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Terminus 1 par S. Wul

Fiche de Terminus 1

Titre : Terminus 1
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1959
Editeur : Fleuve noir

Première page de Terminus 1

« Trois joueurs avaient étalé leurs cartes sur la table crasseuse. Tous trois regardaient Julius, qui n’avait pas encore parlé.
Julius eut un sourire de triomphe modeste qui fit étinceler ses dents blanches sous la lampe. Précautionneusement, comme on effeuille un artichaut, il détacha une carte de son jeu et la jeta en disant :
— Soleil d’Or ! Je suis maître aux soleils.
Il choisit une autre carte avec lenteur et dit encore :
— Constellation du Cygne ! Je suis maître.
Et puis, en abattant sa troisième figure, qui représentait une planète à sept satellites bariolés :
— Maître partout !
Il rafla le petit tas de diamants constituant les enjeux et l’envoya au fond de sa poche. »

Extrait de : S. Wul. « Terminus1. »

Retour à O par S. Wul

Fiche de Retour à O

Titre : Retour à O
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1956
Editeur : Gallimard

Première page de Retour à O

« Le juge se leva. Sa robe de lamé pourpre le faisait paraître plus grand que nature. Il lâcha les accoudoirs de son fauteuil de plasticor et tendit la main vers un assesseur. Le large pectoral décoré aux armes de la justice terrienne scintilla sur sa poitrine. L’assesseur lui tendit une feuille. Le juge s’en saisit et lut d’une voix grave :
— Attendu que le citoyen Jâ Benal est à l’origine de la catastrophe qui anéantit le quart de la cité de Lepolvi ; attendu que ses négligences de service ont motivé cette catastrophe qui a coûté la vie à des milliers d’hommes ; attendu qu’il ne bénéficie d’aucune circonstance atténuante,
« Par ces motifs, nous, Juge Suprême de la Haute Cour Mondiale, condamnons le citoyen Jâ Benal à la peine capitale. »
Au banc des accusés, Jâ Benal s’étonna de ne ressentir aucune émotion particulière. Il soutint un instant le regard du juge, et jeta les yeux sur la salle.
La foule bariolée restait muette. Jâ Benal distingua des visages hostiles, d’autres effrayés. Une tache rose attira son attention. C’était la tunique d’une  »

Extrait de : S. Wul. « Retour à O. »

Rayons pour Sidar par S. Wul

Fiche de Rayons pour Sidar

Titre : Rayons pour Sidar
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1957
Editeur : Fleuve noir

Première page de Rayons pour Sidar

« Aux issues de la grotte, les orgues de l’ouragan cessèrent peu à peu leurs lugubres rhapsodies. La tempête s’éloignait.
Le silence réveilla Lorrain, tapi dans l’ombre depuis des heures. Hébété, le Terrien se traîna sur le ventre et regarda dehors.
Les Monts Noirs dressaient des silhouettes impossibles dans un ciel wagnérien lourdement drapé d’écarlate. Fantaisies d’un cataclysme ancien, des flèches gothiques, des tours en dentelle soutenues de rosaces distordues défiaient les lois de l’équilibre au-dessus d’abîmes sans fond. Quelques nuées déchiraient encore leurs moires verdâtres à la pointe des sommets.
Des barrissements ricochaient sur les rocs, révélant la présence de bêtes inconnues.
— Ça bon, dit la voix du guide, ça très bon !
Il gambadait déjà au bord d’un gouffre et désignait quelque chose en bas. Lorrain progressa sur les genoux et pencha la tête. Sous lui, le fond de l’abîme paraissait ouaté de neige.
— Il a neigé ?
— Non, dit le guide, ça pas neige, ça « krofo ».
— Krofo ?
L’indigène aux pattes d’autruche cueillit une petite plante accrochée au roc et d’où la brise arrachait des bourres cotonneuses. »

Extrait de : S. Wul. « Rayon pour Sidar. »

Piège sur Zarkass par S. Wul

Fiche de Piège sur Zarkass

Titre : Piège sur Zarkass
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1958
Editeur : Denoël

Première page de Piège sur Zarkass

« Lui, enfin!
Passés les derniers écrans de feuillage, les hommes furent en présence du monstre. C’était lui qui, invisible encore, troublait leur sommeil depuis trois nuits en toussant lourdement dans la tôle du ciel, tandis que son haleine rougeoyait au nord-ouest.
Colossalement accroupi au fond du décor, sur son trône de forêts bariolées, le volcan bouchait tout l’horizon de sa masse. C’était lui, Safass-Thin!
… Crachant avec lenteur du sang dans les nuages.
Les indigènes s’étaient jetés au sol en se voilant la face. Du fond de la gorge, ils râlaient des mélopées rituelles et incompréhensibles. Les deux hommes restaient figés.
A leurs pieds moutonnaient les masses de verdure de la vallée, d’où montaient çà et là des cris d’animaux : rires de singes nains et pépiements d’oiseaux.
Darcel rompit le charme en désignant le volcan d’un coup de menton :
— Il a de la gueule!
Il s’exprimait avec conviction. Et sa gravité rendait plus comiques sa figure hérissée de poils roux et ses oreilles décollées. Laurent cacha un rictus dans sa barbe noire. Il humecta ses lèvres poudrées de pollen.
— La beauté des choses, mon cher, il n’y a rien de plus beau ! »

Extrait de : S. Wul. « Piège sur Zarkass. »

Oms en série par S. Wul

Fiche d’Oms en série

Titre : Oms en série
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1993
Editeur : Denoël

Première page de Oms en série

« En silence, le draag s’approcha du hublot donnant sur la salle de nature. Souriant, il regarda jouer sa fille.
C’était une jolie petite fille draag, avec de grands yeux rouges, une fente nasale étroite, une bouche mobile et, de chaque côté de son crâne lisse, deux tympans translucides à force de finesse.
Elle courait sur le gazon, faisait des culbutes et se laissait rouler jusqu’à la piscine en poussant des cris de joie. Puis elle descendait sous l’eau le plus bas possible et prenait assez d’élan pour surgir, telle une fusée, jusqu’au plongeoir où elle s’accrochait du bout des doigts.
Comme elle recommençait pour la troisième fois son manège, elle manqua le plongeoir et dut  »

Extrait de : S. Wul. « Oms en série. »

Oeuvres par S. Wul

Fiche d’Oeuvres

Titre : Oeuvres
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1970
Editeur : Robert Laffont

Sommaire de Oeuvres

  • Le temple du passé
  • Piège sur Zankass
  • La mort vivante

Première page de Le temple du passé

« Une plainte, et puis cet appel :

— Massir!

Une plainte encore, dans la nuit lourde, étroite, comme bornée de métal. Et puis l’appel rauque :

— Massir!

Chaud! Massir avait trop chaud. Qui l’appelait? Il ouvrit les yeux, ne vit rien. Rien que l’obscurité. Il fit un geste pour se lever et gémit à son tour, tordu par la douleur qui lui fouillait la poitrine, lui taraudait la nuque.

Il replongea dans l’inconscience, fit un voyage pénible dans un pays de velours noir, traversé d’éclairs et de phantasmes. Il se sentit rapetisser, atteindre la taille d’un enfant, d’un bébé couché dans son berceau. Le moteur du berceau devait cafouiller, car au lieu de dodeliner en douceur, il le balançait avec une amplitude cruelle. De haut en bas, de bas en haut, vertigineux! Les dents serrées, le cœur aux lèvres, Massir crispa ses doigts sur le bord de sa couche, de toutes ses forces. »

Extrait de : S. Wul. « Oeuvres. »

Odyssée sous contrôle par S. Wul

Fiche d’Odyssée sous contrôle

Titre : Odyssée sous contrôle
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1959
Editeur : Fleuve noir

Première page d’Odyssée sous contrôle

« Le vaisseau ralentissait depuis deux jours. Il approchait de Pink-Moon et commençait à lover sa course sur une orbite libre.
Au bar des premières classes, la foule était nerveuse, comme à chaque escale. Ceux qui devaient débarquer à Pink-Moon offraient des tournées généreuses et parlaient très fort, excités par la perspective de fouler bientôt le sol d’une planète après une claustration de plusieurs semaines.
Michel Maistre entra dans le bar, sourit au passage à quelques connaissances de voyage et se jucha sur un tabouret.
Soudain, le plancher parut trembler – oh ! très peu ! – et tous eurent pendant une seconde une sensation de chute libre dans les entrailles. Simultané- »

Extrait de : S. Wul. « Odyssée sous contrôle. »

Noô 2 par S. Wul

Fiche de Noô 2

Titre : Noô 2
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1977
Editeur : Denoël

Première page de Noô 2

« Chez Tchakan

Cômeville, capitale d’Imerine.
J’ai l’impression que nos cottes civiles nous déguisent. La soie me chatouille le dos. Bien qu’elle me fasse tousser, je m’habitue à mon oreille de plastique.
Nous sautons Jouve et moi dans une ligne de curseurs. Chaque bulle est de couleur différente. On dirait un chapelet de friandises étiré entre les hautes façades historiques. Tout me rappelle subtilement les Hauts-Faîtes, gonflés aux dimensions d’une cité.
Grands losanges de verdure encadrés de gratte-ciel à terrasses-jardins. Compositions en diagonales, décrochements éperdus vers le zénith, superpositions de colonnades et de coupoles en équilibre parmi de grands éventails de lumière. Triomphe d’un vigoureux baroquisme, la ville ne perd pas une occasion de rappeler qu’elle faillit devenir capitale  »

Extrait de : .S. Wul. « Noô 2. »

Noô 1 par S. Wul

Fiche de Noô 1

Titre : Noô 1
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1977
Editeur : Denoël

Première page de Noô 1

« … Suis fatigué de vos grosses questions subtiles, tatillonnes, assommantes. Et l’œil rouge de cet appareil qui enregistre mes paroles, là, me tape sur les nerfs.
Non ! Je n’ai jamais eu le typhus, ni la colibacillose ni la vérole ! De toute façon, vous ne connaîtriez pas les maladies que j’ai pu avoir. Elles ne sont même pas dans vos livres.
Il y a maldonne, vous dis-je. Moi, je cherche à être simple, à convaincre. Et vous vous accrochez à l’établissement d’un diagnostic… Est-ce si difficile de m’écouter jusqu’au bout, mon petit docteur ?
Donnez-moi de quoi écrire et finissons-en. Quelques kilos de papier suffiront.
Ouste ! Sortez de ma chambre ! J’ai horreur qu’on me lise par-dessus l’épaule. Et fichez-moi la paix tant que je n’aurai pas terminé. »

Extrait de : S. Wul. « Noô 1. »

Niourk par S. Wul

Fiche de Niourk

Titre : Niourk
Auteur : S. Wul
Date de parution : 1949
Editeur : Gallimard

Première page de Niourk

« La tribu avait élu domicile dans la vaste dépression située entre la chaîne Cuba au Nord, les monts Haït à l’Est et les lointains contreforts du massif Jamaï. L’herbe y était toujours verte et le gibier abondait.
Les hommes se mettaient à plusieurs pour traquer les meutes errantes, qui se voyaient rabattues vers les marécages et criblées d’éclats de corail. Puis ils dépeçaient les chiens sauvages et revenaient chargés de viande.
Vers le soir, ils arrivaient en vue du village de tentes… Ils jetaient leur chasse au milieu du brasier préparé par les femmes et la viande grésillait dans les flammes.
Ensuite, Thôz piquait les morceaux du bout de sa lance de chef et distribuait la pitance. Chacun mastiquait lentement sa part de chair mal cuite et de cendres craquantes.
Quand les hommes avaient assez mangé, ils se retiraient et, assis à la porte des tentes, riaient grassement au spectacle des femmes et des enfants se  »

Extrait de : S. Wul. « Niourk. »