peu gêné et gauche, car je n’avais pas l’habitude de jouer avec un témoin derrière le dos. Cela me semblait un acte intime exigeant la plus complète solitude… ce qui signifiait seulement que je ne jouais pas assez souvent. »
Extrait de : M. Jeury. « Le jeu du monde. »
La source au trésor par M. Jeury
Fiche de La source au trésor
Titre : La source au trésor
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1994
Editeur : Robert Laffont
Première page de La source au trésor
« Constance Sénon et sa fille Faustine, âgée de six ans et demi, arrivent au bourg de Saint-Priest de Lafaux, un soir de décembre 1856, peu avant la tombée de la nuit. Le bourg est un tas de maisons, à peine plus hautes que les fermes du voisinage, qui serrent la route et la font éclater en deux venelles autour de la place du marché.
La jeune femme et la petite fille errent depuis plusieurs semaines de métairie en presbytère, mendiant parfois leur pain. Constance évite les asiles et les couvents, craignant par-dessus tout qu’on lui prenne son enfant. C’est une femme d’environ trente ans, vêtue d’un manteau en bon tissu de laine marron, presque luxueux, mais usé jusqu’à la trame. Un fichu à pois gris lui couvre la tête et les épaules, cachant plus qu’à demi son visage amaigri, fin, pâle, aux grands yeux fiévreux. Faustine porte une longue cape trouée, qui l’enveloppe jusqu’aux pieds, chaussés de sabots de paysans. Des boucles brunes frisottent sous le bonnet qui protège son front et ses oreilles, mais elle a les joues rouges, le nez pincé et les lèvres gercées. Un mouchoir d’homme, tout déchiré, est noué autour de son cou d’oiseau. »
Extrait de : M. Jeury. « La source au trésor. »
La grâce et le venin par M. Jeury
Fiche de La grâce et le venin
Titre : La grâce et le venin
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1992
Editeur : Robert Laffont
Première page de La grâce et le venin
« Transcrit sous dictée par maître Cieuzac,notaire à Bourg-de-Lémance. Je m’appelle Colin Aline, connue sous le nom de veuve Colin. Aujourd’hui, 2 août 1924, dixième anniversaire de la déclaration de guerre, j’approche de mes septante-cinq ans. Je trouve que ma vie est un roman, c’est pourquoi j’ai demandé à mon notaire… Oui, oui, notez ça aussi, maître… J’ai demandé à mon notaire, et en payant, d’écrire tout ce que je vais lui raconter, sans rien changer ni retrancher.J’ai été depuis l’âge de douze ans guérisseuse, panseuse ou, comme on dit, « leveuse de maux ». Écrivez tout, faites-moi signe si je vais trop vite, mais ne me coupez pas. Je sais ce que j’ai à dire et ce sera plus long qu’un testament. Mais, au fond, c’est bien une sorte de testament que je vous dicte. Soyez tranquille. Je ne veux pas raconter toute ma vie an par an, depuis ma naissance, qui a coïncidé comme par hasard avec la mort de ma pauvre mère. Je sais exactement où je vais commencer…
… Un beau jour d’avril 1898, j’avais quarante-huit ans. Quand je revois ce temps, j’ai l’impression que j’étais une vraie jeunesse et quand même il me semble que je n’ai pas changé. »
Extrait de : M. Jeury. « La grâce et le venin. »
La soie et la montagne par M. Jeury
Fiche de La soie et la montagne
Titre : La soie et la montagne (Tome 2 sur 2 – Vallée de la soie)
Auteur : M. Jeury
Date de parution : 1999
Editeur : Robert Laffont
Première page de La soie et la montagne
« Un matin à Fourvière
Lyon, 1849
À l’occasion d’une belle matinée de printemps, Louis-Xavier Favière me proposa une excursion sur la colline de Fourvière, pour parler de mon avenir, me dit-il, tout en admirant le plus beau panorama du monde.
Je n’étais jamais encore allée à Fourvière, cette « colline où l’on prie », en face de la Croix-Rousse, la « colline où l’on tisse » ; on ne priait guère ici, de la chapelle à la cathédrale, que de la façon catholique ; quant au panorama, je me disais : Il ne peut guère différer de celui qu’on distingue du sommet de la Croix-Rousse, que je connais bien. »
Extrait de : M. Jeury. « Vallée de la soie – La soie et la montagne. »