Auteur/autrice : CH91
La féline par Gary Brandner

Fiche de La féline
Titre : La féline
Auteur : Gary Brandner
Date de parution : 1982
Traduction : M. Lederer
Editeur : J’ai lu
Première page de La féline
« Luna était assise devant sa hutte dans la chaleur de midi. Son regard inquiet était posé sur les hommes du village qui tenaient conseil un peu plus bas. Ils étaient accroupis en cercle au bord d’un champ d’herbes brûlées, un champ qui avait été jadis fertile. Au delà, on distinguait une étendue de
boue séchée, toute craquelée, avec au milieu une petite mare d’eau croupie. C’était tout ce qui restait d’un large point d’eau qu’hommes et bêtes avaient un jour partagé.
À la lisière de la jungle, les arbres autrefois verts et luxuriants étaient devenus, au cours de la sécheresse, des squelettes grotesques et rabougris. Au loin, la neige qui brillait sur les pics des hautes montagnes semblait narguer la soif du village.
Luna détourna les yeux pour regarder jouer son petit garçon. L’enfant avait une pierre dans la main. Il la lança à plusieurs reprises sur la terre aride en poussant de petits cris de joie. Se sentant observé, il leva les yeux vers sa mère et lui sourit. Ses dents étaient blanches et saines, son regard vif et intelligent. Luna lui sourit à son tour, mais son expression était triste.
– Chien, dit l’enfant dans le langage du village, en montrant à Luna la pierre nichée dans sa paume.
– Oui, acquiesça doucement Luna. C’est un gentil chien.
Le gamin reprit son jeu et la femme murmura :
– Amuse-toi tant que tu le peux, mon fils. Amuse-toi et sois heureux aujourd’hui. »
Extrait de : G. Brandner. « La féline. »
Hurlements n°3 par Gary Brandner

Fiche de Hurlements n°3
Titre : Hurlements n°3
Auteur : Gary Brandner
Date de parution : 1985
Traduction : E. Constant
Editeur : Fleuve noir / Gore
Première page de Hurlements n°3
« Du bout de sa botte, Gavin Ramsay coupa le radiateur électrique. Un beau geste civique qu’il faisait là; les 2 109 habitants du comté de La Reina pouvaient être fiers de leur économe shérif.
Ramsay se réinstalla confortablement dans son fauteuil, jambes allongées sur le bureau, et ses yeux se fixèrent sur la morne S31, rue principale de Pinyon, Californie, chef-lieu du comté de La Reina, altitude: 1 082 mètres.
De part et d’autre de la S31, une station-service, une pharmacie, un hôtel, un cinéma, une épicerie et un magasin de vêtements professionnels pour artisans, composaient le cœur de l’agglomération. Seuls la bibliothèque et l’hôpital se trouvaient en dehors, érigés sur les contreforts de la montagne.
La tempête qui avait fait rage ces deux derniers jours ne s’était calmée qu’à l’aube ; elle laissait derrière elle son empreinte humide, détrempée, que deux jours de plein soleil suffiraient à peine à éponger.
Gavin Ramsay en avait marre de la pluie. La chute incessante des trombes d’eau l’avait toujours déprimé. Contrairement à Elise qui devenait lyrique dès que le temps s’obscurcissait. »
Extrait de : G. Brandner. « Hurlements N°3. »
Hurlements n°2 par Gary Brandner

Fiche de Hurlements n°2
Titre : Hurlements n°2
Auteur : Gary Brandner
Date de parution : 1978
Traduction : J. Esch
Editeur : Fleuve noir / Gore
Première page de Hurlements n°2
« Karyn s’agenouilla dans l’herbe humide au pied du rosier. Toujours pas le moindre bouton ! Elle commençait à désespérer. Bien que David ne lui en ait jamais parlé, elle était persuadée que sa première femme était experte en jardinage. Voilà le problème, lorsqu’on épouse un veuf : impossible d’échapper aux comparaisons avec la compagne regrettée.
Karyn, il est vrai, ne se passionnait guère pour le jardin, mais David et le docteur Goetz pensaient qu’un travail manuel en plein air améliorerait son équilibre moral, et elle ne voulait pas les décevoir.
Elle n’entendit pas approcher les pas feutrés, et ne prit conscience d’une présence qu’en sentant un souffle chaud sur sa nuque. Elle voulut se relever, mais perdit l’équilibre et tomba à la renverse.
C’est alors qu’elle aperçut les yeux jaunes et les babines noires relevées sur de longues canines. Comme elle tentait de reculer, l’animal posa ses lourdes pattes avant sur ses épaules et la plaqua au sol. »
Extrait de : G. Brandner. « Hurlements 2. »
Hurlements par Gary Brandner

Fiche de Hurlements
Titre : Hurlements
Auteur : Gary Brandner
Date de parution : 1978
Traduction : J. Esch
Editeur : Fleuve noir / Gore
Première page de Hurlements
« La chaleur de septembre pesait lourdement sur Los Angeles. Dans le quartier résidentiel de Hermosa Terrace, toutes les fenêtres des maisons étaient closes. Seuls le ronflement des climatiseurs et le ronronnement étouffé d’une tondeuse à gazon venaient briser le silence.
Karyn Beatty se dressa sur la pointe des pieds pour embrasser Roy, son mari. Lady, leur petite chienne colley, approuva en agitant joyeusement la queue. C’était aujourd’hui leur premier anniversaire de mariage. Roy attira fermement Karyn contre lui et glissa sa main chaude et douce sous son fin chemisier tout en l’embrassant dans la nuque. Karyn leva la tête et plongea son regard dans les yeux noisette de Roy.
— Chris va arriver d’un instant à l’autre, souffla-t-elle.
— Nous n’ouvrirons pas.
— Tu ne peux pas faire ça à ton meilleur ami ! D’autant plus que c’est toi qui l’as invité à venir boire un verre pour notre anniversaire. »
Extrait de : G. Brandner. « Hurlements. »
Carrion par Gary Brandner

Fiche de Carrion
Titre : Carrion
Auteur : Gary Brandner
Date de parution : 1986
Traduction : M. Deutsch
Editeur : J’ai lu
Première page de Carrion
« C’était un lundi du début de février et il ne faisait pas chaud. McAllister Fain tira les épais rideaux cramoisis des fenêtres. Il habitait au premier. Il mit une cassette de musique d’orgue mollassonne, embrasa un bâtonnet d’encens au jasmin, baissa les lumières, alluma des bougies stratégiquement disposées et se plaça au centre de la pièce pour juger de l’effet produit.
Pas trop mal, estima-t-il. Il fit le tour du propriétaire, redressant les gravures métaphysiques qui recouvraient des reproductions d’Utrillo, rectifiant la position des accessoires occultes disséminés çà et là. Dehors, un chien aboyait et quelqu’un enjoignit en espagnol au maître de l’animal de le réduire au silence ou en chair à pâté. L’odeur combinée de l’encens et du jasmin luttait bravement contre les relents épicés du menudo que mijotaient les voisins du dessous. On ne pouvait jamais totalement ignorer la présence du quartier. »
Extrait de : G. Brandner. « Carrion. »
Les gaspilleurs par Mack Reynolds

Fiche de Les gaspilleurs
Titre : Les gaspilleurs
Auteur : Mack Reynolds
Date de parution : 1967
Traduction : J. de Tersac, D. Bellec
Editeur : Le passager clandestin
Première page de Les gaspilleurs
« Je n’ai pas bien compris, dit Paul Kosloff.
Son chef de service était mal à l’aise. Cela se voyait à la façon dont il frotta brusquement une allumette de cuisine sur le dessous de son bureau pour allumer le brûle-gueule de bruyère qu’il tenait entre les dents. Il éteignit l’allumette et la laissa tomber dans le vide-ordures.
— Vous m’avez entendu, Paul, dit-il. Nous vous retirons des affaires en ce qui concerne l’Ensemble soviétique.
Paul Kosloff le regarda longtemps, avec attention, sans parler. Son chef, embarrassé, reprit la parole :
— Paul, à notre époque de détente entre les États-Unis d’Amérique et l’Ensemble soviétique, vous constituez un véritable fauteur de troubles. Actuellement, nous ne voulons en aucun cas d’une nouvelle affaire U-2.
— U-2 ?
— Ne faites pas attention. Cela se passait, je crois, avant votre époque. Voici comment se présentent les choses : vos méthodes d’action ne contribuent pas, si je puis dire, à la détente dans les relations internationales. Je vais vous parler brutalement, Paul. En deux mots, j’ai reçu en haut lieu des ordres à votre sujet. Notre service doit absolument éviter tout acte susceptible de provoquer des difficultés avec l’Ensemble soviétique. »
Extrait de : M. Reynolds. « Les gaspilleurs. »
La puissance d’un dieu par Mack Reynolds

Fiche de La puissance d’un dieu
Titre : La puissance d’un dieu
Auteur : Mack Reynolds
Date de parution : 1966
Traduction : J.-P. Pugi
Editeur : Le Masque
Première page de La puissance d’un dieu
« Dans la cabine de la régie, Jerry s’étirait. Ed Wonder releva le regard vers l’horloge du studio. L’émission tirait à sa fin.
— Je voudrais revenir un peu en arrière, dit-il à son invité. Vous avez utilisé deux termes dont la signification exacte échappe sans doute à la plupart d’entre nous. – Il regarda le bloc-notes sur lequel il avait griffonné quelques mots, tandis que l’émission se poursuivait. – Palin… palin… quelque chose.
— Palingénésie, compléta Reinhold Miller sur un ton ne contenant qu’une légère trace de condescendance.
— C’est ça. Et métempsychose. Ne me suis-je pas trompé ?
— C’est correct. Métempsychose. Le passage d’une âme d’un corps à l’autre. Ce nom vient d’un mot latin lui-même dérivé du grec. En toute modestie, je pense être le plus grand spécialiste actuel en palingénésie et en métempsychose.
— Vous venez de définir la métempsychose, mais qu’est-ce que la palingénésie ?
— Ce terme est synonyme de renaissance, de réincarnation. C’est la doctrine de la transmigration des âmes. »
Extrait de : M. Reynolds. « La puissance d’un dieu. »
Le manoir des tortures par Robert Lionel Fanthorpe

Fiche de Le manoir des tortures
Titre : Le manoir des tortures
Auteur : Robert Lionel Fanthorpe
Date de parution : 1966
Traduction : L. Lechaux
Editeur : Fleuve noir / Gore
Première page de Le manoir des tortures
« Marion Sanderson descendit du taxi qui l’avait amenée de Chiavenna à la station du téléphérique. Les milliers de crêtes enneigées des chaînes du Bernina mordaient à pleines dents l’azur céleste paradisiaque. Elle regarda vers le sud, de l’autre côté de la vallée de Chiavenna et elle aperçut la pointe nord du lac de Côme et, là-bas au loin, la vallée de l’Adda, se jetant par l’ouest dans les eaux dormantes du lac. À cet endroit, la frontière s’étire vers le sud et l’ouest, tel un doigt pointé vers la Suisse. Marion respira à pleins poumons l’air frais et pur de la montagne, le savourant comme un verre de champagne.
Un employé suisse de la station, vêtu d’un uniforme impeccable, à la moustache arrogante et aux yeux malicieux, lui sourit gentiment. Elle lui montra son passeport et ses billets.
— Vous venez d’Italie, mademoiselle ?
— Oui.
— Bienvenue dans notre pays. Je pense que ce n’est pas votre première visite ?
— Si, c’est la première. »
Extrait de : R. L. Fanthorpe. « Le manoir des tortures. »
Pleins feux par Thierry Bataille

Fiche de Pleins feux
Titre : Pleins feux
Auteur : Thierry Bataille
Date de parution : 1987
Editeur : Fleuve noir
Première page de Pleins feux
« Marc observa la fille assise en face de lui, légèrement de travers sur la banquette. Depuis Rennes, il n’avait pas croisé un seul instant son regard. Ils avaient juste essayé de ne pas se frôler les jambes. Elle portait un pantalon court qui découvrait des bas noirs à motifs et un blouson en cuir vieilli sur un tee-shirt flou. Elle lisait, les yeux obstinément fixés sur les pages qu’elle tournait régulièrement, à un rythme d’environ une page par minute avait calculé Marc pour se distraire.
Il eut envie de lui parler, de dire : « Je suis Marc Leroy ! » Comme ça, pour voir sa réaction. Mais elle n’aurait pas de réaction. Elle était trop jeune.
La fille devait avoir remarqué qu’il la regardait car, depuis maintenant plus d’une minute, elle ne tournait plus les pages. »
Extrait de : T. Bataille. « Pleins feux. »
Immolations n°2 par Thierry Bataille, Sylviane Corgiat et Bruno Lecigne

Fiche de Immolations n°2
Titre : Immolations n°2
Auteur : Thierry Bataille, Sylviane Corgiat et Bruno Lecigne
Date de parution : 1988
Editeur : Fleuve noir / Gore
Première page de Immolations n°2
« Terré dans un coin de la grotte, Bertrand Carvajal essayait de scruter l’obscurité. Il ne distinguait rien à plus de dix mètres, devinait seulement la brèche dans la roche suintante d’humidité, d’où partait l’immense labyrinthe, dédale inextricable qui s’enfonçait sous terre et quadrillait le sous-sol de l’île. Bertrand n’osait pas faire le moindre bruit. Immobile depuis plusieurs heures, il avait l’impression que ses muscles tétanisés se calcifiaient peu à peu. Il se pétrifiait. Bientôt, métamorphosé en une statue de marbre, il serait incapable de réagir, de se défendre.
Il ferma les yeux. À l’idée de ce qu’il devrait faire, il sentit une sueur glacée sourdre à la racine de ses cheveux. Son cœur battait à se rompre. Des coups sourds résonnaient dans tout son corps et lui donnaient envie de vomir. L’atmosphère moite de la grotte lui parut s’épaissir. Il sentait la mousse gluante et nauséabonde qui en tapissait les parois, au fond de sa gorge, dans ses poumons, dans son estomac. Il déglutit, inspira lentement et, lorsqu’il expira à fond, des vapeurs fétides l’assaillirent. Depuis combien de temps avait-il quitté la chaleur de l’île, la lumière du jour ? »
Extrait de : Bataille, Corgiat et Lecigne. « Immolations 2. »